Convention internationale sur la diversité culturelle:

L'UNESCO adopte une idée née au Québec

2006 textes seuls

Québec - Le Québec a remporté en 2005 sa première grande victoire diplomatique sur la scène internationale.
C'est à la suite d'une bataille de tous les instants menée depuis 10 ans que le Québec a convaincu le Canada et, par la suite, plusieurs autres pays de l'importance d'adopter une Convention internationale sur la diversité culturelle.
Le 20 octobre 2005, l'Unesco, c'est-à-dire l'Organisation des Nations unies pour l'éducation, la science et la culture, adoptait cette convention par 148 voix contre deux. Seuls, les États-Unis et Israël votaient à l'encontre de ce document. L'entente devra être ratifiée par au moins 30 pays avant d'entrer en vigueur. À ce moment, elle garantira aux gouvernements le droit de subventionner et de protéger leur culture sans enfreindre pour autant les règles économiques mondiales de libre-échange qui gèrent le commerce international.
Dès 1984, alors que le traité de libre-échange impliquant le Canada et les États-Unis commençait à être débattu, le Québec insistait pour que les industries culturelles soient exclues des dispositions du traité.
Le 16 juin 1999, le gouvernement québécois a officiellement déclaré qu'il favorisait la ratification d'un instrument international sur la diversité culturelle, afin de garantir aux États le droit de soutenir leurs artistes et leurs créateurs.
C'est la ministre des Affaires internationales du temps, Louise Beaudoin, qui se révélait l'avocate la plus convaincante de cette mesure. Elle avait notamment plaidé la cause auprès du premier ministre du Québec Lucien Bouchard et du premier ministre de France, Lionel Jospin.
Le gouvernement québécois persuadait vers la même époque le gouvernement fédéral, et notamment la ministre du Patrimoine, Sheila Copps, de partager cette lutte. Mme Copps a réuni les ministres de la Culture de plusieurs pays dans un réseau international pour mener la bataille.
Les pays francophones ont été sensibilisés à l'importance de se joindre au groupe lors des sommets de la Francophonie de Beyrouth (Liban, 2002) et d'Ouagadougou (Burkina Faso, 2004).
Au Québec, le gouvernement dirigé par Jean Charest poursuivait dans ce dossier la bataille engagée par le précédent gouvernement péquiste.
En octobre 2003, le directeur général de l'Unesco recevait le mandat de préparer pour 2005 un projet de convention qui serait débattu lors de l'assemblée générale de l'organisme.
Au début, certains pays comme le Chili et l'Argentine s'étaient joints aux États-Unis dans le camp des adversaires du projet. Ces pays ont ensuite retiré leurs réserves, laissant seuls les États-Unis et Israël pour lutter contre la convention. Un juriste québécois de notoriété internationale, Me Ivan Bernier, a été mêlé de près à la rédaction du projet de texte.
Les dispositions majeures de la Convention sont les suivantes. Les premiers articles affirment le droit de chaque pays de formuler et de mettre en oeuvre des politiques culturelles, et de créer un environnement propice à leur diffusion.
D'autres articles proclament que la Convention n'est pas subordonnée aux autres traités internationaux, notamment les traités de libre-échange.
On voit ici l'importance de ces mesures. Elles donnent à des petits pays des moyens de contrôler toute invasion culturelle de leur territoire par des oeuvres étrangères, par exemple en fixant des quotas ou en subventionnant les producteurs ou les artistes locaux.
Rappelons à titre d'exemple que les huit «majors» américaines du cinéma contrôlent 85 % du marché mondial du film, et 71 % du marché européen. Un mécanisme de règlement des différends complète la Convention. Les pays signataires ne sont toutefois pas obligés d'adhérer à ce mécanisme de règlement, et peuvent s'y soustraire. C'est d'ailleurs une des faiblesses de la Convention. On évite les sanctions ou l'arbitrage obligatoire qu'on retrouve dans d'autres ententes internationales (comme l'ALENA).
Selon Louise Beaudoin, ancienne ministre devenue enseignante à l'Université du Québec, ce n'est qu'à l'usage qu'on pourra juger de la valeur réelle de cette convention internationale. Elle se réjouit toutefois du chemin parcouru jusqu'à maintenant.
Quant au professeur Ivan Bernier, il rappelle que la conciliation entre pays en tant que solution pour régler un différend «est quelque chose de relativement nouveau» et pourrait donc éprouver au début certaines difficultés.


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