Harper mêlé dans ses affaires

Dérives démocratiques - la société confrontée à sa propre impuissance


L'expression les "affaires d'État" aura rarement été plus appropriée qu'au cours des derniers mois pour le gouvernement de Stephen Harper. Bilan d'une session rythmée par de nombreuses affaires.
Il y a eu, dans un ordre aléatoire, l'affaire Couillard, l'affaire Cadman, l'affaire Mulroney-Schreiber, l'affaire PC-Élections Canada, l'affaire Blackburn-Bachand et l'affaire Omar Khadr.
Cette session parlementaire qui prend fin demain aura été celle de toutes les affaires.
Récapitulons. L'affaire Couillard: inutile de revenir sur tous les détails, cette histoire a fait couler beaucoup d'encre depuis deux mois. Suffit de rappeler que la vedette montante des conservateurs au Québec, Maxime Bernier, a été emportée par les révélations entourant son ex-copine. Pour la suite des choses, il est utile de savoir qu'une rumeur court dans le milieu politique fédéral selon laquelle les conservateurs pourraient larguer Maxime Bernier, qui serait donc obligé de se présenter comme indépendant pour garder sa circonscription de Beauce.
On garde aussi de cette histoire la désagréable impression qu'une femme liée au crime organisé a tenté d'infiltrer le gouvernement et a fait des pressions pour faire débloquer des contrats immobiliers.
Suivante, l'affaire Cadman, du nom de feu le député Chuck Cadman, dont le vote crucial en 2005 avait permis aux libéraux de Paul Martin de survivre à un vote de confiance aux Communes. Les libéraux ont accusé les conservateurs d'avoir essayé à l'époque d'acheter le vote de M. Cadman, qui se mourait du cancer, pour faire tomber le gouvernement en échange d'une somme d'argent et une réintégration au sein du caucus conservateur. La GRC a fait enquête et a jugé qu'il n'y avait pas eu infraction. En plus le gouvernement Harper a contre-attaqué en affirmant, expertise à l'appui, que l'enregistrement d'une conversation incriminante entre Stephen Harper et Chuck Cadman avait été altéré. N'empêche, l'affaire a traîné dans le décor pendant quelques semaines.
L'affaire Mulroney-Schreiber n'a plus besoin de présentation non plus. Après avoir résisté aux attaques de l'opposition, M. Harper a finalement cédé et a décidé d'instituer une commission d'enquête sur les liens d'affaires entre l'ancien premier ministre conservateur et l'entrepreneur allemand Karlheinz Schreiber. Au passage, M. Harper a ordonné à tous les membres de son gouvernement de se tenir loin de Brian Mulroney, une sortie qui a, dit-on, profondément meurtri l'ancien premier ministre en plus de frustrer ses fidèles partisans au Québec.
Passons à l'affaire PC-Élections Canada. En avril dernier, la GRC a mené, à la demande d'Élections Canada, une perquisition au quartier général du Parti conservateur. Le chien de garde du système électoral canadien accuse les conservateurs d'avoir produit de fausses factures pour obtenir des remboursements de dépenses électorales. Une descente dans les bureaux du parti au pouvoir, ce n'est pas une mince affaire.
On continue avec l'affaire Omar Khadr, du nom de ce jeune Canadien d'origine afghane emprisonné à la prison américaine de Guantánamo. Arrêté en Afghanistan par l'armée américaine et accusé d'avoir participé à des attaques ayant causé la mort d'un soldat américain alors qu'il n'avait que 15 ans, M. Khadr croupit dans la célèbre prison depuis 2003. L'opposition, le barreau et de nombreux organismes font pression auprès du gouvernement Harper pour que celui-ci rapatrie le jeune homme. En vain, les conservateurs ne bronchent pas.
Plus localement, il y a aussi eu l'affaire Blackburn-Bachand. Le ministre québécois Raymond Bachand a varlopé son homologue fédéral, Jean-Pierre Blackburn, parce que celui-ci coupe les fonds aux régions du Québec. Ajoutez à cela le froid entre Québec et Ottawa sur le front environnemental, et ainsi s'étiole la bonne entente du début du règne conservateur.
Par ailleurs, sans parler cette fois d'"affaire", les conservateurs ont aussi été canardés par l'opposition et dans les médias à cause de leur controversé projet de loi sur l'immigration et pour cet autre projet de loi qui rouvre indirectement le débat sur le droit du foetus.
Pour la première fois depuis qu'il est premier ministre, Stephen Harper a été placé sur la défensive pendant toute la session. Lui qui nous avait habitués à sortir un lapin de son chapeau pour faire diversion et pour déstabiliser les partis de l'opposition, semble à court de nouveaux trucs.
Dans les circonstances, les conservateurs devraient être au tapis. Pourtant, ils se tirent plus que bien d'affaire, dans les circonstances, restant à peu près à égalité avec les libéraux dans les intentions de vote.
La dernière session aura permis de constater, une fois de plus, que le meilleur allié de Stephen Harper, c'est Stéphane Dion. Et que le premier bénéficiaire au Québec des problèmes des bleus, c'est le Bloc québécois.
Avec le résultat paradoxal suivant: l'option souverainiste est au plus bas, mais le Bloc remonte.
Pour joindre notre chroniqueur: vincent.marissal@lapresse.ca


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