Elections législatives au Liban : le Hezbollah et ses alliés rafleraient la majorité des sièges

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Les chrétiens du Liban : médiateurs entre le Hezbollah financé par l'Iran et les sunnites proches des Saoudiens

Selon les résultats préliminaires, le Hezbollah ainsi que ses alliés ont remporté un peu plus de la moitié des sièges du Parlement libanais lors des élections législatives qui se sont déroulées le 6 mai, les premières depuis neuf ans.


Le mouvement chiite Hezbollah, l'un des principaux alliés de l'Iran au Moyen-Orient, semble le 7 mai en passe de confirmer son emprise sur la scène politique libanaise, au lendemain des premières législatives en près d'une décennie dans le pays.


Le chef de ce mouvement, Hassan Nasrallah, n'a d'ailleurs pas attendu l'annonce des résultats officiels pour se réjouir lors d'un discours télévisé : «Il y a une grande victoire morale et politique pour le choix de la résistance.»


Le scrutin a par ailleurs été marqué par un faible taux de participation (49,2%) ainsi que par l'émergence d'un mouvement de la société civile contestant les partis au pouvoir, qui devrait remporter deux des 128 sièges du législatif.


Avec cette élection, le Hezbollah renforce son poids national et régional


Des partisans du mouvement chiite libanais Hezbollah à Beyrouth lors d'un rassemblement le 23 juin


Le partage du pouvoir au Liban entre les différentes communautés religieuses empêche la suprématie d'un seul parti ou d'une communauté au sein de l'hémicycle. Le Hezbollah, très populaire dans ses bastions, devrait toutefois conforter sa position grâce aux alliances qu'il pourrait tisser ou renouveler. Les estimations pour le parti chiite, quelques heures après le début du dépouillement, indiquent qu'il a raflé la mise quasiment partout où il était présent.


Si les résultats officiels sont attendus dans la journée, ces premières tendances laissent penser que le Hezbollah devrait, avec ses alliés, pouvoir forger plus facilement une majorité en sa faveur sur des questions clés, telles que la lutte armée, qu'il n'a jamais abandonnée après la guerre civile (1975-90).


Selon le politologue Karim el-Mufti, interrogé par l'AFP, le Hezbollah devrait donc «avoir une grande influence dans le processus décisionnel» dans un contexte de fortes tensions régionales autour du rôle de l'Iran, principal allié du mouvement chiite, dans la région.


Malgré son échec, Saad Hariri devrait rester Premier ministre


Principale figure du camp rival, le Premier ministre sunnite Saad Hariri et son parti politique, le Courant du Futur, figurent en outre parmi les perdants de ces législatives. Ce courant, soutenu par l'Arabie saoudite, «devrait perdre quelques sièges», selon Karim El-Mufti, qui précise néanmoins que la reconduction au poste de chef de gouvernement de Saad Hariri n'est «pas menacée». Ce revers intervient six mois après le feuilleton de la démission surprise de Saad Hariri depuis Riyad, qui avait suscité une vaste mobilisation populaire et diplomatique.


Mécontente des compromis du Premier ministre vis-à-vis du Hezbollah pro-iranien, l'Arabie saoudite avait finalement laissé le fils de l'ex-Premier ministre assassiné Rafic Hariri rentrer dans son pays sous les vivats. A Beyrouth, les nouveaux contours du Parlement pourraient en parallèle laisser le parti chrétien du président Michel Aoun jouer le rôle d'arbitre auquel il prétend. «Le plus grand acteur sera le groupe du président Aoun, qui évoluera parmi les blocs non alignés, et le Hezbollah bénéficiera de ce fait de l'absence d'une large coalition [face à lui]», estime le politologue Imad Salamey. 


Créé au début des années 1980 dans la foulée de la Révolution islamique iranienne pour lutter contre Israël, le Hezbollah combat actuellement en Syrie aux côtés du gouvernement de Bachar el-Assad. Il est considéré comme une organisation «terroriste» par les Etats-Unis et cinq de ses membres ont été accusés dans l'assassinat en 2005 de Rafic Hariri.



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La société civile entre au Parlement


Au Liban, les dernières législatives remontaient à 2009 : le mandat du Parlement avait ensuite été prorogé à trois reprises en arguant du risque de débordement de la guerre en Syrie. Un taux de participation plus élevé était attendu, mais la nouvelle loi électorale, ainsi que les bulletins de vote pré-imprimés utilisés le jour de l’élection semblent avoir dérouté des électeurs.


Le 6 mai au soir le ministre de l'Intérieur, Nohad Machnouk avait reconnu que «ni les électeurs ni les responsables de bureaux de vote [n'étaient] encore familiers avec cette nouvelle loi», basée sur un système proportionnel complexe. D'autres ont été dissuadés d'aller voter en raison de «l'absence de logique politique» en termes d'alliances électorales, d'après Karim el-Mufti. 


Malgré cette participation décevante d'un électorat qui comptait environ 800 000 nouveaux électeurs, l'actuelle loi électorale, plus représentative, doit permettre à une liste de la société civile de faire son entrée au parlement.