L'état du nationalisme québécois

Une certaine analyse néfaste de Bock-Côté (1/2)

F17d479ed8e5c376f7761d9a6adc8573

Tribune libre

1. Un certain fatalisme néfaste


Je veux m’inscrire un peu beaucoup en faux contre le raisonnement ou l’analyse de Mathieu Bock-Côté sur l’état du nationalisme québécois. Il croit trop selon moi que la population québécoise est maintenant plutôt désintéressée de l’indépendance, en se basant entre autres sur le fait qu’elle va sans doute élire la C.A.Q. et jeter du même coup à terre le P.Q.  Lui et d’autres commentateurs considèrent que le Québec sortira alors d’un « cycle historique », qui était marqué par l’omniprésence de la question de la souveraineté.


Voici quelques citations de Bock-Côté pour illustrer ce que je considère être une sorte de « fatalisme néfaste ». 


« Cette disparition de la question nationale [dans les présentes élections] n’a rien d’un détail.  C’est comme si les Québécois devenaient indifférents à leur destin comme peuple. (Le rêve d’une nation, l’échec d’un génération, le Journal de Montréal, 24 juillet 2018) » 


« Les Québécois, globalement, ne se perçoivent plus comme les membres d’un peuple en attente d’un nouveau cadre politique […].  D’ailleurs, on peut croire que la vieille tentation de la mort qui n’a jamais cessé de les hanter est remontée à la surface […]. »


« […] les Québécois […] ont abandonné la question nationale en même temps qu’ils ont abandonné la souveraineté […]. (Situation de la question nationale, le Journal de Montréal, 6 août 2018) »


 


«  […] les Québécois ne se posent plus la question de la souveraineté. (Une élection historique?, le Journal de Montréal, 23 août 2018) »  «  […] dans les années à venir, le nationalisme québécois se découplera de plus en plus de l’idée d’indépendance. (La contradiction des nationalistes non-souverainistes, le Journal de Montréal, 1er août 2018) » 


 


2. Le peuple et le P.Q.


Le peuple vote tout naturellement et spontanément avec ses tripes.  S’il ne veut plus rien savoir du P.Q., c’est qu’il est écoeuré de se faire « fourrer » par lui depuis 1995.  Il préfère même encore voter pour des « crosseurs » fédéralistes que tout le monde sait tels, lire évidemment le P.L.Q., que pour des « crosseurs » péquistes hypocrites qui se disent nationalistes et qui parlent ou radotent sur l’indépendance depuis plus de vingt ans sans de toute évidence vouloir faire quoi que ce soit pour qu’elle se concrétise.  C’est exactement ainsi que le peuple voit Jean-François Lisée, tout comme au reste Gilles Duceppe à qui il a par deux fois montré la porte. 


Certes, le peuple dit qu’il ne croit plus que l’indépendance va se faire; mais ça ne signifie pas du tout qu’il crache maintenant sur l’indépendance ou y renonce tout simplement.  C’est plutôt qu’il comprend qu’il n’y a plus personne depuis au-delà de vingt ans d’honnêtement et de solidement nationaliste et indépendantiste au P.Q., ni au reste au Bloc québécois.  Il ne veut plus rien savoir de ceux dont il parle comme les « twits » du P.Q.  Mais amenez-lui un autre René Lévesque ou un autre Jacques Parizeau, et il va embarquer à coup sûr.  A-t-on déjà oublié l’engouement et les espoirs exceptionnels suscités par la brève venue de Pierre Karl Péladeau à la chefferie du  P.Q.?


Le problème réel est donc que le peuple n’a absolument plus aucune confiance dans le P.Q.  C’est ce problème qu’il faut examiner attentivement, et non pas faire un constat dévastateur et démoralisateur selon lequel le peuple québécois ne veut plus vraiment de l’indépendance.


 


3.  Leader crédible manquant


Essayons donc d’analyser un peu ce « vrai » problème, qui consiste en gros à ce qu’aucun leader nationaliste et souverainiste crédible ne se soit montré au P.Q. depuis presque un quart de siècle (hormis Péladeau).


Disons d’abord que l’on n’avait pratiquement aucune chance qu’un autre René Lévesque ou un autre Jacques Parizeau surgisse chez les « jeunes » hommes de, disons, 40 ans et moins qui sont passés par le système scolaire public québécois.  Les actions de notre ministère on ne peut plus fédéraliste de l’Éducation ainsi que du féminisme québécois ont fait en sorte que nos garçons ont toutes les difficultés du monde à seulement passer à travers leur secondaire; et le bassin des jeunes hommes universitaires diplômés a tout autant singulièrement rétréci depuis le début du féminisme.  Gabriel Nadeau-Dubois a étudié dans le système scolaire privé, et est aujourd’hui, à 28 ans, député à l’Assemblée nationale et co-porte-parole d’un parti politique; mais, s’il était passé par le système scolaire public québécois, il travaillerait sans doute aujourd’hui dans un Tim Hortons. 


Quant aux femmes, qui ont avec le féminisme pris en grande partie le contrôle de notre société maintenant matriarcale et qui sont déjà largement toutes-puissantes dans les jeunes générations, elles sont tellement occupées que par la cause des femmes qu’il n’y a guère d’espoir qu’en émerge une Renée Lévesque ou une Jacqueline Parizeau, qui aurait véritablement à coeur l’ensemble du peuple québécois plutôt qu’uniquement les femmes, et l’indépendance du Québec plutôt qu’uniquement celle des femmes.  Le peuple québécois a certes le temps de mourir et les hommes québécois de tous devenir des carpettes pour que les femmes s’y essuient les pieds, avant que les féministes québécoises soient satisfaites de la situation des femmes (car elles ne le seront visiblement jamais), et qu’elles visent véritablement l’indépendance du peuple québécois. 


Ainsi, personne chez les souverainistes ne croit vraiment que des féministes renommées comme Françoise David (ni évidemment sa sœur au P.L.Q. Hélène David) ou Manon Massé veulent vraiment faire l’indépendance du Québec.  Massé crache d’ailleurs sur l’homme québécois et du même coup sur la moitié du peuple québécois.  Martine Ouellet est encore plus crédible que ces féministes-là.


On peut quand même encore identifier des personnages publics un peu âgés qui ont eu leur éducation avant la dégénérescence programmée de notre système scolaire, donc une instruction beaucoup plus solide, et qui pourraient réinspirer confiance à la population dans le projet d’indépendance.


Ainsi, si Pierre Karl Péladeau revenait, ce serait sûrement tout le contraire de ce qui se passe présentement avec Lisée.  Un politicien au municipal comme Régis Labeaume, à qui la population de Québec a en novembre dernier accordé sa confiance pour un quatrième mandat consécutif, a aussi la probité et la stature pour redonner confiance au peuple.  Il y a également Jean-Martin Aussant, même si  son étoile a certes pâli chez les souverainistes entre autres à cause d’une sorte d’« alliance » avec Québec solidaire, et parce qu’il s’est porté candidat dans un comté contre le président de la Société Saint-Jean-Baptiste de Montréal, Maxime Laporte.


Je ne vois malheureusement personne d’autre, homme ou femme, ayant la stature, l’authenticité et les capacités de porter le poids de tout un peuple sur ses épaules.


 


4. La présente élection


Vue sous cet angle, la prochaine élection qui mettra sans doute le P.Q. à terre est une excellente nouvelle pour les souverainistes, pour la simple et bonne raison qu’elle obligera Lisée à démissionner, et à laisser la place à un autre chef qui sera peut-être, qui sait, on peut toujours rêver, un véritable souverainiste solide.


Lisée aura quand même réussi à faire jouir tous ses grands chums fédéralistes et tout le Canada anglais au complet, qui constate aujourd’hui béatement que la présente élection québécoise est la première depuis presque un demi-siècle à ne pas avoir l’indépendance comme enjeu principal.  Pourrait-on penser que tel était l’objectif réel de la stratégie « étapiste » de Lisée…  Claude Morin avait aussi réussi à imposer au P.Q. une stratégie « étapiste »…


On se débarrassera donc de Lisée en même temps que de Philippe Couillard et du P.L.Q.  La C.A.Q. apparaît une coche moins pire que le P.L.Q.; et le peuple est vraiment heureux d’avoir cette option, cette chance de ne pas être « pogné » entre un P.L.Q. qu’il considère comme étant de toute évidence raciste contre les Québécois, et un P.Q. qui le dégoûte au fond tout autant que le P.L.Q. de par son hypocrisie complète depuis presque un quart de siècle.


  


André Lafrenaie


    



Laissez un commentaire



3 commentaires

  • Gilles Verrier Répondre

    2 septembre 2018

    M. Lafrenaie, Est-ce que le problème date de 1995 ou de bien avant ? 



    Je ne veux pas briser mais transformer radicalement notre union avec le Canada



    René Lévesque, oct. 1978 (Cité par Pierre Godin) 


    Pour moi, ce n'est pas si grave que Lévesque ait dit cela. Le problème c'est qu'il n'a pas tenu parole en sabotant les négociations constitutionnelles de 1981. Qui n'aurait pas été satisfait que la relation de subordination se transforme radicalement en relation d'égalité ?


    Que s'est-il donc passé ? 


    On est en droit de se demander ce que cachait la dite Nuit des longs couteaux du 4 novembre 1981, sur laquelle toute l'attention médiatique et politique n'a cessée de se porter. Comme un train peut en cacher un autre, ce n'était pas le moment le plus grave des négociations constitutionnelles de 1981, loin de là.


    Ces longs couteaux rutilants ont permis de cacher que la délégation du Québec aux négociations constitutionnelles était pilotée par un agent des services de renseignements. De là, on peut comprendre que le dossier du Québec n'a jamais été déposé et défendu à Ottawa. En fait, la stratégie du Québec était déjà entamée par Claude Morin, qui faisait la navette entre les capitales proivinciales, au moment où Lévesque niait l'existence de toute négociation constitutionnelle, en réponse aux questions insistantes de Claude Ryan, dans la campagne électorale de 1981, laquelle reporta le PQ au pouvoir. C'est donc sans mandat et en catimini que Claude Morin organisait un front commun des provinces contre le fédéral avec la connaissance de René Lévesque. Ce front commun contre le fédéral devait donc forcément réunir des revendications communes aux provinces, écartant du coup l'exposition des mensonges et des injustices de la Confédération depuis 1867.  Il ne fut donc jamais question de « transformer radicalement notre relation avec le Canada », au moment et au lieu où, plus que jamais, il convenait de le faire. 


    Contrairement à ce que dit Bock-Coté dans les citations que vous reprenez, le peuple ne s'est jamais dit non à lui-même comme le répète la ligne officielle du péquisme qui, par cette fausse vérité, s'emploie à cacher sa propre turpitude.  Ce sont les grandes figures politiques du Québec qui ont dit non à sa cause, en particulier dans les moments décisifs, là où ça portait vraiment à conséquences, comme au cours de négociations constitutionnelles dont la portée sur notre destin est d'un poids absolument considérable. Il y en aurait beaucoup à dire là-dessus. On peut notamment se questionner sur le fait que le PQ n'a jamais réclamé l'annulation de ces négociations constitutionnelles, faussées et viciées dès le départ parce que la délégation d'une des provinces était menée par un agent des services de renseignements fédéraux. Ne croyez vous pas que cela pourrait se défendre en droit international ? 


    Vous pourrez continuer de suivre cette piste en suivant les liens ci-dessous :


     https://gilles-verrier.blogspot.com/2018/09/chers-amis-je-veux-absolument-vous.html


    https://vigile.quebec/articles/mort-precoce-de-toutes-les-tentatives-pour-modifier-le-statut-constitutionne



  • André Lemay Répondre

    1 septembre 2018

    René lévesque était-il vraiment indépendantiste? À chacun de voir pour soi.

    Jacques Parizeau,  Bilderberg 1968 à Mont-Trembaln  avec Michel Bélanger, Lester B Pearson, Claude Ryan, Pierre Elliot Trudeau!

    À l'ordre du jour notamment:  "internationalization of business".

    Remarquez-vous le terme inernationalisation? De kèssé que ça peut apporter à la nation?

    Pauline Marois, alors ministre des Finances, de l'Économie et de la Recherche sous Bernard Landry. J'ai une copie, disponible, d'une intervention de madame le  27 mars 2003 à Montréal lors d'un dîner-conférence au "Forum sur l'intégration Nord-Américaine"!

    Je la cite parlant de l'Aléna comme force intégrationniste: "Je suis fière du fait que la nation québécoise ait été aux avant-postes de cette grande aventure d'intégration continentale".

    Donc, Intégrons-nous dans l'internationalisme. La Nation ou ses politiciens et vendeurs de chars usagés que sont nos merdias?? Poser la question...

    Lulu, monsieur miroir, à la solde de mononc Paul comme en fait foi ce magnifique film que l'on retrouve à :  https://www.youtube.com/watch?v=GmDTrjpWVSs pour les images et, pour le texte et les images qu'il décrivait à l'origine :' https://www.youtube.com/watch?v=jSfC9hc4ZfI . pas les mêmes images mais sa narration y est toujours pertinente.

    Pis après ça kékun va v'nir me dire que l'indépendance de notre pays dépens de s'monde là? Tabarnak! Réveillons-nous.



  • Pierre Bouchard Répondre

    31 août 2018

    Bonjour M. Lafrenaie,


    vous avez raison, je pense exactement la même chose.


    J'ajoute que si le PQ fait élire assez de députés pour ne pas mourir, on va continuer à danser avec ce parti pendant encore 10 ans. Et ce sera la catastrophe, on aura atteint le point de non retour, il sera trop tard pour nous. Tous les faits l'accablent, ce parti est une grosse arnaque, autant pour nous que pour les gens qui se sont impliqués honnêtement et qui se sont faits avoir. Son objectif n'est pas l'émancipation de notre peuple.


    Je n'aurais pas pensé qu'un jour je souhaiterais le balayage complet du PQ mais aujourd'hui, c'est une question de vie ou de mort. Objectivement le PQ collabore avec ceux qui veulent nous voir disparaitre, il favorise notre lente mort,


    À mes yeux il est impératif que les autorités du PQ soient toutes au complet renvoyées chez elles après le 1er Octobre. L'idéal, même si on parle d'années pour exister vraiment, serait l'élimination complète du PQ et la création d'un nouveau parti. Mais si ce sont les mêmes têtes qui refusent de se battre quotidiennement, ça ne changera rien. 


    Le PQ n'a jamais voulu faire de réelles introspections lors des nombreuses défaites qu'il a subies ces dernières années. Il attend le référendum. Pourtant, en Occident, rares sont les partis politiques qui peuvent s'appuyer sur un bassin de supporteurs de l'ampleur des souverainsites au Québec. Nous sommes au moins 30% de la population. Et si nous les réveillons un peu, nous atteignons 45% sans problème. Comment se fait-il que le PQ, fort d'un tel appui constant, n'a pas le courage de faire ce qu'il faut pour notre peuple ?


    J'ai compris que ce sont des imposteurs. Qu'ils dégagent et qu'adviennent un parti sérieux et honnête.