Libre-échange

La transparence s'impose

Ce manque total de confiance des gouvernements dans l'intelligence populaire choque et désespère.

Accord de libre-échange Canada - Union européenne


Lancées au printemps 2009, les négociations pour un accord de libre-échange Canada-Union européenne en seraient, dit-on, à la phase critique préalable à la conclusion du processus. Même si les enjeux sont importants, l'information fait cruellement défaut, comme on a pu le constater lors du passage en commission parlementaire du représentant du Québec, l'avocat Pierre Marc Johnson.
Sans la sortie publique d'un groupe de députés, dont Louise Beaudoin, Pierre Curzi, Lisette Lapointe et Amir Khadir, peu de gens seraient au courant de la comparution de M. Pierre Marc Johnson devant une commission parlementaire, jeudi dernier.
Nommé par le gouvernement Charest pour défendre les intérêts du Québec au sein de la délégation canadienne, M. Johnson a vainement tenté de rassurer les députés de l'opposition, n'étant pas en mesure de leur fournir les détails, encore moins les textes au coeur de ces négociations. Le négociateur s'est donc contenté de réponses vagues que l'on pourrait résumer par sa propre affirmation, aussi laconique qu'inquiétante: «Tout est sur la table!»
Le Québec en sortira-t-il gagnant? Tout ce que l'on peut répondre, c'est qu'il faut l'espérer... L'ennui, c'est qu'il risque d'être trop tard pour contester les résultats, car, contrairement aux négociations de libre-échange sous Brian Mulroney, cet Accord économique commercial et global avec l'Europe n'aura jamais fait l'objet de discussions au sein de la société civile.
Depuis aussi loin que Pierre Elliott Trudeau, le Canada a cherché à diversifier ses relations commerciales pour être moins dépendant du géant américain. Malgré cette ouverture, l'Europe ne s'est pas montrée intéressée jusqu'à récemment, trop préoccupée qu'elle était à créer sa propre zone de libre-échange.
Avec l'arrivée au pouvoir de Brian Mulroney, le Canada a rompu avec ces tentatives infructueuses pour concentrer ses efforts sur son principal partenaire, les États-Unis. Après quelques années de négociations, l'Accord de libre-échange allait être adopté, non sans avoir été au coeur de la campagne électorale de 1988, avec le Québec comme grand défenseur.
Quoi qu'en disent ses détracteurs et malgré la présence d'éléments irritants certains, tel le fameux article 11 qui permet à une entreprise de poursuivre un gouvernement, l'ALE puis l'ALENA ont largement profité à l'économie canadienne.
Or, l'entrée en scène récente de la Chine est venue déplacer l'axe des relations commerciales vers l'Asie, tant pour les États-Unis que pour le Canada. Pour ne pas être en reste, Ottawa a dû s'adapter en plaçant cette région du monde en tête de ses priorités, notamment pour la vente de pétrole. Mais pendant que l'Ouest canadien trinque, l'Est peine à maintenir sa place sur le marché américain. C'est pourquoi les négociations en cours avec l'Union européenne doivent être prises au sérieux.
Malheureusement, tant à Québec qu'à Ottawa, on refuse de discuter des enjeux de ces négociations sur la place publique, de peur sans doute d'ouvrir un autre champ de mines politiques. Qu'il soit question d'exemption ou d'exception culturelle, d'aide à l'agriculture, de prix des médicaments ou d'ouverture des marchés publics aux multinationales, on ne compte pas le nombre de sujets litigieux qui mériteraient d'être soumis au débat public. Ce manque total de confiance des gouvernements dans l'intelligence populaire choque et désespère.


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