Le cinéaste Jacob Tierney soutenait la semaine dernière que le cinéma québécois était replié sur lui-même. À mots couverts, il l'accusait de racisme. Plusieurs lui ont intelligemment répondu en énumérant les films où les anglophones comme les allophones sont bien présents. Ils auraient pourtant dû se contenter de plaider non coupables. Car Tierney ne demandait pas aux Québécois d'ouvrir leur culture aux immigrants - ils le font déjà -, mais de se convertir au multiculturalisme.
D'abord un rappel : le multiculturalisme est l'idéologie dominante dans les sociétés occidentales. Cette idéologie culpabilisante les amène à donner systématiquement raison à ceux qui les accusent « d'exclusion ». Pour le multiculturalisme, toutes les cultures sont égales, sauf celle de la majorité, qu'on doit déconstruire et vilipender. Derrière son culte vertueux de la diversité, le multiculturalisme masque son aversion pour l'identité nationale.
Le multiculturalisme inverse le devoir d'intégration. La maxime allait autrefois de soi : à Rome, fais comme les Romains. Aujourd'hui, la société d'accueil doit s'effacer pour « s'ouvrir à l'autre ». La chose vire souvent au ridicule : en France, récemment, on a contesté l'usage d'Astérix comme symbole d'une association publique. Astérix serait trop... gaulois!
Tierney se désole que la diversité montréalaise ne soit pas la norme du cinéma québécois. Propos révélateur. De ce point de vue, Montréal est le laboratoire d'une nouvelle identité postmoderne où les Québécois francophones ne sont plus qu'une communauté parmi d'autres. C'est désormais à eux de s'intégrer au « nouveau peuple montréalais ». Les Québécois francophones ne se sentent souvent plus chez eux à Montréal : il faudrait y voir un progrès.
Sans surprise, ceux qui ne consentent pas à cette liquidation de l'identité québécoise sont accusés de racisme. On les traite de réactionnaires. On cherche à les marquer du stigmate de l'intolérance pour les chasser du débat public. Le multiculturalisme verse alors dans le fanatisme de la diversité.
Il ne faut plus confondre l'ouverture à l'autre avec le reniement de soi. Les Québécois veulent habiter leur propre culture plutôt que s'en faire chasser.
D'ailleurs, c'est depuis qu'il a revalorisé la culture québécoise, dans ses aspects historiques, pensons à Séraphin, ou dans ses aspects familiers, avec Les Boys, que notre cinéma est devenu un cinéma populaire.
À ceux qui nous prêchent toujours l'ouverture à l'autre, une petite question : à quel moment demandera-t-on à l'autre de s'ouvrir à nous?
Le fanatisme de la diversité
À ceux qui nous prêchent toujours l'ouverture à l'autre, une petite question : à quel moment demandera-t-on à l'autre de s'ouvrir à nous?
Cinéma québécois et anglobalisation
Mathieu Bock-Côté1347 articles
candidat au doctorat en sociologie, UQAM [http://www.bock-cote.net->http://www.bock-cote.net]
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