Voilà l’image que projettent présentement les chefs médiatiquement reconnus des troupes indépendantistes. Et lorsque les principaux porte-parole d’un peuple ne trouvent pas les mots ni les gestes pour le mobiliser, les adversaires en profitent pour foncer.
Le résultat navrant de l’élection québécoise du 26 mars dernier a accéléré une offensive qui était déjà bien entamée, contre le projet d’ériger un État de langue française en Amérique. Grâce à des subterfuges symboliques, comme cette reconnaissance bidon de la nation québécoise qui n’a aucune portée juridique, l’État canadien, aidé d’un gouvernement libéral provincial à sa solde, a savamment dupé une large proportion de francophones du Québec. Ils ont donc été nombreux à y voir là un accommodement raisonnable…
La tenue de la Commission Bouchard-Taylor, instaurée justement parce que l’intégration des nouveaux arrivants au Québec posent problème en termes « d’ajustements sociaux », prouve pourtant que les symboles n’ont aucun pouvoir de persuasion. Le Québec est une province qui fait partie d’une fédération de langue anglaise. Si les francophones y sont majoritaires à près de 80%, ceux-ci s’avèrent néanmoins minoritaires au Canada en constituant moins de 25% de sa population. À quoi bon alors joindre ce groupe en voie d’assimilation? Pourquoi s’y identifier si les tribunaux de cette province invalident eux-mêmes des dispositions de la Charte de la langue française, comme le récent jugement Hilton l’a fait avec la loi 104? Comble d’ironie, le gouvernement de Zoulous à l’Assemblée nationale recourra à la Cour suprême de ses maîtres pour obtenir l’autorisation de demeurer à genoux…
On envoie depuis longtemps au Québec ses enfants à l’école privée anglophone non-subventionnée en toute légalité. Puis, cette clientèle grandissante poursuit ses études dans des cégeps publics non-francophones pour finalement aboutir dans des universités où les cours sont dispensés dans la langue de Shakespeare. À n’en pas douter, le Québec s’anglicise en mode accéléré depuis le référendum de 1995. Les raisons sociales anglophones y pullulent dorénavant, banalisant ainsi l’anglicisation des populations des banlieues Sud et Nord de Montréal.
Le chef de l’Action démocratique, Mario Dumont, répète à satiété que l’adoption d’une constitution québécoise mettrait un frein à ce processus de minorisation des Québécois francophones. Il ajoute même qu’il ne faut pas augmenter le nombre d’immigrants qui s’installent annuellement au Québec, tant que le processus d’intégration n’aura pas été amélioré. On reconnaît ici le populisme du chef adéquiste, pour ne pas dire son malheureux sens électoraliste. Le propos du député de Rivière-du-Loup touche les Québécois francophones qui sentent leur poids démographique diminuer dans leur propre maison. Il les séduit également avec son projet de constitution qui évite la tenue d’un référendum sur la souveraineté. Sauf qu’il les trompe honteusement avec cette dernière idée! Symbolique, sa constitution n’aurait en effet aucun pouvoir juridique, comme la loi 101, puisque tributaire de la Charte canadienne des droits et liberté enchâssée dans la loi constitutionnelle de 1982. Un document, faut-il le rappeler, que le Québec a toujours refusé de signer…
Il est facile pour Mario Dumont de tromper un grand nombre des siens, puisqu’il n’a encore jamais exercé le pouvoir. Il ne s’est donc pas encore cassé les dents sur le parvis du Parlement canadien de son bon ami Stephen Harper, dit le guerrier. Le silence qu’il maintient au sujet du plan B qu’il brandirait en cas d’impasse trahit sa fuite en avant et son profond manque de courage. Le chef de l’opposition officielle ne perd rien pour attendre : la chute prochaine du gouvernement minoritaire à Québec va le propulser au pouvoir où il ne pourra plus se dérober.
Quant aux principales formations politiques québécoises qui se disent souverainistes, l’absence de discours concrets sur le projet de pays et surtout l’inexistence d’un échéancier qui pourrait le voir naître, essoufflent dramatiquement ceux et celles qui veulent le construire. Les élections partielles fédérales et québécoises qui vont se tenir bientôt n'annoncent rien de bon. Parti québécois et Bloc québécois pourraient bien en sortir affaiblis. Ils seront alors nombreux à rétorquer que ce type d’exercice démocratique n’a aucune signification, au contraire d’un scrutin général. Que diront-ils cependant si la nouvelle chef du Parti québécois devait mordre la poussière dans la circonscription de Charlevoix?
Patrice Boileau
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1 commentaire
Archives de Vigile Répondre
29 août 2007M. Boileau,
Vous êtes souvent très intéressant et ça continue.
Voici qu'un très récent sondage Crop-La Presse, paru ce matin, est de nature à donner espoir aux souverainistes modérés "les purs et durs n'en ont plus" même si Mme Marois est en danger dans Charlevoix. Résultat : Pauline Marois ferait le meilleur premier ministre, le Parti québécois est en avance, le Bloc reprend aussi de la vigueur, même l’idée de la souveraineté...
Une meilleure nouvelle pour les souverainistes serait que l'ADQ prenne le pouvoir et se mette en marche pour réaliser son programme autonomiste. S'il réussit, ça va être bon pour le Québec et mauvais pour la souveraineté et s'il s'écrase, ça va être bon pour la souveraineté. "Vu que les indépendantistes pensent qu'il va faillir, ils devraient le favoriser pour pouvoir jouir de la chose" en plus de favoriser l'option souverainiste qui a de la difficulté à lever.
Pour Mme. Marois et le PQ, c'est le contraire. Si, en gouvernant le Québec dans le Canada, elle réussit, les Québécois voudront moins se séparer "améliorer un ménage n'incite pas au divorce" et si elle ne réussit pas, le PQ se fera brobablement battre à l'élection suivante.