Festival d’été de Québec et culture anglo-américaine
Québec doit revoir ses pratiques de subventions et de commandites
Festival d’été de Québec
«La langue française est un des fondements de l'identité culturelle et la langue française caractérise tout particulièrement la spécificité culturelle du Québec en Amérique». La politique culturelle du Québec. Notre culture, notre avenir, 1992. Préface de Robert Bourassa.
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Le 27 avril dernier, le Festival d'été de Québec (FEQ) rendait publique sa programmation pour l'année 2010. Comme c'est la tendance depuis quelques années, les prestations à saveur anglo-américaine, souvent de type «métal» (Rammstein, Iron Maiden, Arcade Fire, Santana, Rush, Black Eyed Peas, Billy Talent) sont à l'avant-scène et vont solliciter la plus importante partie du budget. Comme le note Valérie Lesage dans Le Soleil du 28 avril, «on est obligé de constater qu'il y aura encore moins de soirées en français que l'an dernier».
L'approche privilégiée par le FEQ ne concorde vraisemblablement plus avec l'orientation fondamentale de la politique culturelle énoncée en 1992 par le gouvernement du Québec, soit de valoriser «la langue française comme moyen d'expression de la culture» et comme «fondement de l'identité culturelle du Québec». L'objectif du Festival de Québec n'est plus de diffuser la culture du Québec et la culture francophone. Ce que l'on recherche, au dire des porte-parole du festival, et ce qui constitue visiblement le principal critère de sélection des artistes de renom, c'est de «remplir les Plaines».
Face à un tel état de choses, que faire? Il n'est bien sûr pas opportun, ni légitime de vouloir réglementer la programmation des festivals d'été. Amener ici des groupes rock américains ou autres relève de la stricte liberté d'initiative et des droits des promoteurs, et rien ne saurait justifier une intervention gouvernementale en ce domaine. Toutefois, c'est une tout autre chose que de financer ces initiatives et de les commanditer avec des fonds publics qui doivent normalement être dédiés au soutien et à la promotion de la culture d'ici. Pour le festival d'été 2010, le gouvernement du Québec est plus qu'un «partenaire majeur». Avec les nombreuses commandites du secteur public (Hydro-Québec, Loto-Québec, SAQ, Caisse de dépôt et placement, Musée national des beaux-arts, CLD), le soutien gouvernemental est essentiel à la tenue de ce festival. L'organisation du FEQ ne rend pas public le montant total de la subvention du Québec et des commandites en provenance du secteur public, ce qui permettrait d'en apprécier véritablement l'ampleur.
Nous ne pouvons, comme collectivité minoritaire en Amérique et dans un contexte où la langue française n'est peut-être plus un acquis d'une pérennité indiscutable, prendre ce phénomène à la légère. Le Festival d'été de Québec a été créé en 1968 par de jeunes artistes et un groupe de gens d'affaires qui voulaient animer les places publiques et promouvoir les arts populaires. Dès l'année suivante, il présentait de grandes vedettes québécoises et, encore en 2002, il «remplissait les Plaines» avec Robert Charlebois, Diane Dufresne, Claude Dubois, Pierre Flynn et Daniel Boucher qui attiraient «l'une des plus grandes foules jamais accueillies par le Festival».
Force est de constater que le Festival d'été de Québec a changé, ce qui est son droit, mais cette évolution impose maintenant une réévaluation des subventions et des commandites qu'il reçoit du gouvernement du Québec et de ses sociétés d'État. De façon plus générale, des paramètres nouveaux doivent être établis par Québec afin d'assurer une réelle concordance avec la politique en vigueur, laquelle déclare expressément que « le gouvernement entend favoriser des actions visant à valoriser les produits culturels de langue française auprès de toute la population, en particulier, auprès des jeunes ».
Signataires :
Raoul Duguay, Yann Perreau, Monique Miville-Deschênes, Edgar Bori, artistes, auteurs compositeurs, interprètes.
Sylvie Chaput, écrivaine, traductrice, co-fondatrice de la revue Nuit Blanche.
Denis Vaugeois, Michel Lessard, Gaston Deschênes, Martin Pâquet, historiens.
Louis O'Neill, Matthias Rioux, Claude Morin, ex-ministres, gouvernement du Québec.
Pierre Boucher, ex-président, Commission de la Capitale nationale.
Gérald Larose, ex-président, Commission sur l'avenir de la langue française.
Jacques Lemieux, géographe, historien, professeur en tourisme.
Daniel Lachance, consultant (tourisme).
Robert Laplante, éditeur, directeur de l'Action nationale.
Pierre-Paul Sénéchal, politicologue, ex-cadre gouvernement du Québec,
Louis Duclos, ex-membre de la Chambre des Communes
André Marceau, juge à la retraite.
Diane Saint-Pierre, professeur, INRS.
Pierre Morisset, biologiste, professeur titulaire, Université Laval.
Jocelyne Mathieu, ethnologue, Université laval.
Gaston Bernier, ex- directeur, Bibliothèque de l'Assemblée nationale.
Yvon Leclerc, historien, ex-directeur de cabinet du ministre Camille Laurin,
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