Jacques Attali a tort de diaboliser le souverainisme français

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« Non, la France n’a aucune histoire commune avec l’Islam. »


 

 



« Cher Monsieur Attali… »




Monsieur Attali, lorsque j’étais enfant à la fin des années 1980 et au début des années 1990, mon père vous prenait comme exemple : « mon fils, tu dois étudier, faire les classes prépas et être aussi bon en maths qu’en culture générale tout comme Jacques Attali ». Mon père qui n’avait rien d’un socialiste savait reconnaître un grand homme et un bel esprit quelle que soit sa couleur politique, et vous êtes l’un et l’autre assurément. Plus tard, lorsque je suis venu en France faire mes études, grâce à une bourse d’excellence payée par le contribuable français, j’ai continué à vous admirer dans votre vie d’entrepreneur et d’intellectuel sans attache partisane.


Cette introduction avait pour but de vous dire combien il m’est difficile de prendre la plume aujourd’hui pour critiquer votre billet du 04 octobre dernier. J’avoue aussi que j’ai hésité à marquer ma différence avec un puissant non pas parce que vous allez vous venger sur ma pauvre personne mais parce que la France compte aujourd’hui plusieurs défenseurs de la vertu, prêts à tout pour faire taire les voix dissonantes. Mais, le pays qui m’a tellement donné mérite une prise de risque quitte à se mettre à dos la censure.


Taxer le souverainisme d’antisémitisme permet de stériliser tout débat


Vous tracez un parallèle entre le souverainisme et l’antisémitisme que vous définissez comme l’hostilité à l’égard des juifs et des musulmans. En faisant cela, vous stérilisez le débat car la simple mention du mot antisémitisme met en alerte tous ceux qui ont quelque chose à perdre. Personne n’a envie de se faire traiter d’antisémite et de basculer parmi tous ces Français frappés de « mort sociale ».



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Il y a mille manières de remettre en cause le souverainisme. Vous auriez pu parler de son incapacité à penser la question de l’Euro. Vous aviez le droit de critiquer sa passion pour une France qui n’existe plus et qui n’existera plus : celle des années 1950 où l’autorité patriarcale et les frontières signifiaient encore quelque chose, où l’Islam n’existait pas ou presque. Cette France est morte définitivement car le pays est devenu multiethnique, multiconfessionnel et anti-patriarcal. Le péché des souverainistes et des patriotes est qu’ils sont eux aussi dans le déni de la réalité tout comme les progressistes qui font un blocage mental dès qu’il s’agit de reconnaître l’évidente relation entre l’Islam, l’islamisme et la violence politique.


La situation idéalisée des juifs en Afrique du nord avant l’arrivée des Français


Vous affirmez qu’« il est triste de voir des descendants de juifs d’Algérie oublier le rôle magnifique que les musulmans algériens ont joué pour soutenir et protéger leurs parents, aux temps horribles de l’antisémitisme triomphant en métropole et plus encore en Algérie, sous Vichy, sous Giraud, et même sous de Gaulle. »


Vous avez raison et je rajouterai ici le rôle essentiel de Mohammed V, roi du Maroc, qui a contribué à sauver les juifs de l’Empire Chérifien.


Mais, Monsieur Attali l’histoire de l’Afrique du Nord n’a pas commencé en 1939. Les juifs sépharades et les musulmans (arabes et berbères) ont toujours vécu côte à côte parfois dans la collaboration et souvent dans la peur. Les juifs vivaient dans des quartiers réservés, parfois fermés à clef pour leur propre sécurité. Les juifs d’Afrique du Nord se faisaient bastonner et voyaient leurs biens pillés dès que l’autorité politique était absente ou avait autre chose à faire que de les protéger comme lutter contre les Ottomans ou mater une rébellion tribale. Ce n’est pas un hasard si les juifs ont accueilli le décret Crémieux comme une libération : c’était leur sésame pour vivre dans la sécurité sous la protection de la France. Au Maroc et en Tunisie, les choses étaient différentes car le décret n’a pas concerné ces deux protectorats.


Vous dites aussi :


« L’islam, en soi, n’est pas une menace pour la France ; il en est une composante depuis le 8ème siècle. C’est même par lui, et par les philosophes juifs, que la pensée grecque est arrivée en France au tournant du premier millénaire. »



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Non, la France n’a aucune histoire commune avec l’Islam. Au 8eme siècle comme vous dites, elle a déployé des trésors d’identité et de bravoure pour chasser l’Islam de France. Et tout au long de son histoire, elle s’est prémunie contre les attaques maritimes en provenance d’Afrique du Nord et de l’Empire Ottoman. Ce n’est pas par hasard que le drapeau corse est une tête de Maure.


 

L’Europe s’est toujours opposée à l’islam


A travers les siècles, l’Europe a toujours refusé toute intimité avec l’Islam. L’Espagne a mis sept siècles à se débarrasser de l’Islam. La Bulgarie, soumises aux Ottomans, a toujours refusé la conversion à l’Islam, de même que la Roumanie. La Hongrie que nous aimons vilipender est un pays-frontière puisqu’elle a servi de limes pour l’Europe chrétienne face aux Turcs.


Vous dites aussi :


« Et jamais le monde ne s’est mieux porté que quand Judaïsme, Chrétienté et Islam travaillaient ensemble à faire triompher la raison sur l’obscurantisme. »


J’aimerais savoir quand ! Vous faites peut-être référence à la présence islamique en Espagne. Sur le sujet, tellement de mythes ont été tissés pour cacher la réalité. Pour aller vite, je dirai que cette Espagne que nous aimons visiter (de Tolède à Séville) a été forgée par la rencontre des fanatismes : le catholique et l’islamique. Les uns construisaient des cathédrales, les autres des mosquées et s’attachaient les services des meilleurs artisans pour être sûrs d’atteindre le sublime. Chaque camp voulait plaire à Dieu et impressionner ses ennemis. L’art faisait partie de la guerre sainte que les catholiques nommaient reconquista et les musulmans jihad.


Le préchi précha de la « France accueillante »


Il y a eu un métissage profond en Espagne (et c’est ce qui rend ce pays sublime) mais il a été fait dans la violence. Le pays est rempli de forteresses et de miradors, témoin de la tension extrême qui régnait entre musulmans et catholiques. Par ailleurs, les juifs d’Espagne ont souffert de la tyrannie tant des musulmans que des catholiques.  La vérité est que les Catholiques détestaient plus les juifs que les musulmans : les premiers ont été expulsés en 1492 et les autres cent ans plus tard.



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« La France n’est grande que quand elle est ouverte, accueillante, sûre d’elle-même. »


Non encore, Monsieur Attali. Pour construire le Louvre, Versailles ou le Mont Saint-Michel, la France n’a pas eu besoin de la diversité. Pour enfanter Pascal, Montesquieu ou Molière, elle n’a pas eu besoin de démanteler ses frontières. Notre-Dame n’a pas été construite pour célébrer le vivre-ensemble mais plutôt pour démontrer la cohésion nationale autour de Dieu et du message catholique.


Bien sûr que la France a participé à l’esclavage et au colonialisme. On parlera de repentance lorsque les Turcs accepteront de parler du génocide arménien et les Japonais de leur responsabilité en Asie durant la première moitié du siècle passé. De toutes façons, la culpabilité ne se transmet pas de génération en génération. Il n’y a pas de sang impur ou souillé par un crime originel. Il n’y a que des hommes et des femmes responsables de leurs actes.


Attali vit-il à la même époque que les Français?


Et la responsabilité de cette génération est de comprendre que la civilisation musulmane est portée à incandescence par l’islamisme. Elle veut en découdre et fera tout ce qu’il faut pour provoquer la bagarre. Tuer vos policiers n’est qu’une tentative parmi tant d’autres pour vous faire comprendre que vous êtes en guerre.  Et quand on est en guerre, il faut vite identifier ses amis et ses alliés. Ils sont nombreux. La France en vaut la peine mais il est sincèrement difficile de défendre un pays dont les élites stigmatisent tous ceux qui osent tirer la sonnette d’alarme.


Tout cela me rappelle ces opérateurs du radar de Pearl Harbour le matin du 7 décembre 1941 : eux aussi n’ont pas voulu croire que le danger était imminent. « Don’t worry about it » était le mot d’ordre dans la salle de commandement à Hawaï quelques minutes avant l’apocalypse. On connaît la suite.