«Super-ministre», «super-citoyen» et… trou de cul!

Tribune libre

Au Québec, à notre insu, nous sommes en train de revenir en monarchie ou en théocratie! «Le roé c’est moé», disait Louis XIV et tout le monde se prosternait sans se poser de question. Ainsi naissent aussi les papes blancs comme neige.


Mais qui donc a inventé ce nouveau titre de «super-ministre» en parlant de celui qui vient de nous faire ses adieux précipitamment parce qu’il aurait fait le tour du jardin, nous a-t-il dit, et qu’il voulait passer à autre chose, ou parce que son service militaire auprès du général Legault était terminé, parce que le premier ministre, François (Ier), lui aurait montré la sortie maintenant, ni avant, ni après! Bizarre de politicien; pas super pour autant. Encore une fois, les médias nous présentent un spectacle de langues de bois : la vérité n’en demeure que plus opaque.


Est-ce le 4e pouvoir qui a baptisé ainsi ces personnes de «super»? Est-ce le gouvernement actuel de la CAQ? Retrouvons-nous ce jargon auprès de nos voisins, c’est-à-dire des super-politiciens plus fins que les autres, plus haut que le premier ministre lui-même? Avec des responsabilités «super» et supérieures? Des postes qui réclament des «super-citoyens» avec de super dons afin de rendre des services supérieurs à la population? 


Que devient alors le premier ministre face à ces «super-ministres»? Devient-il justement un Roi, espèce de pape de nation en mal d’identité? C’est ainsi que la monarchie et la théocratie se créent dans l’imaginaire des citoyens qui, peu à peu, redécouvrent leur condition de vie ordinaire et qui n’ont rien à dire.


Qu’en pensent donc nos ministres de l’Éducation ou de la Santé?


Pour certains, le danger de développer un sentiment de supériorité du simple fait d’assumer des responsabilités d’élu par le peuple devient très possible. Nous, citoyens sans titre, nous risquons alors d’être perçus comme des moins que rien. Nous sommes pourtant à la fois l’économie et la nation!  


Quand on souffre d’un sentiment de supériorité, on fait savoir aux autres qu’ils n’ont pas une grande valeur personnelle. Hélas, nous oublions trop vite que nul n’est irremplaçable : il y a des décennies que Duplessis a trépassé.


De grâce, cesser de nous soumettre à ces superlatifs édifiants inutiles, nous citoyens exploités, contribuables, suffisamment dominés par nos élus, qui font un travail admirable, mais dangereusement exposé à l’épuisement mental.


«La démocratie se distingue… des monarchies absolues dirigées par un roi de droit divin… Au sein d’une démocratie, théoriquement du moins, tous les citoyens sont égaux en droits, tous les habitants égaux en dignité. … Ce que les anciens Grecs appelaient hubris, ou démesure, était considéré comme la pire faille de l’action humaine : une volonté ivre d’elle-même, un orgueil. Son contraire était estimé comme la vertu politique par excellence : la modération, la tempérance.»  

«Les ennemis intimes de la démocratie», 

Tzvetan Todorov, 2012, pages 15 et 18.


Peut-on penser que la démocratie est de plus en plus vulnérable ici même au Québec et que c’est nous-mêmes qui la fragilisons?



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