Mario Laprise - Québec - Les politiciens traditionnels, tels que MM. Jean Charest et Steven Harper, conçoivent la démocratie comme étant le privilège qu'ont les citoyens de voter tous les quatre ans. Entre-temps, une fois élus, ces messieurs, manipulant leur parti, peuvent faire ce qu'ils veulent, c'est-à-dire répondre aux attentes et aux besoins de leurs bailleurs de fonds: les firmes d'ingénierie et de construction au Québec; les pétrolières et les grandes entreprises à Ottawa.
La saga des gaz de schiste des derniers mois est, hors de tout doute, l'expression exemplaire de ce que peut être la VRAIE démocratie. Devant une industrie rapace et cupide, sûre de ses bons droits, cautionnée par un gouvernement sans envergure et insoucieux des intérêts réels du peuple québécois, un groupe d'hommes et de femmes concernés par les méfaits possibles de cette exploitation ont affirmé haut et fort leurs inquiétudes lors des rencontres bidon organisées par l'industrie et lors des auditions du BAPE. Ils ont posé des questions pertinentes et ont exigé des réponses documentées, fiables et vraies. Ce que l'industrie n'a pas su faire parce que ne le pouvant pas, l'aventure étant à ce point risquée qu'aucune assurance ne peut être donnée.
Pourtant, la ministre des Ressources naturelles et le gouvernement, attendant du BAPE un rapport leur étant favorable, n'ont pas cessé de clamer que l'aventure était à l'avantage de tous.
Hélas, le rapport du BAPE a mis un holà à l'euphorie de Mme Nathalie Normadeau et à celle de M. André Caillé. Pis encore, le commissaire au développement durable «dresse un portrait accablant de la gestion gouvernementale dans le dossier des gaz de schiste». Mme Normandeau, politicienne inébranlable, demeure optimiste, sinon jovialiste, affirmant que tout ce que recommandent le BAPE et le commissaire est déjà, sinon chose faite, du moins dans la rédaction des règlements à venir. Va pour la politique, ce qui ne rassure personne!
La chose à retenir, c'est que des gens ordinaires, par leur détermination, par leur constance, par leur implication citoyenne ont pu mettre à mal un projet que l'industrie et un gouvernement complice ont essayé d'imposer en catimini, discrètement, par la porte arrière. Dissimuler, affirmer des faits non prouvés, mentir, promettre des gains aléatoires, voilà des gestes qui devraient amener des gestionnaires responsables à s'éclipser. Mais non, ces gens persistent et reprennent le collier, se disant toujours politiciens responsables, politiciennes responsables, soucieux, soucieuses du bien public. C'est à voir!
En dépit du cynisme ambiant, en dépit de la morosité face à la chose politique, ici, au Québec, la démocratie est encore présente, souvenons-nous du Noroît, du mont Orford et de ces gaz de schiste. Pas que la rue soit envahie comme en Tunisie ou en Égypte, mais une cohésion de citoyens informés, critiques et audacieux qui posent les bonnes questions et exigent des réponses vraies, étayées, pertinentes et réalistes. Si ces citoyens avaient avalé l'argumentation grossière de Mme Normandeau, l'industrie en serait à exploiter le potentiel non avéré des gaz en milieu habité et agricole de la Rive-Sud. Avec pour résultats: terres ravagées, nappes phréatiques polluées, milieu de vie massacré, mais des actionnaires comblés! Rien à voir avec la démocratie...
Cela dit, il faut quand même voter. L'opacité des conservateurs et la distance que le politicien Harper impose à l'information, aux questions des journalistes en chair et en os nous invitent à la plus élémentaire des prudences. Ce gars-là n'est pas franc, donc, bien loin de la démocratie, mot qu'il nous sert pourtant à toutes les sauces: graine de dictateur en puissance.
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Mario Laprise - Québec
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