Isabelle Porter Québec — S'il trouve ses racines dans l'Action démocratique du Québec (ADQ), le Réseau Liberté-Québec, qui tient aujourd'hui son premier événement, paraît plus à droite, plus idéologue et plus proche du Canada anglais que l'ancien parti de Mario Dumont.
«Pour l'instant, ils semblent aller plus loin que la droite québécoise que l'on connaît», affirme Frédéric Boily un expert de la droite basé à l'Université de l'Alberta.
En fait foi, dit-il, la participation à leur événement du chroniqueur Ezra Levant, qui est associé à un courant «très dur» de la droite canadienne. Le RLQ, ajoute M. Boily, cherche à se donner une crédibilité intellectuelle comme l'a fait dans l'ouest le mouvement conservateur avec la création du Manning Center for Building Democracy, un think tank de droite.
«Le reproche qu'on a souvent fait à l'ADQ de Mario Dumont est qu'il n'avait pas assez d'armature intellectuelle. Tout tournait autour du chef, son équipe était faible et ses idées, mal articulées.»
Une hypothèse confirmée par les propos d'un des fondateurs du RLQ, Roy Eappen, qui, dans une entrevue au magazine Maclean's, a affirmé que le RLQ était «similaire au Manning Center».
Au moins trois des six cofondateurs du RLQ sont des figures bien connues de l'ADQ: l'ancien conseiller de Dumont et chroniqueur Éric Duhaime, la réalisatrice du documentaire L'Illusion tranquille, Joanne Marcotte et Ian Sénéchal, un ancien candidat du parti.
Parmi les autres, on retrouve aussi le Dr Roy Eappen, un médecin de Montréal qui intervient souvent dans les médias anglophones. En visitant son blogue (http://torydrroy.blogspot.com), on a pu apprendre que M. Eappen en a contre les «stalinistes» de l'environnement et est très attaché à la reine d'Angleterre ainsi qu'à Conrad Black. Le National Post (qui a été fondé par M. Black) a par ailleurs la faveur du RLQ puisque deux de ses invités y travaillent, Adam Daifallah et Tasha Kheiriddin.
Lorsqu'on lui demande si la droite québécoise a besoin de la droite canadienne pour se définir, Éric Duhaime rétorque que «c'est important pour le Canada anglais d'avoir un son de cloche de ce qui se passe au Québec» et que le Québec sache «ce qui se fait de bien» au Canada anglais.
(L’ancien ministre péquiste Jacques Brassard sera du premier événement de Réseau Liberté-Québec aujourd’hui.)
Pour brasser des idées, le RLQ a également convié le conservateur Maxime Bernier, ainsi que l'ancien ministre péquiste Jacques Brassard, qui conteste l'existence du réchauffement climatique.
D'après M. Duhaime, les ex-péquistes François Legault et Joseph Facal, qui jonglent avec l'idée de fonder un nouveau parti de droite, ont tous les deux été invités à participer à l'événement d'aujourd'hui mais ont refusé de venir.
Un refus peu étonnant selon Frédéric Boily en raison de la présence de personnalités controversées, comme l'animateur de radio Jeff Fillion notamment. «Ils ont probablement l'impression qu'il y a un risque de dérapages», dit-il.
Éric Duhaime, qui dînait justement avec Jeff Fillion le jour de notre entretien, a déjà écrit dans Le Journal de Montréal qu'il fallait réhabiliter M. Fillion parce qu'il était le meilleur animateur de sa génération. M. Fillion doit d'ailleurs participer à la journée de demain, tout comme l'animateur de CHOI-FM Dominic Maurais et l'animatrice du Saguenay Myriam Ségal. Une autre figure bien connue de la radio de droite à Québec, Sylvain Bouchard, a aussi été invité, mais aurait décidé de ne pas venir.
Éric Duhaime n'est pas peu fier du succès de son événement, qui affiche complet depuis plusieurs jours. D'après lui, la plupart des participants ont entre 30 et 35 ans, sont des gens branchés et actifs sur les réseaux sociaux, 95 % des inscriptions ayant été effectuées par Internet. On estime enfin à 25 % les gens venant de l'extérieur de Québec.
Pour lui, l'heure est grave. «Il faut que les gens assument leurs convictions. Au Québec, ça fait 50 ans que la droite est traitée comme une maladie honteuse. Il faut que ça arrête!»
De son expérience à l'ADQ, il a retenu que les partis politiques sont limités. À titre d'exemple, dit-il, aucun parti politique ne peut dénoncer publiquement une subvention à une entreprise sans compromettre l'avenir du député ou du candidat de la région concernée. Aucun parti n'a osé critiquer le contrat donné à Bombardier, qui était une véritable subvention déguisée. Selon lui, c'est à l'extérieur des partis politiques qu'on peut «peut-être changer les choses». «Je vais là parce que je veux que mes idées avancent.»
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