Qu’attendent les parlementaires pour nommer un vérificateur général ? Il y aura trois ans bientôt que Michel Samson assure l’intérim ! Trois ans ! Cette situation ridicule est malsaine pour une institution qui, bien qu’imparfaite, est cruciale pour la saine gestion des finances publiques au Québec.
Il y a une semaine, fait cocasse, Michel Samson comparaissait à la commission Charbonneau devant son prédécesseur, le commissaire Renaud Lachance : « Depuis le 1er décembre 2011, j’occupe le poste de vérificateur général par intérim », a-t-il dû rappeler, lors de la mise en contexte d’usage. M. Lachance était au courant… M. Samson a été le VG adjoint de 2008 à 2011.
Pour une institution qui représente le « chien de garde de la saine gestion des finances publiques » — mots du leader de la Coalition avenir Québec (CAQ), François Bonnardel, en juin — trois ans d’intérim est malsain.
À l’interne, l’intérim limite l’autorité, l’autonomie et les ambitions de celui qui se retrouve ainsi assis entre deux chaises : il ne sait jamais quand cet intérim risque d’être interrompu. C’est précisément pour éviter des situations du genre que la loi prévoit qu’un VG en titre reçoit un mandat de 10 ans non renouvelable. Il bénéficie donc d’une certaine « inamovibilité » (pour employer un terme courant lorsqu’on parle des juges). Le fait de ne pas pouvoir espérer un second mandat lui donne les coudées franches. Les lois des quatre autres personnes désignées par l’Assemblée nationale — Commissaire à l’éthique, Commissaire au lobbyisme, Directeur général des élections et Protectrice du citoyen — prévoient une limite aux situations d’intérim. Pour les trois premiers ci-dessus, c’est six mois. Pour la Protectrice du citoyen ? 30 jours !
Logique, car la situation d’intérim mine l’indépendance du VG face au gouvernement et aux parlementaires. C’est pourtant là un aspect fondamental de l’institution. Sa nomination doit être approuvée par les deux tiers de l’Assemblée nationale. Autrement dit, les partis d’opposition doivent l’accepter. Le VG présente son budget annuel non pas au Conseil du Trésor, mais au bureau de l’Assemblée nationale, qui « gère » le législatif. La loi immunise la personne qui occupe ce poste face à plusieurs types de poursuite judiciaire.
Cette semaine marque la pause de l’automne pour les parlementaires. Or, ceux-ci, le 3 juin, avaient adopté la motion suivante : « Que l’Assemblée nationale demande au gouvernement de proposer, dès la reprise des travaux prévue en septembre prochain, la nomination d’un vérificateur général en titre. » Le geste aurait été posé en coulisse. Puis rien.
Le gouvernement et la CAQ voudraient confirmer Michel Samson comme VG. Le Parti québécois s’y oppose farouchement. À leurs yeux, M. Samson a accepté une « commande politique » en acceptant de donner un portrait des finances publiques, ce printemps, après l’élection du gouvernement Couillard ; portrait qui a fait mal paraître le gouvernement Marois. Le gouvernement avait toutefois tout à fait le droit de réclamer ce portrait.
La rancune du PQ est pour le moins dommage. M. Samson travaille au bureau du Vérificateur général depuis 1990. Il a gravi les échelons pour devenir VG adjoint en 2008. Connaît l’institution profondément. Il a à son actif des rapports fouillés qui ont permis de mettre en lumière des problèmes de gestion et de dépenses importants (Tourisme Montréal !).
Pour nommer un VG, la coutume veut que l’appui soit unanime. Mais la loi n’exige qu’un vote aux deux tiers. Avec leurs 91 voix, le PLQ et la CAQ pourraient techniquement imposer leur choix et faire fi de l’opposition du PQ. Faudra-t-il en venir là pour mettre fin à cet intérim excessif et donner un vrai VG en titre au Québec ?
VÉRIFICATEUR GÉNÉRAL
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