J’amorce cette chronique avec l’une des leçons de politique les plus fondamentales que nous ait laissées le regretté Jean Lapierre. J’entends encore sa voix répéter cette expression lourde de sens :
« En politique, vaut mieux être craint et respecté qu’aimé et abusé. »
Justin Trudeau est aimé dans son caucus. Pendant la quasi-totalité de son mandat, cela fut suffisant. Bons sondages, élan de début de mandat, grands espoirs de changer le Canada, les députés libéraux marchaient sourire aux lèvres derrière leur populaire leader.
C’est maintenant chose du passé. La saga SNC-Lavalin nous fait voir l’image d’un caucus où chacun veut avoir le dernier mot, chacun soigne sa propre image. Un caucus où plusieurs ont perdu toute discipline de groupe et tout respect envers le chef.
Madame Philpott
La sortie de Jane Philpott dépasse toutes les bornes. Dans une longue entrevue au magazine Maclean’s, elle donne raison aux conservateurs sur à peu près tous les points. La lumière n’est pas faite sur les agissements de Justin Trudeau et son entourage, et madame Wilson-Raybould devrait revenir au Comité de la justice. Et vlan pour son parti !
Elle reconnaît avoir hésité à accorder un tel entretien au journaliste, puisque cela pourrait être perçu comme une attaque nuisible au parti. Fine analyse ! Soyons sérieux un instant : lorsque vous acceptez de tenir de tels propos à un journaliste, vous sabotez votre propre équipe. Vous crevez un pneu à votre bolide juste avant la grande course électorale.
Je reviens à la phrase de Jean Lapierre. Justin Trudeau est aimé... et de plus en plus abusé dans ses propres rangs. Personne n’a peur de lui. Au fond, on ne le respecte pas comme leader avec la petite part de crainte qui doit venir avec. Il est en train de payer un prix important pour ce qui s’apparente à de la faiblesse.
Je ne parle pas d’être un tyran. Les tyrans s’avèrent de très mauvais leaders dans le monde de 2019, où les gens n’acceptent plus d’être menés à coups de pied au derrière. Cependant, les calinours non plus ne sont pas de bons leaders. Inspirer un sentiment mélangé de respect et de crainte est normal lorsqu’on est un leader qui veut diriger un pays.
Leadership
La comédie a assez duré autour de Justin Trudeau. Le moment est venu pour lui de mettre un pied à terre. Qui m’aime me suive ! Que ceux qui veulent jouer l’opposition au PLC aillent grossir les rangs d’un autre parti s’ils préfèrent ! Autant pour la dynamique interne de son équipe que pour son image dans le grand public, il ne peut plus laisser des empoisonneurs bousiller son action de l’intérieur.
Les derniers événements ont montré des faiblesses immenses dans la personnalité de monsieur Trudeau comme premier ministre et des failles dans le sérieux de son gouvernement. Son beau sourire est devenu un rire nerveux dans la crise.
Il doit retourner cette crise à son avantage : en profiter pour devenir un chef !