(Québec) Le gouvernement fédéral devra s'asseoir avec les Hurons-Wendat avant de signer une entente territoriale avec les Innus, a décidé la Cour fédérale.
La nation huronne-wendat a déposé en 2009 une demande de contrôle judiciaire pour s'opposer à l'Entente de principe d'ordre général (EPOG) convenue cinq ans plus tôt avec une partie des Innus, dont ceux de Mashteuiatsh au Lac-Saint-Jean et d'Essipit sur la Côte-Nord.
Le territoire ancestral qui leur a été reconnu, le Nitassinan, recoupe celui des Hurons-Wendat, le Nionwentsïo, à la hauteur de la réserve faunique des Laurentides. Depuis dix ans, les deux communautés chassent d'ailleurs dans les mêmes zones et des conflits éclatent.
Le juge Yves de Montigny s'est rangé en grande partie aux arguments des demandeurs. Il considère que le Canada «n'a pas respecté son obligation de consulter et d'accommoder la nation huronne-wendat» avant de signer l'EPOG avec les Innus et le gouvernement du Québec en 2004.
«Le Canada doit s'engager sans délai dans des discussions sérieuses et approfondies avec la demanderesse en vue de concilier dans toute la mesure du possible et d'une manière conforme à l'honneur de la Couronne les divergences entre la Nation huronne-wendat et les Premières Nations de Mashteuiatsh et des Innus d'Essipit quant au territoire que devrait couvrir l'EPOG», ordonne le juge. Il refuse toutefois d'invalider l'entente, qu'il qualifie par ailleurs d'«engagement politique sans conséquence juridique véritable».
Traité de 1760
Le jugement daté du 1er décembre reconnaît aussi l'importance du Traité Huron-Britannique de 1760, validé par la Cour suprême il y a plus de 20 ans. Mais le juge de Montigny fait attention de ne pas statuer sur la portée du document, comme l'auraient souhaité les Hurons-Wendat.
Pour le grand chef Konrad Sioui, ce jugement est néanmoins une victoire totale. «On n'en demandait pas tant!» lance-t-il, éprouvant une certaine satisfaction à voir Ottawa et Québec se faire «rudoyer».
Le chef autochtone est maintenant en attente d'un signal du gouvernement fédéral, qui devra établir un mécanisme de consultation. «La seule chose qu'on demandait et qu'on demande encore, c'est de retirer la partie du Niowentsïo» de l'EPOG, répète M. Sioui.
Il considère cette option réaliste, malgré les frictions entre les deux communautés sur la question territoriale, frictions qui se transportent en pleine forêt lors de la chasse au gros gibier à l'automne. Le préalable, selon le chef huron-wendat, est le suivant : «tout le monde doit être de bonne foi et on s'inclut là-dedans».
Le gouvernement fédéral ne s'est pas positionné encore. «Puisque nous venons de recevoir la décision judiciaire dans cette affaire, nous l'examinerons afin de déterminer la marche à suivre», a fait savoir par courriel le cabinet de Bernard Valcourt, ministre des Affaires autochtones et du développement du Nord canadien.
Trois semaines de chasse à l'automne pour les Hurons-Wendat
Les chasseurs hurons-wendat ont déjà décidé qu'ils traqueront l'orignal pendant trois semaines l'automne prochain dans la réserve faunique des Laurentides, comme ils l'ont fait une première fois cette année. La dernière semaine de septembre, ils cohabiteront avec les Blancs, ce que le gouvernement du Québec préfère éviter. Les deux semaines suivantes seront habituellement réservées aux autochtones.
Le conseil de la nation huronne-wendat a déjà avisé le provincial, qui s'était dit surpris par le changement de calendrier l'automne dernier et le contestait d'ailleurs. M. Sioui affirme n'avoir d'autre choix que d'étirer la saison de chasse, car le nombre d'adeptes augmente dans la communauté et la récolte diminue, dit-il, en raison de la concurrence des chasseurs innus qui revendiquent le territoire.
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