Leadership: Chasser les libéraux. Réussir l’indépendance. Dans cet ordre.

68d632298ebccf1baf7ac2b8a8a61bd8

Et si c'était Lisée ?

Bon lundi,
D’abord, un énorme remerciement à tous ceux et celles qui ont partagé avec moi leurs conseils, leurs témoignages et leur engagement depuis une semaine, sur ce blogue, dans des courriels privés ou dans des rencontres. Vous n’étiez pas tous d’accord sur la bonne marche à suivre, mais vous étiez tous conscients de l’importance de l’enjeu. J’ai été frappé par le sérieux et l’engagement dont vous avez fait preuve. Je ne puis pas vous répondre individuellement, mais sachez que je vous ai tous lus, sans exception.
Ma participation à cette course n’est pas une affaire personnelle ou de carrière ou d’ambition. J’ai indiqué la semaine dernière qu’une seule question me préoccupait: aurais-je quelque chose d’important à proposer, que mes collègues Véronique, Martine et Alex ne proposent pas ? Je les ai écoutés attentivement, toute la semaine, dans leurs déclarations publiques comme dans des conversations privées.
Je n’ai pas reconnu dans leurs propositions de réponse à la mesure de l’enjeu politique central actuel. J’estime qu’il faut donner, dès aujourd’hui, une réponse claire à ce que les commentateurs appellent avec raison: la question qui tue. Que proposerons nous aux Québécois en 2018, exactement, sur la question référendaire? Et comment les conduirons-nous à l’indépendance ?
La position que je présente aujourd’hui et que je défendrai auprès des militants me semble répondre adéquatement à ces interrogations. Donc permettre aux Québécois de sortir du quasi-monopole libéral du pouvoir et offrir aux indépendantistes un tracé clair, concret et mobilisateur vers le succès de notre projet.
Je vous laisse juge et vous invite à vous joindre à ma campagne.
La voici:
Chasser les libéraux. Réussir l’indépendance. Dans cet ordre.
Par Jean-François Lisée, député de Rosemont et candidat à la direction du Parti québécois
Pourquoi voulons-nous l’indépendance pour les Québécois ? Parce que nous aimons à ce point le Québec que nous le voulons libre, ambitieux, épanoui. Et parce que nous aimons le Québec, nous rageons de le voir gouverné par des libéraux qui l’affaiblissent en imposant leur austérité et leur incompétence à nos enfants, à nos soins de santé, à nos régions, à nos sièges sociaux, à notre économie, à notre langue et à notre identité même.
Le Parti québécois a une tâche essentielle : faire l’indépendance du Québec. Quand ? Le plus vite possible. Il a aujourd’hui une tâche immédiate : débarrasser le Québec du gouvernement libéral le plus toxique qu’on ait connu.
Rien ne serait plus réjouissant que d’accomplir ces deux tâches simultanément, dans deux ans, à l’élection d’octobre 2018. Mais rien ne serait pire que de se faire servir par les Québécois, à cette occasion, un nouveau refus. On les sait très majoritairement réfractaires à la tenue d’un référendum (ou de toute démarche vers la souveraineté). Tenter de forcer ce blocus, c’est pousser encore une fois suffisamment d’électeurs dans les bras des libéraux pour leur assurer une autre victoire. Et leur donner quatre années supplémentaires pour affaiblir les ressorts de la nation.
Les sages leçons de Monsieur
Mon ancien patron, le très regretté Jacques Parizeau, ne s’est pas gêné pour nous répéter de bien suivre sa recette quasi gagnante d’octobre 1995.
En juin 2005, il affirmait :
«On détermine une date de référendum quand on est prêt. Actuellement, ils [le PQ] ne le sont pas. Il va bien falloir un moment donné qu’ils se préparent. Pourquoi, quand j’ai pris le pouvoir en 1994, ai-je dit pendant la campagne électorale: ‘si vous m’élisez, il y aura un référendum sur la souveraineté dans les huit ou dix mois?’ Parce que ça faisait quatre ans qu’on se préparait.»
En juin 2009, il répétait :
«Quand est-ce qu’on fait un référendum? Quand on est prêt, après l’avoir préparé depuis longtemps. »
Et que disait-il en 2012 ?
« On n’a pas fait Rome en un jour et on ne construit pas un pays en un jour. Il faut réfléchir, planifier, préparer. Et quand on est prêt on y va ».
« Ça prend des années de préparation. Si on veut que les choses aboutissent, il faut commencer longtemps d’avance. »
Le (ou la) chef que choisiront les membres du PQ cet automne n’aura que 24 mois avant l’élection de 2018. Crois-t-on que n’importe quel des candidats en lice pourrait réaliser en deux ans ce que Jacques Parizeau a mis quatre ans à préparer ? Pas moi.
La réalité toute nue est qu’une partie significative de nos concitoyens, y compris francophones, sont en ce moment allergiques, non seulement au mot référendum, mais à toute proposition qui les entraînerait vers un tel rendez-vous. Même ceux qui affirment, en principe, être favorables à l’idée de souveraineté sont majoritairement opposés à ce qu’on retente l’expérience, tant la dernière défaite fut douloureuse. Imaginer que les 38% de gens qui disent aux sondeurs favoriser la souveraineté seraient prêts, demain, à nous donner un mandat de gouvernement pour reposer cette question est, à mon avis, mal juger la profondeur de la réticence.
Bref, les Québécois sont plus réfractaires à une tentative de réalisation du projet que lorsque M. Parizeau, dont j’étais le conseiller à ce moment et sur cette question, a fait la grande tentative de 1995. Il m’apparaît illusoire de penser renverser cette tendance en seulement deux ans.
On se doit à nous-mêmes, indépendantistes, de faire ce constat. On doit surtout aux Québécois de leur dire clairement qu’on les écoute et qu’on les entend. C’est le premier pas vers la re-connexion du PQ avec l’électorat.
L’autre réalité est qu’il est impossible de définir et de dégager, en 24 mois, des consensus sur l’ensemble des questions relatives au projet d’indépendance et de faire largement connaître ces consensus. D’autant que, cette fois-ci, il faut le faire avec un mouvement souverainiste beaucoup plus diversifié qu’en 1995, dans les travaux de la convergence.
Une proposition réaliste et volontariste
Pour sortir de cette impasse, il faut distinguer clairement notre tâche essentielle (réussir l’indépendance) de notre tâche immédiate (libérer le Québec des libéraux).
Si au vote de cet automne, les membres du Parti québécois (et ceux qui auront acheté leur carte d’ici là, à peine 5$ sur www.pq.org) me choisissent, alors dès ce moment il sera clair pour tous qu’un gouvernement du Parti québécois élu en octobre 2018 ne tiendra pas de référendum, n’enclenchera aucune démarche souverainiste de gouvernement, ne dépensera pas un sou de fond public pour son option pendant ce mandat. Cet engagement doit être en fer forgé. La porte fermée à double tour.
Nous présenterons aux femmes et aux hommes du Québec en 2018 la proposition d’un gouvernement national progressiste, écologiste, intègre, efficace, soucieux de faire progresser notre identité et la laïcité de nos institutions, rétablissant l’éducation au rang de priorité, redynamisant l’économie des entrepreneurs, privés et sociaux, en métropole et en régions, intégrant à nouveau la société civile dans la décision collective et cent choses encore.
Voilà pour la tâche immédiate. Il faudra s’y préparer dès cet automne.
Et la tâche essentielle ? Il faudra s’y atteler, aussi, dès cet automne. Six ans nous séparent de l’échéance électorale suivante, d’octobre 2022. C’est beaucoup et c’est peu. C’est un an de moins que le temps qu’il a fallu à Jacques Parizeau entre son accession à la direction du parti en mars 1988 et son arrivée à un millimètre de l’indépendance en novembre 1995.
À notre tour de consacrer les six années qui nous sont offertes à la campagne la plus méthodique de préparation et de diffusion de l’indépendance qu’on ait connue depuis la fondation de notre mouvement.
Nous avons la mauvaise habitude de nous parler d’indépendance entre nous, les indépendantistes. Notre principal défi est d’en parler à tous les Québécois, de façon intéressante, continue, convaincante.
J’ai publié, lors de ma précédente candidature, une proposition de 15 mesures pour y arriver, portant la signature de 50 membres de la relève indépendantiste. Ces mesures seraient entièrement financées par les militants, les citoyens, sans aide de l’État. J’en reprends quelques-unes ici.
L’outil le plus souple et le moins couteux pour rejoindre un grand nombre d’électeurs est la radio. Chef, je ferais en sorte d’utiliser systématiquement les éléments d’actualité où le Québec n’est pas libre d’agir pour illustrer, dans des campagnes radio, en quoi l’indépendance nous donnerait ce bien le plus précieux : la liberté de choix.
Je créerais pour les réseaux sociaux une unité permanente indépendantiste : une communauté virtuelle qui susciterait, validerait et répercuterait les créations, vidéos, illustrations, textes sur le Web.
Je décuplerais l’action d’animation et de dialogue avec les jeunes québécois de toutes origines et je renforcerait le rôle et la place des jeunes, et de la diversité, dans nos instances.
Nous ne manquons pas d’aînés indépendantistes. On doit faire en sorte qu’ils parlent aux aînés non-indépendantistes. J’entrevois un travail systématique d’équipes de bénévoles qui se relaient pour parcourir le Québec à la rencontre de nos aînés.
Chaque été, la Souveraine tournée sillonnerait le Québec, offrant en spectacle chanteurs et artistes indépendantistes pour créer des moments d’animation, de dialogue et de recrutement.
Ce programme fourni d’animation doit se mettre en branle dans l’année qui vient, s’enrichir et se déployer jusqu’à l’échéance de 2022. Et bien sûr au-delà, jusqu’au rendez-vous référendaire qui suivra.
Mais avec quel contenu ?
Pierre Karl a mis sur pied un Institut qui doit nourrir notre réflexion sur plusieurs aspects de notre projet. Nous devons nous appuyer sur ces travaux et convenir, dans le processus de convergence, d’un calendrier qui nous conduira, dans ces six ans, à l’élaboration d’une proposition complète et détaillée de notre projet commun, sur le modèle de nos amis écossais.
L’objectif vers lequel nous devons tendre nos forces, c’est celui de présenter aux Québécois, en octobre 2022, une proposition indépendantiste réfléchie, sérieuse, complète et crédible. Celle d’un Québec entreprenant et généreux, souverainement branché sur le monde et sur ses voisins américains. Un Québec libéré de ses entraves, donc enfin capable de déployer la totalité de son potentiel créatif et innovant.
En octobre 2022, nous présenterons ce projet à des Québécois avec lesquels nous auront parlé d’indépendance pendant les six années précédentes. À des Québécois que nous aurons accompagnés, en toute transparence, vers ce rendez-vous.
Nous leur demanderons, là, le mandat de franchir le grand pas. Parce que, nous, indépendantistes, nous aurons pris les moyens d’être prêts, comme nous l’a enseigné Jacques Parizeau. Et parce que, dans l’intervalle, nous nous serons libérés des libéraux et aurons redonné sa santé et son élan à notre État.

Squared

Jean-François Lisée297 articles

  • 182 853

Ministre des relations internationales, de la francophonie et du commerce extérieur.

Il fut pendant 5 ans conseiller des premiers ministres québécois Jacques Parizeau et Lucien Bouchard et un des architectes de la stratégie référendaire qui mena le Québec à moins de 1% de la souveraineté en 1995. Il a écrit plusieurs livres sur la politique québécoise, dont Le Tricheur, sur Robert Bourassa et Dans l’œil de l’aigle, sur la politique américaine face au mouvement indépendantiste, qui lui valut la plus haute distinction littéraire canadienne. En 2000, il publiait Sortie de secours – comment échapper au déclin du Québec qui provoqua un important débat sur la situation et l’avenir politique du Québec. Pendant près de 20 ans il fut journaliste, correspondant à Paris et à Washington pour des médias québécois et français.





Laissez un commentaire



Aucun commentaire trouvé