Hérouxville et l'inévitable choix

Promulguons enfin ce que nous sommes, nous avons ce droit de revendiquer notre héritage.

Tribune libre - 2007

Que d'encre a coulé depuis ce 27 janvier 2007, date où la petite
municipalité d'Hérouxville publiait ses 'normes de vie'.
Que la rédaction de ce 'manifeste pamphlétaire' en ait étonné plusieurs,
qu'il ait trouvé des supporteurs issus de tous les horizons, québécois de
souche ou non, qu'il ait fait l'objet d'innombrables discussions à travers
le monde, sur tous les blogues, radios, journaux et médias disponibles, il
n'en demeure pas moins qu'il a su répondre adéquatement à ce sentiment que
la nation du Québec doit d'urgence s'affirmer. Pourquoi? Poser la question
est y répondre : protéger nos racines identitaires.
Si une loi a été promulguée pour protéger la langue française en cette
nation qu'est le Québec, comment ne pas avoir déjà protégé l’essence même
de son existence, soit sa culture, ses us et coutumes, son patrimoine et
son histoire? Serait-ce qu’un rafraîchissement de sa charte ou qu’une
nouvelle constitution québécoise devrait émerger? Mais pourquoi pas? À
moins de vouloir poursuivre l’odyssée vers une société pluraliste
exacerbée!
Au Canada, le multiculturalisme de Trudeau était certes une voie
envisageable, mais l’effet pervers de l’aspect 'institutionnel' qui
l’occulte, n'a en réalité que ghettoïsé ses fervents défenseurs. Il s’est
greffé à ce ‘multiculturalisme des droits et libertés ‘, un profond désir
de se soustraire à des ‘obligations', ouvrant ainsi la porte aux
'accommodements'. Était-ce raisonnable? Comment peut-on alors blâmer un
immigrant de tenter de reproduire ici le modèle qui lui sied le mieux?
La société d’accueil n’a pas les pouvoirs en main pour mieux gérer
l’intégration de ses immigrants car elle-même ressemble à un monstre à deux
têtes dont l’œil de l’un accuse une myopie légendaire, et l’autre une
presbytie inquiétante. Nous assistons donc ici à l’érection de canevas
multiples noyant de ce fait tout tissu identitaire.
C'est bien connu, il est dans la nature profonde du québécois d'être
'accommodant' et son tempérament latin s'exprime sur un continent où le mot
"liberté' se confond avec 'égalité'. Cette confusion naît du fait que les
'obligations' du citoyen n'ont jamais été adéquatement définies. On
constate de plus en plus l'échec de ce multiculturalisme non-identitaire.
Il influence tellement le discours qu'on finit par le soupçonner raciste ou
xénophobe. Il ne véhicule aucunement les valeurs propres aux 'bâtisseurs'
mais prolonge plutôt des crises identitaires se consumant au fil du temps
dans ce méandre des enquêtes et commissions innombrables. D’ailleurs, elles
n'ont jamais été porteuses de solutions prometteuses d'avenir, n'obéissant
qu'à des vœux pieux aux yeux de ceux qui les ont commises. Le politique
observe son brouillon, le révise, le corrige, en autorise la vérification
et finalement le délaisse.

Laurendeau, Dunton, Pépin, Robarts, Bélanger, Campeau, tous ont cru bon
de laisser la partisanerie de côté pour entrevoir des solutions. Pourquoi
ne pas les avoir écoutés plutôt que de feindre de les avoir entendus? Ce
n'est certes pas l'opinion de philosophes, historiens ou sociologues qui
changeront cet état de fait. L'ouïe politique est faible, surtout
lorsqu'elle ne sait plus reconnaître la voix de ses citoyens. Serait-ce la
langue de bois de ce politique qui rende son ouïe si imperméable aux propos
de ses commettants?

Faudra-t-il attendre que les citoyens du Québec se révoltent? Se
pourrait-il que la prochaine révolution soit moins 'tranquille'? L'arme
d'un peuple est sa voix et l'expression de son courage, sa voie. Sinon,
abdiquons dès aujourd’hui!
Pendant ce temps, certaines communautés s'organisent. Elles envahissent
les champs propres à l'éclosion d'un État que nous ne souhaitons pas.
L'intégrisme reprend ses lettres de noblesse ici et dans le monde, sans que
l’élite, le politique et la masse ne s'en préoccupent, du moins dans
l'ensemble. L'inter-communautarisme s'installe, les opinions les plus
justes se diluent dans un ensemble hétéroclite de propos incongrus. Nous
assistons à la confusion des genres. On gère mais ne solutionne plus. On
consulte, on expérimente, on fait de la réingénierie, on tergiverse mais on
ne décide jamais. On s'adapte très bien de notre léthargie.
Que dire de ce clivage des villes et régions sinon que le rat des champs
ne s'accommode plus du plaisir du rat des villes... 'Fi du plaisir que la
crainte peut corrompre'. Lafontaine aurait-il compris qu’on avilie le
citadin, l’éloignant ainsi de ses racines profondes? Un excès de langage me
direz-vous? Non. De la lucidité? Peut-être, bien que ce mot soit si
apeurant pour certains.
L'avenir d'une nation appartient aux hommes et femmes issus du courage et
de l'abnégation de leurs ancêtres. L'héritage d'une nation n'est pas un
leurre mais un gage d'avenir qu’on se doit de ne pas dilapider.
Promulguons enfin ce que nous sommes, nous avons ce droit de revendiquer notre héritage.
Bernard Thompson

Citoyen d'Hérouxville
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1 commentaire

  • Archives de Vigile Répondre

    25 février 2007

    Que ce serait donc bon d'entendre quelqu'un du PQ parler ainsi du peuple et au peuple.
    Pas le chef, biensûr. J'en demande pas tant.