Parler de Dieu et de Lumière ne sert à rien

Une Église instrumentalisée

Si l'on fait silence sur les mensonges et les hypocrisies

Tribune libre


Ce n’est pas d’aujourd’hui que Benoît XVI se prête subtilement à ce que ses propos ou ses silences puissent servir de combustible à certaines forces dominantes de nos sociétés occidentales.
Que l’on pense à son silence lors des journées mondiales de la jeunesse, en aout 2011, alors que l’OTAN bombardait sans arrêt les villes et les populations de Libye et que les mercenaires tuaient et massacraient d’innocentes victimes. L’occasion lui était donnée de lancer un appel au monde et aux forces de l’OTAN de mettre un terme à autant de violence. Il n’en fit rien. Pas un mot.
Aujourd’hui, à l’occasion de sa bénédiction ORBI ET URBI, moment de grande audience mondiale, il parle de la violence en Syrie en des termes suffisamment imprécis pour que chacun puisse en tirer ce qu’il en veut. Pourtant, il dispose de suffisamment d’informations pour savoir que des mercenaires étrangers, financés par des pays de la région et d’ailleurs, sèment la terreur au sein de la population syrienne. Il sait qu’un référendum a eu lieu, donnant une forte majorité à l’adoption d’une nouvelle constitution et qu’une élection parlementaire est prévue pour mai prochain. Il sait que le Gouvernement syrien a donné tout son appui pour que la mission de Kofi Annan donne les résultats escomptés. Il ne peut ignorer que les forces armées de l’opposition n’ont pas encore donné leur accord à ce plan de Kofi Annan et qu’ils poursuivent leurs actions terroristes dans le pays. Benoît XVI sait tout ça et encore davantage à partir des correspondances de Sœur Agnès Myriam et de nombreux autres intervenants chrétiens.
Il parle également de la communauté internationale sans que l’on sache exactement à quelle communauté internationale il se réfère. S’agit-il de la Ligue arabe et du bloc des amis du peuple syrien? Pense-t-il au Conseil de sécurité et des préoccupations exprimées par la Russie et la Chine? S’en tient-il à la mission de Kofi Annan qui doit faciliter le cessez de feu et la résolution pacifique des problèmes? Sur ces trois points, son discours n’apporte aucune précision, aucun éclairage. Pourtant, là encore, il sait que la paix ne saurait être possible sans un engagement de toutes les parties au conflit à mettre fin à la violence armée. Il sait que le Qatar, la Turquie, Washington et la France alimentent en argent et en technologie les forces armées de l’opposition et qu’ils utilisent toutes les astuces pour présenter le régime d’Al Assad comme le seul responsable de ces tueries. Il sait évidemment tout cela, mais il n’en parle pas. Il ne peut ignorer les efforts déployés par la Russie et la Chine et plusieurs autres pays comme le Venezuela et les pays membres de l’ALBA à l’effet qu’il faut que les pays qui veulent le changement de régime à Damas reviennent aux normes du droit international et qu’ils s’appliquent à les respecter. De tout cela pas un mot de la part de Benoît XVI. Trop de détails pourraient nuire aux amis.
Pas surprenant que les Agences de presse de l’Occident (AFP, PC, et leurs satellites comme radio-Canada) s’emparent de propos aussi imprécis pour leur donner le sens qui sert le mieux ceux qui les paient. Peut-on le leur reprocher, sachant qu’ils sont au service, non pas de l’information, mais de ce qui sert le mieux les régimes au service desquels ils se consacrent.
Ce matin en ouvrant ma radio, j’entends cette nouvelle « Le pape Benoît XVI lance un appel au régime syrien : « Que cesse l'effusion de sang et que soit entrepris sans délai le chemin du respect, du dialogue et de la réconciliation, comme le souhaite la communauté internationale », a dit Benoît XVI, devant plus de 100 000 fidèles massés sur la place Saint-Pierre de Rome, au Vatican. À aucun endroit il ne mentionne le régime syrien, mais les apôtres de l’occident le préciseront.
N’attendez pas une mise au point du Vatican, à l’effet que son appel s’adressait à toutes les parties impliquées dans le conflit.
Dire que le message de la nuit de Pâque portait principalement sur la lumière, cette lumière qui met à nue les mensonges, les manipulations, les crimes commis. Une occasion toute indiquée pour faire appel au professionnalisme des journalistes et des agences de presse pour que la vérité soit véhiculée et que les tricheries soient dénoncées.
Il est plus facile de parler d’un monde sans dieu, enfermée dans l’obscurité de l’ignorance que de mettre des noms sur les criminels et d’indiquer les voies par où passe la lumière de la vie ouvrant sur un monde de solidarité et d’amour.
L’Église est dominée par les forces impériales occidentales qui en ont pris plein contrôle, lui faisant ainsi perdre son âme qui la mettait au service de la vérité, de la justice, de la solidarité et de l’humanité entière.
Oscar Fortin, en ce jour de Pâque
Québec, le 8 avril 2012
http://humanisme.blogspot.com

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Oscar Fortin292 articles

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citoyen du Québec et du monde

Formation en Science Politique et en théologie. Expérience de travail en relations et coopération internationales ainsi que dans les milieux populaires. Actuellement retraité et sans cesse interpellé par tout ce qui peut rendre nos sociétés plus humaines.





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6 commentaires

  • Archives de Vigile Répondre

    9 avril 2012

    Dans les années soixante, le concile Vatican II a contribué à une plus grande mondialisation de l’Église. Comme Institution, elle s’est liguée aux grands pouvoirs, elle ne parle plus, ne dénonce plus et marche main dans la main avec la nouvelle gouvernance mondiale. Un grand nombre d’hommes et de femmes de bonne volonté, épris de justice et de paix, animés des meilleures intentions, se sentent abandonnés dans leur lutte par cette institution que représente le pape. Quel mal ronge cette église? Quels sont les clés pour comprendre sa décrépitude et intervenir?
    Marius MORIN

  • Raymond Poulin Répondre

    8 avril 2012

    Le Vatican a toujours eu «les fesses collées à la palette du poêle». Avant (et pendant) la Deuxième Guerre mondiale, c’était l’Allemagne; jusqu’après la Première : l’Empire d’Autriche-Hongrie. Voir, entre autres, l’historienne Annie Lacroix-Riz (historiographie.info) On peut remonter ainsi jusqu'à l'Empire romain à compter du troisième siècle. Depuis, l'Église a d'abord été un État, accessoirement une religion, avant tout la religion-gendarme chargée de tenir le peuple soumis. Encore heureux que, de temps à autre, on y ait parlé du Christ...

  • Archives de Vigile Répondre

    8 avril 2012

    L'Église semble avoir abandonné les plus faibles pour se ranger du côté des forts et des puissants.
    Et cette tendance semble encore plus prononcée avec Benoit XVI, davantage même qu'avec Jean-Paul II.
    Ce que vous dites soulève également un grand nombre de questions.
    Le décès de Jean-Paul 1er m'a toujours apparu suspect.
    Qui exactement était derrière la tentative d'assassinat de Jean-Paul II?
    Et si ce que vous dites par rapport du verset de Mathieu 24 est exact, c'est qu'on est arrivé à la fin d'un cycle.
    Monsieur Fortin, vous êtes un prophète des temps modernes! C'est malheureux que vos articles ne soient pas davantage lus et commentés.

  • Oscar Fortin Répondre

    8 avril 2012

    M. Didier, merci pour accompagner mes interventions de pertinents commentaires. Il y a quelque temps j'ai écrit un article non publié à ce jour sur cette Alliance de Jean-Paul II et de Benoît XVI avec les forces de l'empire.Je crois que maintenant je vais publier ce texte en deux parties. Il y a effectivement une complicité très grande entre le Vatican et Washington depuis, plus particulièrement Jean-Paul II et Benoît XVI. Je vous réfère à un article que j'ai publié à l'occasion de la mort de J.P. II. Question de vous donner une idée jusqu'où ce personnage est allé dans sa collaboration avec la Maison Blanche.
    http://humanisme.blogspot.ca/2005/01/jean-paul-ll-homme-aux-multiples.html
    Je me demande si nous n'en sommes pas à ce que Mathieu met dans la bouche de Jésus dans son Évangile, ch.24, verset 15. Il y a de quoi s'interroger.
    Bonne fin de journée de Pâque.

  • Archives de Vigile Répondre

    8 avril 2012

    Monsieur Fortin,
    La "communauté internationale", c'est quelques pays riches et arrogants qui veulent contrôler tous les autres.
    Et comme je l'ai déjà mentionné, ce pape en particulier, et encore bien davantage que Jean-Paul II qui semblait garder une certaine liberté de parole, semble être du côté de la riche élite capitaliste internationale de la finance et des affaires qui exploitent et appauvrissent les peuples.
    Déprimant, on ne peut plus.
    Le pape devrait faire la promotion d'un revenu universel afin de combattre la pauvreté dans le monde et de faire en sorte que tous puissent accéder à une vie décente et heureuse s'il était vraiment préoccupé par le sort des plus démunis.

  • Oscar Fortin Répondre

    8 avril 2012

    Sur le même sujet:
    http://www.legrandsoir.info/la-syrie-mise-en-perspective-et-le-bilan-d-obama.html
    http://www.alterinfo.net/notes/Syrie-l-opposition-refuse-de-garantir-un-cessez-le-feu_b4076781.html