Plusieurs semaines après les États-Unis et l'Union européenne, Ottawa a finalement annoncé cette semaine le rétablissement de son aide financière à l'Autorité palestinienne (AP) du nouveau gouvernement du président Mahmoud Abbas. Le délai est d'autant plus parlant qu'en mars 2006, le Canada fut le premier pays, après Israël, à couper les ponts avec l'AP en déni de l'élection-surprise du Hamas, considérée comme une organisation terroriste, aux législatives palestiniennes. Entre lenteurs et célérité, les préoccupations qu'affichait donc lundi le ministre des Affaires étrangères, Peter MacKay, pour le sort des 3,5 millions de Palestiniens en Cisjordanie et à Gaza sonnaient bien creux.
Depuis son arrivée minoritaire au pouvoir, le premier ministre Stephen Harper a fait preuve d'un suivisme empressé au sujet du lourd conflit israélo-arabe, mis en exergue pendant la guerre du Liban de l'été dernier par un alignement pro-israélien sans égards pour l'explosive complexité des enjeux. Il ne se comporte pas différemment devant le violent conflit interne qui déchire aujourd'hui la société palestinienne, ayant fait sien l'objectif des États-Unis et d'Israël de chasser du pouvoir le Hamas, aujourd'hui confiné à la bande de Gaza. D'un pur point de vue canadien, cette adhésion rompt avec une politique étrangère fondée sur le dialogue et l'apaisement.
M. MacKay a raison de dire que la résolution de la question palestinienne passe par la création d'un État démocratique, laïque et modéré. Mais encore? C'est aussi ce que souhaitent la majorité des Palestiniens, qui ont élu le Hamas en janvier 2006, moins pour accréditer son projet de société islamiste que pour punir le vieux Fatah pour ses échecs et sa corruption. Dans les circonstances, l'horizon de ce projet laïque et modéré demeure très incertain. D'autant que, dans l'immédiat, la bande de Gaza, plongée dans une crise humanitaire dont l'Occident détourne largement le regard, risque surtout de voir le Hamas, financé par l'Iran, se radicaliser encore davantage dans son opposition armée à Israël.
L'engagement d'Ottawa en faveur du gouvernement Abbas, qui recevra une aide initiale de huit millions de dollars, serait plus prometteur s'il ne faisait l'impasse sur l'expansion continue des colonies juives de peuplement en Cisjordanie, une expansion qui se trouve sur le terrain à rendre de moins en moins plausible la création d'un État palestinien viable.
Le rétablissement de l'aide internationale à l'intention du gouvernement Abbas se produit, du reste, sur fond de nouveaux mouvements diplomatiques. Où mèneront-ils? Fait exceptionnel, les ministres des Affaires étrangères de la Jordanie et de l'Égypte ont rencontré hier à Jérusalem leur homologue israélien pour discuter d'un plan de paix d'initiative saoudienne, en vertu duquel les pays arabes normaliseraient leurs relations avec Israël en échange d'un retrait israélien des territoires palestiniens occupés depuis la guerre de 1967. Il y a, de ce côté, un espoir ténu qui ne tient peut-être pas du rafistolage et de la procrastination.
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