Quatre ans de cours, de démarches, d’emplois où on se lève à l’aube pour quelques dollars, les Borges-Sazaqui devront plier bagage et s’en retourner au Brésil. Airton partira le 6 mai 2010. Les autres suivront plus tard car les enfants doivent d’abord terminer leur année scolaire.
Portrait de la famille Borges-Sazaqui :
Airton Sasaki
Rita Borges (épouse d’Airton)
Ayumi Sazaqui (fille d’Airton et de Rita)
Mary Divina Borges (mère de Rita)
Douglas Borges (neveu de Rita)
Maria Helena (grand-tante de Rita)
Airton a trouvé un emploi dans une petite ville brésilienne dans sa profession qu’il n’a jamais pu exercer ici : La gastroentérologie. Le Québec, semble-t-il, peut faire l’économie d’un spécialiste. Avec les étudiants de McGill qui s’en vont dès qu’ils ont en poche leur diplôme, l’entente pour la mobilité de la main-d’œuvre entre le Québec et l’Ontario, on se demande un peu qui veillera à la santé des gens dans les deux méga-centre hospitaliers que les contribuables et leur descendance auront à payer pour les décennies à venir!
C’est le gouvernement du Canada qui a rejeté la demande d’asile d’Airton et de sa famille et Québec s’incline. Comme d’habitude. Ce n’est pas difficile quand on n’a pas de colonne.
Les Borges-Sazaqui avaient quitté Rio de Janeiro à la suite d’une tentative d’assassinat à l’endroit de Mary Divina Borges qui travaillait au Ministère de la justice de son pays et où elle luttait contre la corruption. La famille a été victime de menaces répétées. L’enlèvement de sa mère et de sa fille a été pour Rita ce qui a fait déborder le vase. C’est elle qui a pris l’initiative du départ de la famille pour le Québec qu’elle connaissait pour y avoir séjourné. Pour les commissaires à l’immigration, le fait qu’Airton soit venu l’y rejoindre quelques semaines plus tard, qu’il ait pris le soin de revoir ses patients avant de partir, démontre que leur situation si n’était pas dramatique. Le recours en appel pour motifs humanitaires a aussi été rejeté.
Des gens se font ainsi montrer la porte. D’autres, qui ont obtenu le privilège d’être acceptés au Québec - après des années d’attente et d’importants investissements en argent -, se voient recalés à l’examen des équivalences de diplôme. Ceux-là ne restent pas. Ils partent d’eux-mêmes pour le Canada, le Portugal, l’Angleterre, ou ailleurs.
Le Québec s’anglicise et n’offre aucune possibilité aux professionnels de contribuer par leur travail à son développement. Plus d’immigrants, plus d’assistés sociaux, plus de gens en quête d’un emploi et d’un médecin de famille, moins de médecins, moins d’infirmières, moins d’argent, moins de français, que veut ce gouvernement qui ne lésine pas sur les projets de construction (dont certains bénéficient…) mais ne semble éprouver aucun intérêt à ce qui touche de près ou de loin à la population : intégration des immigrants, francisation, soins de santé, éducation ?
Si le Québec n’est pas en mesure de recevoir adéquatement ceux qu’ils acceptent d’accueillir, il fait preuve d’une grave irresponsabilité et d’un grand manque de respect envers des gens qui portent en eux le rêve d’une vie meilleure. Par ailleurs, comment ne pas s’offusquer que le Canada choisisse à notre place les candidats aptes à venir vivre chez nous et se permette d’expulser un médecin spécialiste tel un vulgaire criminel ? Un moratoire sur l’immigration s’impose.
Je tiens à exprimer mes regrets et ma tristesse à la famille Borges-Sazaqui.
Immigrants d'aujourd'hui - Québec de demain
Si le Québec n’est pas en mesure de recevoir adéquatement ceux qu’ils acceptent d’accueillir, il fait preuve d’une grave irresponsabilité et d’un grand manque de respect envers des gens qui portent en eux le rêve d’une vie meilleure.
Tribune libre
Caroline Moreno476 articles
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3 commentaires
Archives de Vigile Répondre
1 mai 2010Le Québec dépend, pour sa survie, de l’effacement de son déficit démographique. Traduit en langage clair, de l’apport démographique d’une immigration qui se presse à ses portes. Pour l’année 2010, le Québec devrait accueillir 55 000 immigrants soit 20% de plus par rapport à l’année 2007. C’est un chiffre important, d’autant que la majorité des nouveaux arrivants s’installe à Montréal ou dans les environs immédiats, Laval et la Rive-Sud. Le seul vrai problème des immigrants qui s’installent est l’emploi. Bien qu’un nombre important d’entre eux soit scolarisé, souvent au niveau universitaire, il n’est pas facile pour les immigrants de se trouver un travail dans leur métier d’origine. La déperdition est dramatique, l’impression est déplorable : des ingénieurs, des architectes, des chirurgiens avec une longue expérience professionnelle se sont retrouvés à galérer pour gagner maigrement leur pitance. Les causes? Les Ordres professionnelles exigent des mises à niveau rédhibitoires, des parcours de combattant éreintants : Rabah, directeur d’une école nationale prestigieuse en Algérie s’est retrouvé, au salaire minimum, à faire de bas travaux. Déprimé, il a pris l’avion pour rentrer en Algérie où il n’a pas retrouvé l’emploi qu’il occupait. En face d’une réalité noire, les différents discours qui se relaient, et dont alfa, s’est fait l’écho depuis une dizaine d’années se ressemblent tous. Tous les ministres de l’Immigration qu’alfa a interviewé sont, grosso modo, sur le même discours. De François Perrault à Lise Thériault, l’optimisme était de rigueur. André Boisclair, André Boulerice, Joseph Facal, très volontaristes, se sont colletés avec un problème qui semblait les dépasser. Bien sûr, il faut nuancer. Des réussites particulières existent et notre journal les signale autant de fois que possible. Mais le gros de la communauté est affecté par une situation sur laquelle elle n’a pas prise et le gouvernement non plus. Le docteur Yves Lamontagne, président du Conseil des Médecins du Québec, refuserait-il de se faire soigne en Algérie, au Maroc, en Tunisie, sous prétexte que le médecin traitant n’est pas diplômé des universités du Québec. Plus généralement, une carie dentaire au Québec présente les mêmes caractéristiques qu’en Tunisie. Pourquoi donc un chirurgien-dentiste tunisien devrait-il faire la plonge dans le Vieux-Montréal sous prétexte qu’il n’a pas le diplôme pour exercer au Québec, dans une province où la pénurie de médecins se propage comme un cancer généralisé. Lors du lancement de la semaine de la campagne sur l’apport de l’immigration au Québec, le 28 septembre dernier, la ministre de l’Immigration et des communautés culturelles, Yolande James, dont le dada semble être l’emploi des immigrés , s’est dite désolée de la seule question que je lui ai posée : « Ne pensez-vous pas que l’immigration soit une bataille perdue d’avance?». Elle n’était pas la seule. Je l’étais également. Dans un pays où les besoins en emploi sont évalués à 700 000 d’ici à quatre ans, il est difficile de comprendre que la communauté maghrébine soit fauchée à ce point par le chômage. Une blessure d’autant plus vivement ressentie que Jean Charest, le premier ministre, a passé un accord avec la France pour l’installation des ressortissants de l’Hexagone dans La Belle Province dans leur métier d’origine. Les Maghrébins ont ressenti cette politique de facilitation comme une politique de deux poids deux mesures.
Journal Alfa
Archives de Vigile Répondre
29 avril 2010Caroline,
Qui sont ces commissaires fédéraux à l'immigration? Et quels sont leurs critères?
Comme ça revoir ses patients comme un médecin consciencieux avant de quitter son pays serait le signe que la situation n'était pas si dramatique.
Mary Divina Borgès qui a lutté contre la corruption au Brésil aurait été la parfaite citoyenne québécoise pour sentir la corruption qui gruge le régime Charest. On perd un médecin consciencieux et une famille de contestataires qui auraient fait d'excellents citoyens québécois.
C'est un exemple frappant et humain qui milite en faveur d'une citoyenneté québécoise. C'est dans les programmes du Parti québécois et de l'Action démocratique du Québec et il est certain que Québec solidaire et le Parti indépendantiste sont en faveur de la création d'une citoyenneté québécoise. Voilà un point à partir duquel pourrait se faire une UNION des forces indépendantistes et autonomistes, cette UNION qu'un groupe vise réaliser. La famille Borgès pourra alors revenir au Québec la tête haute. Nous lui enverrons une lettre spéciale d'invitation et nous fêterons son arrivée. A ton initiative, Caroline.
La question se pose:
"Si le Québec n’est pas en mesure de recevoir adéquatement ceux qu’ils acceptent d’accueillir, il fait preuve d’une grave irresponsabilité et d’un grand manque de respect envers des gens qui portent en eux le rêve d’une vie meilleure. Par ailleurs, comment ne pas s’offusquer que le Canada choisisse à notre place les candidats aptes à venir vivre chez nous et se permette d’expulser un médecin spécialiste tel un vulgaire criminel?"
Impossible de rester indifférent devant cette noble famille victime d'une injustice commise pas la bureaucratie fédérale qui émane du système politique canadien dont nous devons sortir et c'est urgent.
Une raison concrète et humaine de plus de vouloir faire l'indépendance qui implique une citoyenneté québécoise dont nous aurons le contrôle.
Des cas comme ceux-là, concrets et précis, sont précieux pour montrer la nécessité et l'urgence de faire l'indépendance du Québec. Et faire comprendre aux abstentionnistes, que leur abstention se trouve à entériner de pareilles injustices.
Et aussi faire comprendre à tous ceux dont l'action contribue à la division des forces de changement, qu'ils se trouvent à contribuer au maintien du régime en place où règne un corrompu et un corrupteur comme Jean Charest. Savoir que ce régime en place permet l'injustice dont est victime la famille Borgès est une puissante motivation pour vouloir changer ce régime.
Si tel était ton objectif, Caroline, et bien, il est atteint. Et nous t'en remercions.
C'est le genre de militantisme efficace que j'aime.
Je signale que cette famille porte le même nom que Jorge Luis Borgès, un très grand écrivain contemporain.
Robert Barberis-Gervais, 29 avril 2010,
40ème anniversaire de l'élection de 1970 où le Parti québécois a fait élire sept députés pour la première fois avec 24% du vote en disant qu'un vote pour le Parti québécois était un vote pour l'indépendance. C'était la belle époque. C'était avant l'étapisme...
Serge Charbonneau Répondre
29 avril 2010Merci pour cet excellent texte et merci de nous faire connaître cette triste histoire d'immigration (une autre).
Moi aussi je tiens à exprimer mes regrets et ma tristesse à la famille Borges-Sazaqui.
Une fois de plus nous constatons l'insensibilité totale de l'immigration.
De plus, le renvoie d'un spécialiste sont nous avons besoin est une aberration incroyable.
Et de plus, le renvoie d'une famille de langue latine, s'étant probablement bien intégré à notre langue et préférant vivre en français dans cette Amérique du Nord plutôt qu'en anglais, est tout aussi choquant.
Il est grand temps que le Québec devienne un Pays pour gérer lui-même totalement son immigration et prenne aussi toutes les mesures pour bien intégrer les nouveaux arrivants.
Merci, Mme Moreno, d’avoir su nous rendre si clairement cette triste histoire.
Serge Charbonneau
Québec