«Je suis conscient qu'on a mangé une moyenne claque en 1759, en 1760 puis en 1763, mais on s'est relevé de ça, après 250 ans», fait valoir le président de la Commission, André Juneau. Illustration: La mort du général Wolfe (1770), huile sur toile de Benjamin West. Wikipedia
Nadia Ross - (Québec) Pendant que les descendants directs de Wolfe et de Montcalm s'apprêtent à se livrer un combat fictif dans leurs beaux habits d'époque, les détracteurs de la Commission des champs de bataille nationaux (CCBN) s'accumulent. Il n'en demeure pas moins que, d'un point de vue pédagogique et purement historique, le 250e anniversaire de la bataille des plaines d'Abraham a sa raison d'être, estiment des experts en histoire.
La commémoration, c'est un devoir de mémoire, estime Alain Laberge, professeur au département d'histoire à l'Université Laval et spécialiste de la Nouvelle-France. «Il faut commémorer les événements même s'ils ne sont pas plaisants parce que c'est nous, c'est une partie de notre mémoire.» Nier l'existence d'un événement aussi important de notre histoire n'a rien de positif, prévient-il. «Il nous explique qui nous sommes, d'où nous venons.»
Se souvenir, pas célébrer
C'est donc le choix des mots qui est délicat. «On peut parler de commémoration mais, si les termes utilisés font que ça s'apparente plus à une célébration, c'est à mon avis un peu délicat pour une partie de la population», ajoute celui qui préside les Fêtes de la Nouvelle-France. D'ailleurs, le mot commémoration est encore trop festif aux yeux de l'historien Denis Vaujoie. Ces types d'événements sont plutôt «des rappels historiques, des moments de silence, des moments de tristesse», selon lui.
Au-delà des mots, l'idée qu'un organisme fédéral - du clan des vainqueurs - organise de telles festivités choque Patrick Bourgeois du Réseau de résistance du Québécois. «C'est l'État canadien qui vient nous narguer en plein coeur de notre capitale» avec sa victoire. Le tout, «dans un contexte où la lutte de libération nationale québécoise se poursuit toujours». C'est humiliant, c'est de la propagande fédéraliste pure, ajoute celui qui se défend bien de vouloir censurer l'histoire.
«La CCBN veut nous montrer une version biaisée de la réalité, une version joviale de la bataille entre Wolfe et Montcalm, alors que ce n'était pas drôle du tout!»
Certes, la guerre de Sept Ans et le siège de la ville de Québec n'avaient rien de bien gai. Et la bataille des Plaines n'en était pas le point culminant ou la libération, prévient M. Vaujoie. La bataille de 1759 a surtout frappé l'imaginaire par sa tournure : les deux grands généraux y ont laissé leur vie et elle a marqué le début de la fin des Français. «Mais la bataille en elle-même n'est pas importante», lance-t-il. Le sort de Québec ne s'est pas scellé en deux salves anglaises! Il y a eu d'autres étapes ensuite, clame l'historien, en rappelant que les changements s'opèrent davantage «d'un trait de plume» que sur les champs de bataille.
Quant à la reconstitution, il y voit un intérêt pédagogique, sans plus. «Il y en a qui pratiquent le golf, d'autres qui pratiquent ce hobby. Je les respecte, mais moi, je ne le ferais pas!» Près de 3000 reconstituteurs sont attendus à Québec du 30 juillet au
2 août. Non seulement les batailles des Plaines et de Sainte-Foy seront reconstituées, mais une mise en scène du siège de la ville fait également partie du programme de la CCBN.
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