(Québec) La débandade du 7 avril au Parti québécois a aussi pour cause sa difficulté à s'attirer l'adhésion des communautés culturelles, un vieux démon de la formation souverainiste, suggère un militant et ex-directeur de cabinet de la formation politique, Neko Likongo.
Dans une lettre ouverte, M. Likongo soutient que «l'avenir du PQ passe par un rapprochement» avec les communautés issues de l'immigration. Il estime que «les militants et les hautes instances» doivent se poser une question «fondamentale : comment le PQ peut-il mieux connecter avec les communautés culturelles»?
Celui qui a été candidat péquiste à trois reprises dans Jean-Talon, à Québec, fait remarquer le «décalage entre la réalité démographique du Québec contemporain et celle vécue au sein des instances péquistes». Il rappelle que, chaque année, le Québec est pourtant la terre d'adoption de 50 000 immigrants.
Neko Likongo, né au Québec d'un père congolais, raconte une anecdote pour illustrer son point de vue. Se dirigeant à un rassemblement du PQ à Montréal, il descend à la station de métro Place-d'Armes. «Les passagers du wagon étaient pratiquement tous des membres de communautés culturelles. Quel contraste frappant avec la foule blanche et peu multiethnique du Conseil national qui se tenait à quelques pas de là!
Sous-représentation
«Cette sous-représentation des communautés culturelles au sein de notre formation politique est manifeste. Elle est aussi symptomatique d'un problème pour un parti qui souhaite rallier l'ensemble de la population québécoise autour de son programme.»
Le référendum sur la souveraineté et la Charte de la laïcité ont été au coeur du post-mortem auquel se sont livrés élus, stratèges et militants de la formation de la démissionnaire Pauline Marois. En entrevue, M. Likongo se refuse à renier un projet porté par l'équipe péquiste dont il faisait partie à titre de directeur du cabinet aux Affaires autochtones.
Tout en insistant sur le fait que ses critiques sont «de regarder vers l'avenir [...] je me dis qu'il aurait peut-être été bon de l'aborder de façon différente. [...] Le projet a buté sur les signes religieux ostentatoires. Aurait-on dû mettre de l'eau dans notre vin? Peut-être», a-t-il laissé tomber sur un aspect qui a servi de repoussoir aux groupes issus de l'immigration.
«Vote ethnique»
M. Likongo a acquiescé lorsque Le Soleil lui a soumis qu'il semble que les vieux démons du PQ le hantent encore. En 1995, le chef souverainiste Jacques Parizeau avait attribué la défaite référendaire «au vote ethnique et à l'argent».
Il souligne qu'en 2011, il a écrit aux dirigeants du PQ pour plaider «non seulement pour le projet péquiste, mais aussi pour le projet souverainiste. Nous avions perdu par quelques milliers de votes [un plébiscite] où chaque voix comptait. Nous avions quelque chose à aller chercher dans les communautés culturelles.»
Selon lui, «je vois mal comment le Parti québécois peut aller de l'avant sans les inclure davantage». Dans sa lettre ouverte, il ajoute «qu'il deviendra de plus en plus difficile pour un parti politique qui aspire au pouvoir de se lancer dans des projets de société sans en tenir compte».
Neko Likongo soutient que son approche ne se résume pas à une question de partisanerie envers la cause souverainiste. «Au-delà de savoir si les gens voteront oui ou non au prochain référendum, il faut insuffler à cette population une fierté nationale sans leur demander de renier leurs origines culturelles.
«Ils voteront comme ils voudront. Mais le Parti québécois aura fait un grand bout de chemin s'il est capable de développer ce sentiment de fierté nationale.»
Si les relations du parti qu'a fondé René Lévesque ne sont pas toujours faciles avec les nouveaux Québécois, M. Likongo dit bien aimer l'exemple de feu Gérald Godin, le député-poète du PQ dans Mercier de 1976 à 1994.
Trop jeune pour l'avoir connu, il signale cependant que M. Godin «a marqué les Québécois par sa volonté de rapprochement avec les communautés culturelles. Cet aspect, il manque chez nous, en ce moment.»
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