Vivre dans un Québec de la "sélection naturelle"

Tribune libre

Ce n'est pas un sujet que j'aborde avec joie. Cependant, il faut bien l'aborder puisqu'il s'agit de la réalité de notre société québécoise.
Mon désarroi sur cette question a commencé au début des années 1990 alors qu'un article dans la revue "Relations" signé par Guy Paiement avait attiré mon attention.
Monsieur Paiement mentionnait, preuves à l'appui, qu'au Québec, c'était dans les classes socio-économiques les plus défavorisées qu'il y avait le plus de solitude et du même coup, le moins d'enfants.
Monsieur Paiement ajoutait que ce Québec "cassé en deux" risquait un jour de devenir le Québec de la casse.
Sur ce point, il se trompait évidemment parce que les gens les plus démunis sont trop préoccupés par leur survie pour penser à se révolter contre leur condition. Et deuxièmement, comme disait le regretté Michel Chartrand, ce n'est pas dans cette tranche de la population qu'il faut chercher les plus violents et les plus agressifs. Ces derniers se retrouvent en effet plus souvent dans les couches socio-économiques plus prospères parce que la société de compétition capitaliste encourage ce phénomène.
Par exemple, certains, comme monsieur Pierre Cloutier sur Vigile, ont le mérite de poser des questions que peu de gens posent à propos de la présente grève des étudiants.
Monsieur Cloutier mentionne ceci:
"Autrement dit, il faut constitutionnaliser ce droit (le droit à la gratuité de l'éducation) pour le mettre à l’abri des gouvernements et des forces du marché.
Qui parmi les étudiants réclament ce droit ? A-t-on entendu cela à quelque part ?
Avez-vous vu une seule pancarte où ce serait marqué : Droit à l’éducation gratuite dans une constitution d’un Québec souverain et indépendant ?"
http://www.vigile.net/Toujours-la-meme-maudite-poutine
Tout se déroule en effet en dehors de toute revendication qui toucherait l'ensemble de la société québécoise. Chacun tire la couverte de son bord. On ne se met pas ensemble pour ramer dans la même direction. Probablement parce que des décennies de rhétorique néo-libérale nous ont conditionnés dans le chacun pour soi et dans la compétition.
Ainsi, j'ai bien peur que les étudiants d'aujourd'hui, en ne considérant que leurs exigences à eux, ne deviennent ceux qui vont, plus tard, entretenir ce Québec de la "sélection naturelle" dans lequel ceux qui sont moins habiles, moins intelligents, plus maladroits, ceux qui ont de la difficulté dans les relations sociales, bref ceux qui sont inaptes à servir les "besoins du marché", vont se voir condamner à de la survie dans un Québec pourtant riche, mais qui laisse végéter ses assistés sociaux avec un maigre 575$ par mois.
Et depuis le temps que le Québec pratique cette "sélection naturelle", est-ce que ça a amélioré quelque chose? Les étudiants sont encore dans la rue à manifester, les usines continuent à fermer et le recours aux banques alimentaire continue à croître.
Dans une société civilisée, il existerait un revenu universel afin que tous sans exception puissent vivre décemment et heureux.


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