La chasse aux dons illégaux est ouverte

Chronique de Louis Lapointe

Les récentes révélations de Gilles Cloutier au sujet de présumés dons illégaux versés à Guy Chevrette via un ami auront probablement un effet domino sur la suite des témoignages recueillis à la commission Charbonneau.
Je connais des organisateurs péquistes qui connaissent bien les trucs de leurs adversaires.
Gilles Cloutier en a révélé un premier. L’installation de pancartes électorales payée par des tiers.
Un autre système moins connu est l’utilisation de personnels de cabinets professionnels dont la rémunération est versée sur une période de 11 mois plutôt que 12, à l'occasion d'une année où une élection est tenue. Ces employés sont libérés de leur travail afin de se consacrer bénévolement à temps complet au travail d’organisation politique le douzième mois de l'année.
Comme rien ne se perd et rien ne se crée, certains de ces cabinets professionnels facturent à des clients fictifs, qui sont en fait des donateurs délinquants, l’équivalent en argent du salaire d'un mois des employés libérés pour l'organisation d'élection.
Jean Brault était-il un de ces clients fictifs? Si John Gomery a cru en son témoignage, Jean Moisan qui avait été mandaté par le Directeur général des élections du Québec pour enquêter sur ses révélations à la commission Gomery a préféré croire la version de Groupe Everest.
J’ai posé plusieurs questions au DGE en 2006 afin de connaître l’étendue de l’enquête de Me Moisan. On a refusé de me répondre au motif que l’enquête de Me Moisan avait été effectuée à huis clos. Échange que je relate dans une chronique du 10 décembre 2009.
«Aucun lien n’a pu être établi entre Groupaction et le PLQ via le Groupe Everest, au sujet du versement des 50,000$ provenant des commandites et destinés au PLQ, malgré l’incriminant témoignage livré par Jean Brault, président de Groupaction, devant la commission Gomery.
Étrangement, la version de Jean Brault n’a pas été retenue par Me Moisan, pas plus que l’hypothèse de rémunération indirecte pour des services rendus en nature au PLQ, communément appelés troc, n’a été abordée dans le rapport de l’ancien juge.
Me Moisan a préféré accréditer la thèse selon laquelle l’argent sale des commandites aurait uniquement et innocemment servi à compenser une dette entre Groupaction et le Groupe Everest, sans autres buts cachés, alors qu’à cette époque celui qui deviendra plus tard conseiller en communication au bureau du premier ministre Jean Charest, Monsieur Michel Guitard, était vice-président du Groupe Everest.
Or, tout le monde sait dans le milieu judiciaire que la meilleure façon de perdre la trace de l’argent sale, c’est de multiplier les intermédiaires. Dans cette perspective, il est pour le moins étonnant qu’un ancien juge ait candidement accepté une version des faits sans chercher plus loin, et ce, même si l’argent était sale. La vérité est tellement plus éclatante sous les lampadaires !
À ce sujet, j’ai eu un échange de courriels avec Me Francine Barry, directrice par intérim des affaires juridiques du DGE au cours de l’été 2006, quelques jours après la publication du rapport Moisan, croyant y déceler ce que personne ne voyait.
À l’occasion de cet échange, j’ai appris que « le Directeur général des élections ne peut "refaire" l’enquête, porter un jugement sur la manière dont celle-ci a été tenue ou juger de la crédibilité de témoins qu’il n’a pas rencontrés. Dans son rapport, Me Moisan a répondu, selon l’appréciation et à la satisfaction du Directeur général des élections, au mandat qui lui avait été donné. »
Il n’y pas de mal à contribuer à un parti politique !

D’ailleurs, le nom de Groupe Everest n’est pas inconnu du milieu municipal.
«Le maire Jacques Olivier a accédé au pouvoir lors des élections de novembre 2001 en défaisant sa rivale Marguerite Pearson Richard et en faisant élire 37 de ses 42 candidats. Dès les premiers mois, l'octroi de contrats importants accordés à des proches du maire a soulevé la controverse autour de la nouvelle administration.
En mars, à la suite d'un appel d'offres, celle-ci a confié un contrat de communications de 1,3 million au groupe Everest, dirigé par Claude Boulay, un ami du maire. De même, elle a accordé à la firme d'avocats Mongrain, McClure Gibeau un contrat d'une valeur de 1,3 million pour les services de quatre avocats. A suivi, en avril, le contrat de 4,7 millions à un consortium d'ingénieurs dont plusieurs actionnaires avaient participé à la campagne de financement de Jacques Olivier.
» in Le Devoir, le 31 décembre 2002, L'An 1 de la fusion - Longueuillois, moi?

Depuis la publication de cet article, un membre de la firme d’avocats de l’administration municipale de Jacques Olivier, Mongrain, McClure, Gibeau, a été nommé juge à la Cour Supérieure du Québec.
***
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Louis Lapointe534 articles

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L'auteur a été avocat, chroniqueur, directeur de l'École du Barreau, cadre universitaire, administrateur d'un établissement du réseau de la santé et des services sociaux et administrateur de fondation.





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2 commentaires

  • Archives de Vigile Répondre

    6 mai 2013

    Si monsieur Lapointe le permet, voici à l'intention de Didier :
    http://fr.wikipedia.org/wiki/Revenu_de_base_inconditionnel
    Et le film en version imtégrale ici : http://le-revenu-de-base.blogspot.ca/
    La preuve est faite. Qu'est-ce qu'on attend pour mettre ça en pratique ?

  • Archives de Vigile Répondre

    2 mai 2013

    De la façon dont fonctionne la politique québécoise, les nantis achètent de l'influence et les moins nantis pâtissent.
    Hier (1er mai 2013) au téléjournal, il était question du salaire minimum à la chronique financière de monsieur Gerald Fillion.
    Je me dois de féliciter sérieusement et sincèrement monsieur Gérald Fillion qui présente cette chronique financière à Radio-Canada.
    Il a suggéré au téléjournal qu’il était peut-être temps d’envisager le revenu minimum garanti pour la population du Québec étant donné que le salaire minimum maintenait une personne en bas du seuil de la pauvreté.
    Étant donné que ça vient de quelqu’un de compétent en économie, peut-être qu’on va en tenir compte.