La réplique › Ressources naturelles

Prendre le train en retard...

Non, la précipitation n'est pas la bonne stratégie!

PLAN NORD - gérer nos richesses naturelles


La route 167, qui doit être prolongée dans le cadre du Plan Nord pour devenir «une nouvelle porte d’entrée pour accéder aux ressources du Nord québécois», selon Québec.

Le dernier budget Bachand nous donne la mesure d'un gouvernement qui, sous la pression populaire, agit toujours trop tard, et de façon incomplète. Ainsi le gouvernement Charest annonce-t-il (enfin!) que l'État doit rebâtir son expertise en matière de développement des ressources naturelles. Pour ce faire, il crée Ressources Québec — sans regrouper sous le même chapeau la Société du Plan Nord et le Fonds Plan Nord —, après avoir en pratique détruit les instruments d'État, où logeait cette expertise (REXFOR, SOQUEM, SOQUIP, division gaz et pétrole d'Hydro-Québec), et laissé aller leurs actifs au privé pour des miettes. Dans la foulée, il propose une nouvelle série de mesures qui, individuellement, vont dans le bon sens, mais dont le tout manque de cohérence.
Vision parcellaire
Pour preuve, voici une liste non exhaustive de cette vision parcellaire:
On prétend sans gêne, en invoquant les experts, que nous devons nous presser à exploiter nos ressources, mais, en même temps, à travers de savants calculs, on confirme que les prix devraient demeurer élevés par rapport au niveau historique. Non, la précipitation n'est pas la bonne stratégie!
On nous annonce, seulement pour le secteur des mines, 33 milliards de dollars d'investissements sur 25 ans, dont 11 milliards pour les cinq prochaines années. Mais Ressources Québec n'aura de disponibilité, pour investir directement ou par l'intermédiaire du Fonds Capital mines et hydrocarbures, qu'un milliard de dollars, histoire d'être prudent. Les multinationales, qui, c'est bien connu, aiment perdre de l'argent, feront, quant à elles, le gros des profits.
On nous indique que ces nouvelles sommes souscrites par l'État pour prendre des participations dans les entreprises exploitantes seront gérées sans qu'aucune directive rigoureuse ne soit donnée à Ressources Québec sur les filières à privilégier permettant, notamment, une transformation optimale au Québec ou la création d'un Québec inc. des ressources naturelles. Non, il faut que, à la suite d'une analyse appropriée, le gouvernement indique avec force les options qui comportent le maximum de retombées au Québec.
Trop peu trop tard
On cherche à nous convaincre que les redevances sont à un niveau maximum sur les mines — compétition des autres provinces oblige — et que l'on doit limiter nos espoirs de recevoir, pas avant 2016-2017, au maximum 415 millions, mais on inscrit un passif de 3,2 milliards au seul chapitre de la restauration des sites contaminés et abandonnés. Non, huit ans sans revenus réels pour la collectivité, juste des montants pour corriger le passé, c'est trop peu!
On s'ouvre aux suggestions de M. Jacques Parizeau de monnayer les investissements de l'État en infrastructures, tarifs d'électricité avantageux, crédits d'impôt additionnels contre une participation dans l'actionnariat des entreprises bénéficiaires. Mais, simultanément, après avoir vendu sans raison valable le contrôle de Gaz Métro à des intérêts non québécois, on offre de payer 75 % des 40 premiers millions de dollars d'une étude de faisabilité pour amener le gaz naturel sur la Côte-Nord. Et, comme si ce n'était pas encore assez, on ajoute que le gouvernement compensera Gaz Métro pour les volumes manquants pour rentabiliser l'investissement.
J'étais aux premières loges lorsque le gouvernement du Québec, par l'intermédiaire de la Caisse de dépôt et placement du Québec et de SOQUIP, a acheté de Conrad Black le contrôle de Gaz Métro permettant de développer le réseau de distribution jusqu'à Québec. Et maintenant qu'il serait logique de le rendre à Sept-Îles, il faudrait le repayer! Non, redonnez-nous le contrôle si vous ne voulez pas courir de risques.
Quelques cachettes inquiétantes
On nous affirme que l'on va négocier une option de prise de participation dans les projets où un soutien gouvernemental est demandé. Bravo. Mais sur quelle base de négociation? Selon M. Bachand, cela doit se faire sur la base de gré à gré. Pourtant, pour la plupart des entreprises étrangères exploitantes, elles auront eu accès à nos ressources pour des coûts de permis insignifiants. Non, ce qu'elles doivent savoir, c'est que, pour celles qui sont encore à l'étape de l'exploration, nous interviendrons dans leur capital sur la base du coût des dépenses effectivement engagées en soustrayant tous les montants qu'elles auront obtenus en aide gouvernementale. Pour les autres, qui sont déjà rendus à l'étape de l'exploitation, oui, pour le gré à gré, mais en tenant compte des aides gouvernementales de toutes sortes obtenues.
On nous projette de minuscules mesures incitatives pour stimuler la transformation du minerai et des produits forestiers. Non, nous devons avoir une politique plus proactive. Et pourquoi, dans certains cas, ne pas faire des conditions préalables à la délivrance de permis?
Autre cachette dangereuse, après que le gouvernement Charest eut cédé les droits d'exploration à l'île d'Anticosti que détenait H.-Q. Pétrole et Gaz au privé (à un prix aussi caché), on nous annonce que le gouvernement évalue la nécessité de mettre en place une mesure incitative particulière pour favoriser la production d'hydrocarbures sur ce territoire. Non, marchandons notre aide, et ce, au gros prix, s'il vous plaît.
On nous présente un nouveau régime pour l'émission des permis visant les hydrocarbures (mise à l'enchère). Formidable! Hélas, une bonne partie du territoire est déjà alloué et, pour ces entreprises ayant déjà leur permis, que l'on pourrait qualifier de chanceuses, l'augmentation du prix des permis est minime. Non, nous souhaitons qu'à l'avenir l'État conserve 50 % des droits sur ces nouveaux permis et que, pour ceux qui sont déjà délivrés, on ajuste le prix des permis en fonction des prix qui seront payés dans les mises à l'enchère.
Où sont ces dépenses?
Nous cherchons aussi, sans trouver dans ce budget, hormis des mots, l'annonce de mesures substantielles pour assurer que tous les projets seront faits conformément aux principes du développement durable et d'autres qui permettraient une reconversion des régions visées après la fin de l'exploitation de ces ressources.
Enfin, en ce qui concerne la mise à jour du suivi annuel des revenus et des dépenses projetés pour les cinq prochaines années que l'État anticipe du Plan Nord, comme par miracle, le tout fait un léger profit (15 millions), sauf que, pour ce faire, Hydro-Québec doit contribuer aux revenus pour 50 millions.
Mais où sont comptabilisées les dépenses suivantes:
les 30 millions pour payer l'étude de faisabilité de Gaz Métro?
les 10 millions pour les études d'H.-Q. pour planifier d'amener l'électricité de la Grande jusqu'à Nunavik?
le montant qu'investira la Caisse de dépôt et placement du Québec en partenariat avec le CN pour évaluer la faisabilité d'une liaison ferroviaire entre Sept-Îles et la fosse du Labrador?
les 70,3 millions à la disposition du ministère des Affaires municipales pour soutenir les infrastructures municipales qui ne pourraient voir le jour autrement?

Le budget Bachand fait, en effet, bouger le gouvernement dans la bonne direction. Toutefois, c'était trop lui demander de convaincre son premier ministre qu'une vision cohérente du développement des ressources appartenant à la collectivité était également urgente.
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Renaud Lapierre, président de Viridis environnement et ex-sous-ministre adjoint au ministère des Ressources naturelles
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Le déclencheur › Nos projets miniers
Dans le discours du budget 2012-2013 prononcé à Québec le 20 mars 2012, le ministre des Finances, Raymond Bachand, déclarait:
«Les Québécois veulent retirer leur juste part de leurs ressources naturelles: en conséquence, nous allons prendre des participations dans les projets miniers prometteurs. J'annonce la création de Ressources Québec, une nouvelle filiale d'Investissement Québec spécialisée dans les mines et les hydrocarbures. SOQUEM et SOQUIP deviennent des filiales de Ressources Québec. Cette dernière dispose d'emblée d'une expertise d'investissement dans ces domaines et d'un portefeuille de plus de 235 millions. En plus d'investir pour son propre compte, Ressources Québec conseillera le gouvernement dans la gestion d'un nouveau fonds.»


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