La chose est passée inaperçue ou presque. Pourtant, compte tenu des relations incestueuses entre Israël et les États-Unis, elle pourrait apparaître lourde de conséquences.
C’était en 2015 : l’Union européenne imposait aux vingt-huit États membres une mesure en discussion depuis 2012. Au terme de sept longues années de débats était entérinée l’obligation d’étiquetage des produits en provenance des territoires occupés par Israël. Une mesure aussi controversée qu’attendue mais qui ne faisait que répondre à la législation de l’Union européenne qui impose d’informer les Européens sur l’origine des produits qu’ils consomment.
Sont concernés en majorité des produits agricoles, vins et cosmétiques en provenance de Cisjordanie, de Jérusalem-Est et du plateau du Golan.
Alors en visite aux États-Unis, Benyamin Netanyahou avait, bien sûr, réagi violemment en convoquant le représentant de l’Union européenne pour s’expliquer. Accusant les Européens de « décision hypocrite » et parlant des « répercussions » sur un ton de menaces à peine voilées, Netanyahou dit craindre que cela ne vienne apporter de l’eau au moulin de ceux qui appellent au boycott des produits en question.
À l’époque, l’Europe lui avait répondu par la bouche de Valdis Dombrovskis : « C’est une question technique, pas une prise de position politique. Les produits originaires d’Israël dans ses frontières internationalement reconnues bénéficient d’un traitement tarifaire préférentiel lors de leur entrée dans l’Union européenne. Cette situation ne changera pas. Les vingt-huit ne soutiennent aucune forme de boycott ou de sanction contre Israël. »
Les appels au boycott se multiplient en effet depuis des années au motif qu’Israël n’a jamais respecté la moindre des résolutions de l’ONU prises depuis 1967, ce qui est un fait acquis et non contestable. Bien au contraire, la politique de colonisation et d’annexion des terres – et de l’eau ! – par l’État hébreu n’a jamais été aussi vigoureuse et on doute que quelque chose ou quelqu’un, désormais, puisse se mettre en travers.
La semaine dernière, la Cour de justice de l’Union européenne a rendu un arrêt renforçant et précisant cette législation.
On apprend aujourd’hui, par l’une de ces déclarations fracassantes dont Donald Trump a le secret, que le gouvernement des États-Unis ne considérera plus les colonies de l’État hébreu en Cisjordanie occupée comme illégales. C’est le chef de la diplomatie Mike Pompeo qui l’a annoncé le 18 novembre devant la presse : « Après avoir examiné soigneusement tous les arguments de ce débat juridique », l’administration Trump conclut que « l’établissement de colonies de civils israéliens en Cisjordanie n’est pas en soi contraire au droit international ».
Tant pis si le département d’État avait dit l’exact contraire en 1978, tant pis si les colonies installées sur les territoires palestiniens occupés par Israël depuis 1967 sont jugées illégales par les Nations unies, tant pis si c’est l’une des clés des conflits qui ensanglantent la région depuis des décennies, l’administration Trump et, derrière elle, les tenants du « Grand Israël » ont tranché : « La vérité, c’est qu’il n’y aura jamais de solution judiciaire au conflit, et que les débats sur qui a raison et qui a tort au regard du droit international n’apporteront pas la paix », a assené Mike Pompeo.
Bref, circulez, y a rien à voir et business as usual.
Netanyahou, qui souhaite annexer tous les territoires, n’a bien sûr pas caché sa satisfaction : le Premier ministre israélien voit dans la décision américaine « le reflet d’une vérité historique », à savoir que « les juifs ne sont pas des colonisateurs étrangers en Judée-Samarie ».
La position américaine s’inscrit dans une liste déjà longue de décisions prises par l’administration Trump en faveur d’Israël, cela, non seulement en contradiction avec ses prédécesseurs, ce qui peut éventuellement se comprendre, mais au mépris de toutes les résolutions prises au nom du droit international. Dont, il est vrai, les États-Unis ne s’embarrassent guère…
À noter que peu de médias français, La Croix mise à part, semblent s’intéresser au sujet…