Le coeur et la raison

À chacun de choisir!

Chronique de Louis Lapointe

À l'occasion de son allocution prononcée lors du congrès de fondation de l’Option nationale auquel j’ai assisté comme représentant de la « presse », Pierre Curzi nous avait alors révélé que son cœur était avec Jean-Martin Aussant et tous les membres de ce parti.
Cette phrase m’avait alors intrigué.
Voulait-il nous dire que sa raison était demeurée au PQ ?
Le genre de phrase ambiguë qu'aiment prononcer les politiciens.
Il est toujours difficile de laisser un parti où on s’est fait de nombreux amis en compagnie desquels on a livré de féroces batailles, dont deux référendums, pour en fonder un nouveau.
En ce sens, contrairement à Pierre Curzi, je suis de ceux qui croient que quitter un parti pour un autre est plutôt un geste raisonné, reconnaissant toutefois, qu’avec les années, l’appartenance à cette nouvelle formation politique deviendra davantage un geste du cœur puisque, forcément, on s’y formera une nouvelle famille politique.
***
Je milite au sein du Parti québécois depuis l’âge de 12 ans, depuis 1970, année où mon père s’est présenté comme candidat du PQ dans le comté de Rouyn-Noranda.
Depuis cette élection, dans la mesure où mes fonctions me le permettaient, j’ai toujours prêté main-forte au PQ, le plus souvent comme conseiller juridique ou président d’assemblée dans Rouyn-Noranda. J’ai même été président d’élection lors de la campagne à la succession de René Lévesque en 1985. Lors de l’élection de 1994, ma maison de Val-Senneville dans le comté d’Abitibi-Est s’était transformée en QG du PQ.
Dans La Pinière, un comté de la Rive-Sud de Montréal, j’ai passé de longues soirées de pointage en compagnie des membres de ma famille péquiste. Autant que possible, j’ai essayé de ne manquer aucune activité organisée par des gens de mon comté que je considère aujourd'hui comme des amis. Ils le seront toujours.
En 2007, je suis allé travailler bénévolement pendant cinq semaines comme conseiller pour ma belle-sœur qui était la candidate du Parti québécois dans Rouyn-Noranda-Témiscamingue. Plusieurs vieux routiers m’avaient alors avoué être revenus au PQ après avoir su que le fils de Roland serait de la partie. On m’a même dit que ma contribution à cette campagne avait pu faire la différence entre une victoire et une défaite.
La circonscription de Rouyn-Noranda-Témiscamingue a été arrachée aux libéraux par seulement 200 voix.
Mon cœur est avec le PQ depuis 42 ans.
***
Toutefois, malgré cette longue histoire de fidélité, ma raison me dit que la fondation de l’Option nationale est une bonne chose pour le mouvement indépendantiste. Une grande bouffée d’air frais pour tous ces jeunes et moins jeunes qui ne se retrouvaient pas ou plus au sein du PQ.
Un parti de plus pour convaincre le plus grand nombre de Québécois possible de l'absolue nécessité de faire l’indépendance, d’abord et surtout des jeunes, l’avenir de notre nation.
C’est donc la raison qui m’a incité à voter pour l’Option nationale dans La Pinière, une imprenable forteresse libérale où un vote pour le PQ n’aurait absolument rien changé au résultat de l’élection.
J’ai par contre suggéré à mes enfants et leurs conjoints de voter pour le candidat du PQ si cela pouvait changer la donne dans leur comté respectif le soir du 4 septembre prochain, même si leur cœur était avec l’Option nationale. Ils m’ont avoué avoir tous voté avec leur raison.
Leurs votes feront peut-être la différence dans Sherbrooke où Serge Cardin mène une chaude lutte à Jean Charest et dans Crémazie.
Il faut avoir confiance en l’intelligence des gens, qu'elle s'exprime à travers leur cœur ou leur raison.
Qu’est-ce qui est le mieux pour un sympathisant de Québec solidaire ou de l'Option nationale?
Voter avec le cœur et risquer de se retrouver avec un gouvernement caquiste ou libéral minoritaire ou voter avec la raison et se retrouver avec un gouvernement péquiste majoritaire ?
Le même genre de question que se posent beaucoup de libéraux qui s’apprêtent à voter pour la CAQ, surtout dans le 450.
À chacun de choisir.
En ce sens, voter stratégique est un choix légitime, pas un devoir, tout comme voter pour le chef d’un parti dont on est un sympathisant peut devenir une nécessité et même un devoir si l'on souhaite que notre voix soit entendue à l'Assemblée nationale.
Le cœur et la raison!
***
Sur le même sujet :
Un pari risqué
L’incroyable odyssée du Québec vers son indépendance
Les héritiers de l’Option nationale
La fin d’une époque

Featured bccab87671e1000c697715fdbec8a3c0

Louis Lapointe534 articles

  • 890 081

L'auteur a été avocat, chroniqueur, directeur de l'École du Barreau, cadre universitaire, administrateur d'un établissement du réseau de la santé et des services sociaux et administrateur de fondation.





Laissez un commentaire



1 commentaire

  • Archives de Vigile Répondre

    31 août 2012

    « Qu’est-ce qui est le mieux pour un sympathisant de Québec solidaire ou de l’Option nationale ?
    Voter avec le cœur et risquer de se retrouver avec un gouvernement caquiste ou libéral minoritaire ou voter avec la raison et se retrouver avec un gouvernement péquiste majoritaire ? »
    Désolé, Monsieur Lapointe, mais s'il faut en passer par un autre gouvernement libéral (ou caquiste) pour que les Québécois souffrent suffisament afin qu'ils se libèrent de leurs chaînes, alors soit! Je ne suis pas masochiste, seulement je ne voterai pas contre mes valeurs profondes. Que les vrais Québécois se lèvent et affrontent la réalité, et non à travers l'écran de leurs téléphones ou autres dénis de réalité...