L'année 2012 s'annonce difficile pour Pauline Marois

Actualité québécoise - vers une « insurrection électorale »?



Martin Ouellet La Presse Canadienne Québec - Pauline Marois n'a eu droit à aucun répit en 2011 et l'année qui vient s'annonce tout aussi éprouvante pour son leadership, son parti et le projet souverainiste.
La chef du Parti québécois va entreprendre la nouvelle année à la tête d'une formation amochée qui pourrait bien, si l'on prête foi aux sondages, disparaître de la carte à l'issue de la prochaine élection.
Les choses n'avaient pourtant pas si mal commencé en 2011 pour Mme Marois qui a su gérer sans trop de dommages en début d'année la grogne du groupe des «50», ces jeunes péquistes et bloquistes opposés à sa «gouvernance souverainiste».
En dépit des critiques de Jacques Parizeau _ et en sous-main celles de la députée Lisette Lapointe, épouse de l'ex-premier ministre _ Mme Marois est parvenue à imposer sa démarche lors du congrès des membres au mois d'avril.
La chef péquiste a même connu ses plus belles heures de gloire en obtenant un score historique de 93 pour cent lors du vote de confiance des militants réunis en congrès.
Puis, la situation a basculé, prenant une tournure cauchemardesque.
Les démissions ont suivi les démissions, les défections ont suivi les défections, une crise existentielle a secoué le caucus des députés et les militants d'association locale ont déserté en masse le navire péquiste.
Le feu couvait et le projet de loi 204 sur l'amphithéâtre de Québec, marrainé par la députée de Taschereau Agnès Maltais, a servi de bougie d'allumage.
Furieux de se faire enfoncer dans la gorge un projet de loi privé pour blinder l'entente controversée entre Quebecor et la Ville de Québec, trois députés _ Pierre Curzi, Lisette Lapointe et Louise Beaudoin _ ont claqué la porte du caucus, le 6 juin.
Le lendemain, le député de Nicolet-Yamaska, Jean-Martin Aussant, allait rejoindre les démissionnaires sur les banquettes de l'opposition, suivi une semaine plus tard de son collègue de Deux-Montagnes, Benoît Charette.
Les raisons invoquées par ces deux derniers pour justifier leur départ illustrent bien les difficultés de Mme Marois à manoeuvrer dans les eaux troubles du PQ.
Pour M. Aussant, Pauline Marois n'était pas assez souverainiste. M. Charette lui reprochait de l'être trop.
Charmé par la «trêve référendaire» de François Legault, le député de Deux-Montagnes est allé rejoindre la Coalition avenir Québec (CAQ). Quant à M. Aussant, il a fondé son propre parti souverainiste, Option nationale.
Dans ce climat délétère, les péquistes ont étalé leurs états d'âme sur la place publique, parfois par le biais d'échanges épistolaires publiés dans les journaux mais le plus souvent en «coulant» des informations aux médias sous le couvert de l'anonymat.
Les appels au calme de la chef n'ont pas permis, ou si peu, d'apaiser la tension.
Au terme d'une longue réunion extraordinaire de son caucus, en juin, Mme Marois a pourtant conclu que son parti était de nouveau «uni» et que l'hémorragie était terminée.
Elle avait tort.
En août, les médias ont fait grand bruit de la création d'une mouvance souverainiste en rupture avec le Parti québécois, le «Nouveau mouvement pour le Québec».
Le groupe est disparu rapidement des radars médiatiques mais son premier rassemblement réunissant quelque 400 souverainistes à la fin du mois d'août a eu pour effet d'affaiblir encore un peu plus l'ascendant de la chef du PQ sur ses troupes.
Pourtant, Mme Marois n'a pas ménagé les efforts pour rallier les militants et les députés.
L'introduction du vote libre des députés et autres propositions visant à «faire de la politique autrement» n'ont pas empêché un chapelet de présidents d'association et de membres d'exécutifs locaux de claquer la porte.
À l'automne, nombre de militants et de députés désemparés par le déclin du PQ dans les intentions de vote ont tourné le regard vers Gilles Duceppe, en retraite forcée depuis la débâcle du Bloc québécois à l'élection fédérale du 2 mai.
Effrayés par des sondages dévastateurs, une dizaine de députés _ notamment Daniel Ratthé, de Blainville _ ont voulu obtenir le départ de Mme Marois dans l'espoir que Gilles Duceppe vienne, tel un messie, sauver la mise.
Le député de Saint-Maurice, Claude Pinard, s'est particulièrement démarqué au cours de cette période trouble. Il a tour à tour affirmé que Gilles Duceppe était «l'as» dans la manche du PQ et que Pauline Marois était désavantagée auprès de l'électorat parce qu'elle est une femme.
À bout de patience, la chef du PQ a sorti les griffes en novembre, montrant la porte du caucus à deux de ses députés.
Daniel Ratthé, l'un des mutins qui s'activaient en coulisse, a été poussé
à la sortie «pour avoir renié ses convictions» et à cause de son «opportunisme» électoral. De fait, M. Ratthé croit aujourd'hui pouvoir sauver son siège de député sous la bannière de la CAQ.
Guy Leclair, de Beauharnois, a pour sa part été exclu pour s'être longuement épanché sur les déboires de Mme Marois auprès d'une journaliste. La leader du PQ a depuis passé l'éponge et le député trop bavard a réintégré le caucus.
Le report en janvier 2012 du conseil national prévu en décembre a permis à la leader du PQ de reprendre un peu son souffle et de consacrer ses énergies
à l'élection complémentaire dans Bonaventure.
Mais la forteresse libérale gaspésienne était imprenable.
Malgré l'impopularité du gouvernement Charest, le «scandale» de l'attribution des places en garderie à des sympathisants libéraux et l'absence d'un candidat de la CAQ, le PQ a terminé au second rang au scrutin du 5 décembre, bien loin derrière le candidat de Jean Charest.
Les vallées verdoyantes du pouvoir semblent bien loin pour le Parti québécois et Mme Marois n'est pas sortie de l'auberge.
La nouvelle coqueluche politique du Québec, la CAQ, risque de tout rafler sur son passage si le premier ministre Charest déclenche des élections en 2012.
Poussés par l'instinct de conservation, d'autres élus du Parti québécois pourraient se précipiter à la CAQ dans l'espoir de se faire réélire sous une bannière plus populaire.
Mme Marois a elle-même avoué lors de l'interruption des travaux parlementaires à l'Assemblée nationale, début décembre, que d'autres désertions pourraient survenir.
«On ne sait jamais, n'est-ce pas? Je ne suis pas dans la tête de toutes les personnes qui réfléchissent», a-t-elle laissé tomber dans son bilan de session.


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