La position excessive des juges rend inutile la loi 103

les parlementaires québécois se doivent de se dissocier d’un jugement excessif élaboré à partir d’une constitution qu’ils n’ont pas avalisée

Chronique de Claude Bariteau




Si les parlementaires québécois adoptent la loi 103, ils reconnaîtront
qu’ils ont été excessifs en votant à l’unanimité la loi 104. En effet, pour
les juges de la cour suprême, il est excessif d’empêcher l’entrée, dans les
écoles publiques de langue anglaise, de tous les enfants de parents
francophones, allophones ou anglophones nés hors Canada.
Selon ces juges, lorsque des parents, de bonne foi, font réaliser à leurs
enfants une scolarité « importante » en langue anglaise dans une école
privée non subventionnée, il faut en tenir compte. Aussi estiment-ils que
mieux vaut alors procéder au cas par cas et définir des règles que de
trancher unilatéralement.
Devant une telle position, je dois, comme parlementaire québécois,
accorder une attention particulière aux bases sur lesquelles s’appuient ces
juges, en l’occurrence l’arrêt Solski et le droit individuel inscrit dans
la constitution canadienne de 1982. Je me dois de le faire parce qu’en y
référant, les juges avancent que des parents, opposés aux règles d’accès
aux écoles publiques du Québec, peuvent les contourner s’ils agissent
convenablement et tirer avantage des règles en cause pour leurs enfants,
leurs frères et sœurs et leur progéniture.
En le faisant, je découvrirais que ces juges m’invitent à me reconnaître
excessif alors qu’en 2002 j’ai estimé excessif d’octroyer à ces parents des
droits supplémentaires à ceux que leur accordent les chartes québécoises et
canadiennes. Chartes, rappelons-le, qui permet d’inscrire des enfants dans
des écoles privées non-subventionnées en autant que leurs parents en
assument les coûts.
Que faire alors ? Comme parlementaire, je maintiendrais la loi 104.
J’agirais ainsi parce qu’en acceptant la position des juges, je banalise
les règles que j’ai définies, j’invite des parents à les contourner et,
pire, j’astreins les contribuables québécois à financer la formation
d’enfants dont la seule qualité est d’être ceux de parents réfractaires aux
règles d’accès aux réseaux québécois de formation primaire et secondaire.
Dans les circonstances, cette voie s’impose. Recourir à la clause
nonobstant, concevoir un mécanisme de freinage (approche de Louis Bernard)
ou imposer aux écoles non-subventionnées les règles de la loi 101 ne sont
pas des choix appropriés. Les deux premiers s’inscrivent dans une
constitution que les parlementaires québécois n’ont pas reconnue. La
troisième va à l’encontre du droit des parents reconnus dans la loi 101.
Elle s’impose non pour défier la position des juges, simplement parce
qu’elle rappelle qu’en 2002 les parlementaires québécois ont choisi
d’empêcher que ne soit contournée la loi 101. Et, le voulant toujours en
2010, les parlementaires québécois se doivent de se dissocier d’un jugement
excessif élaboré à partir d’une constitution qu’ils n’ont pas avalisée.
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Claude Bariteau49 articles

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Claude Bariteau est anthropologue. Détenteur d'un doctorat de l'Université McGill, il est professeur titulaire au département d'anthropologie de l'Université Laval depuis 1976. Professeur engagé, il publie régulièrement ses réflexions sur le Québec dans Le Devoir, La Presse, Le Soleil et L'Action nationale.





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