Les auteurs du premier document consacré spécifiquement à la croissance des PME québécoises sont unanimes : l’État doit faire de ses entrepreneurs des « conquérants », en plus d’exiger une contribution financière de la part des entreprises à forte croissance qui bénéficient de ses programmes.
Le Centre sur la productivité et la prospérité (CPP) de HEC Montréal a rendu publique jeudi une série de publications soulignant l’importance de favoriser la croissance des petites et moyennes entreprises, qui deviennent alors des leviers de développement économique pour la province.
« Les Québécois n’osent pas. Ils n’osent pas sortir de leur région ou aller sur le marché international, se désole pourtant Louis Jacques Filion, coordonnateur du projet et titulaire de la Chaire d’entrepreneuriat Rogers–J.-A.-Bombardier à HEC Montréal. On a beaucoup d’entrepreneurs qui ont de très beaux produits, de belles expertises, mais qui sont trop humbles. Il faut de l’audace, il faut rentrer ça dans notre culture. » Pas moins de 90 % des propriétaires de PME ne sont pas motivés par la croissance de leur entreprise, ajoute-t-il.
Les entreprises à forte croissance, ces « gazelles » qui ont une croissance supérieure à 20 % pendant au moins trois années consécutives, créent quant à elle plus de 75 % des nouveaux emplois dans les pays industrialisés, apprend-on dans la série de sept textes. Il est important de les soutenir, puisqu’elles représentent des « dynamos » dans leur région ou leurs secteurs respectifs, explique M. Filion.
Élargir le soutien
Le professeur a justement eu l’idée de documenter la croissance des PME au Québec lorsque le gouvernement Marois a évoqué pour la première fois son programme des « gazelles », qui avait pour but d’accélérer le développement de 300 PME de 25 à 250 employés pour en faire des « fleurons » de l’économie québécoise. Le gouvernement libéral de Philippe Couillard a toutefois décidé de passer ce programme à la trappe, préférant miser dans son premier budget sur une baisse d’impôt des entreprises manufacturières de 8 % à 4 %, l’injection de 150 millions dans un programme pour soutenir l’innovation et l’instauration d’un guichet unique pour simplifier l’accès aux services destinés aux entreprises.
Les prochaines politiques devraient s’adresser à un plus grand nombre de PME, fait valoir M. Filion. « Il faudrait que les programmes de croissance aient plusieurs paliers, pas uniquement pour les entreprises à forte croissance, parce qu’il y en a d’autres qui veulent croître et qui pourront peut-être éventuellement devenir des gazelles », soutient-il.
Dans une des publications du dossier produit par le CPP, l’économiste Sylvain Melançon, qui a fait carrière au sein du gouvernement québécois, recommande notamment d’« accoler un prix d’entrée au programme des PME à forte croissance ». Ce montant pourrait atteindre jusqu’à 75 000 $, écrit-il, ce qui correspond au montant payé par les entreprises néerlandaises pour participer à leur programme national d’accélération de la croissance.
« On est unanimes à savoir que les entreprises doivent payer pour ces programmes-là, affirme M. Filion. Le rôle de l’État aujourd’hui n’est plus de fournir la ressource financière, mais de fournir la ressource des savoirs. »
De manière plus générale, le professeur émérite de l’Université du Québec à Trois-Rivières, Pierre-André Julien, explique dans sa partie du dossier que pour croître, une entreprise doit être dirigée par des entrepreneurs qui n’ont pas peur des changements, dotée d’une organisation « efficiente » et « décentralisée » et soutenue par un milieu qui lui permet d’échanger et d’innover. En retour, le gouvernement pourra soutenir la forte croissance des PME en ciblant d’abord celles qui connaissent une croissance minimale depuis quelques années, conclut-il.
HEC MONTRÉAL
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