Notre civilisation risque l’effondrement d’ici à peine quelques décennies en raison de la surexploitation chronique des ressources de la terre et de l’accroissement des inégalités. C’est ce que conclut une nouvelle étude commanditée par le NASA Goddard Space Flight Center.
Cette étude — dont la publication vient d’être acceptée par le Elsevier Journal Ecological Economics — se base sur la dynamique historique qu’entretiennent les civilisations par rapport à la nature, mais aussi à l’intérieur même de leurs structures sociales. Le modèle de recherche est donc multidisciplinaire.
Les chercheurs de NASA Goddard Space Flight Center — un important laboratoire de recherche américain — ont ainsi mis en évidence les raisons qui ont contribué à la chute des civilisations au cours des derniers millénaires. Selon leurs travaux, une série de facteurs liés entre eux sont à prendre en compte, parmi lesquels le climat, la population, l’eau, l’agriculture et l’énergie.
Ces facteurs peuvent mener à un effondrement de la civilisation s’ils convergent vers une « rareté des ressources provoquée par une trop grande pression exercée sur les capacités de la nature » et une « stratification économique entre riches et pauvres ». Ces phénomènes combinés « ont toujours joué un rôle central dans le processus d’effondrement. Du moins au cours des cinq mille dernières années », concluent-ils.
« Déficit écologique »
Le fait que l’humanité surexploite la majorité des ressources terrestres vitales pour sa survie fait de moins en moins de doute. À preuve, le « déficit écologique » annuel de l’humanité survient de plus en plus tôt chaque année, selon le Global Footprint Network, qui regroupe des scientifiques, des universitaires, des municipalités et des entreprises de partout dans le monde.
L’an dernier, le jour du dépassement est survenu le 20 août. En 1993, il y a donc à peine 20 ans, il est survenu le 21 octobre. Ce point de dépassement le moment, dans l’année, où la population mondiale a consommé l’ensemble des ressources que la planète était en mesure de produire pour l’année en cours.
Au rythme actuel, le Global Footprint Network évalue que « la demande de l’humanité en ressources et services écologiques exigerait une fois et demie la capacité de la Terre pour être satisfaite ». Selon ces mêmes calculs, « nous aurons besoin de deux planètes d’ici 2050 si les tendances actuelles persistent ». Si tous les Terriens consommaient comme les Canadiens, il nous faudrait l’équivalent de trois planètes et demie pour assurer notre subsistance.
Les pêcheries mondiales constituent un bon exemple de la surexploitation des ressources mondiales. Selon le Programme des Nations unies pour l’environnement, il pourrait être impossible d’exploiter commercialement les poissons des océans d’ici 2050.
Qui plus est, les bouleversements climatiques provoqués par l’activité humaine risquent d’aggraver les choses. Selon la Banque mondiale, de graves pénuries alimentaires sont ainsi à prévoir si le réchauffement planétaire poursuit sur sa lancée actuelle. Cela risque d’aggraver le problème de la faim dans le monde. Déjà, malgré une croissance marquée de la production agricole et une kyrielle d’engagements politiques, la faim dans le monde n’a pratiquement pas reculé, selon le rapporteur de l’ONU pour le droit à l’alimentation, Olivier De Schutter. Les stratégies censées permettre de lutter contre ce fléau ont lamentablement échoué, en plus de nuire à l’environnement.
Les scientifiques prédisent aussi un accroissement du niveau des océans qui affectera de plus en plus de populations côtières, des phénomènes météorologiques extrêmes plus fréquents ainsi que des effets irréversibles sur la biodiversité mondiale.
Les élites et le statu quo
Dans une telle dynamique, les citoyens les plus privilégiés sont toutefois prompts à refuser tout changement, soulignent les chercheurs qui ont mené l’étude financée par la NASA. Ils sont en effet moins affectés que les plus démunis par « les effets de la détérioration de l’environnement ». Ils peuvent donc se contenter du statu quo beaucoup plus longtemps avant d’être forcés d’agir.
L’étude financée par la NASA souligne par ailleurs que le développement technologique n’est absolument pas en mesure de permettre à l’humanité d’éviter le pire. « Les changements technologiques augmentent l’efficacité des ressources, mais aussi la surconsommation », peut-on lire dans le document.
Si l’effondrement paraît, en l’état actuel des choses, « difficile à éviter », les scientifiques mettent en avant la nécessité urgente de « réduire les inégalités économiques afin d’assurer une distribution plus juste des ressources, et de réduire considérablement la consommation de ressources en s’appuyant sur des ressources renouvelables moins intensives et sur une croissance moindre de la population ».
Avec Le Monde
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