L'opinion de Bernard Landry

L’éternel retour…

On sait depuis des siècles que le libre commerce entre les nations les avantage toutes, et constitue la meilleure façon de créer la richesse chez chacune d’entre elles.

L'opinion de Bernard Landry


Le protectionnisme est une doctrine économique simpliste, superficielle, attrayante et toujours nuisible. Elle consiste à mettre toutes sortes de barrières à l’entrée sur nos marchés de produits fabriqués ailleurs pour protéger la production locale. On se dit : plus on fabrique ici, plus il y a d’emplois et de création de richesse. Le plus étonnant c’est que cette dernière phrase est vraie en soi, à condition qu’on atteigne ces objectifs sans… protectionnisme. Sans douane, ni tarifs ni barrière, occuper son marché local parce que l’on est efficace et que le rapport qualité/prix convient aux consommateurs, est un véritable accomplissement. Chercher à y arriver par des entraves artificielles produit, hélas, des résultats inverses à ceux recherchés.
En effet, les droits de douanes sur les produits importés ont comme effet d’augmenter les prix de ces produits d’un montant égal à celui de la douane. C’est donc nous, les consommateurs, qui assumons directement les coûts de ce genre de politique. Cela, on le comprend, est grave pour l’ensemble de l’économie. À commencer pour nos producteurs locaux, qui, se sentant à l’abri de ces protections artificielles, risquent très vite de négliger l’innovation, l’efficacité et la productivité. Résultat : les concurrents étrangers plus performants finissent par les battre malgré la douane avec leurs prix plus bas. Et voilà que tout le monde a perdu.
On sait depuis des siècles que le libre commerce entre les nations les avantage toutes, et constitue la meilleure façon de créer la richesse chez chacune d’entre elles. Les plus grands économistes ont démontré que les nations ont intérêt à se centrer sur les productions où elles excellent, et acheter ailleurs les produits où les autres sont performants. Cette façon de voir, qui peut comporter des exceptions, comme en agriculture, n’est plus ni à gauche, ni à droite, elle est devenue consensuelle. Un des grands leader de gauche contemporain, le président Lulla du Brésil, est l’un de ses plus ardents défenseurs, comme le sont la plupart des Chefs d’État du monde.
Le flirt d’Obama
Comment se fait-il alors que la première puissance du monde dirigée par un nouveau président aussi progressiste que providentiel ait pu flirter avec la tentation protectionniste dans la conception de son plan de relance? En voulant privilégier à l’encontre du Québec, entre autres, l’achat de produits états-uniens.
Cela fait partie, hélas, d’une tradition du parti démocrate. Cela surprend toujours car celui-ci est généralement plus progressiste que son adversaire républicain. Cependant, c’est l’appui des syndicats états-uniens, toujours attirés par le protectionnisme, qui explique cette tendance à laquelle Obama a semblé sacrifier dans son premier projet de relance.
Ce flirt avec le protectionnisme a aussitôt déclenché une série de réactions dans le monde, dont la plus vive fut d’abord aux Etats-Unis mêmes. Les politiques et les économistes qui ont de la mémoire, ont rappelé qu’en 1930, le protectionnisme préconisé pour endiguer la crise n’avait fait que l’aggraver. En réalité, dix ans plus tard, elle n’était pas encore réglée. À cette époque, les États-uniens avaient augmenté leurs droits de douane de 50%. Ce qui fit, effectivement, baisser leurs importations du même pourcentage. Comme cela était à prévoir, les autres pays ont exercé contre eux des représailles du même ordre avec, comme résultat, une baisse de 50% des exportations états-uniennes. Ainsi, tout le monde a perdu, les consommateurs et les producteurs, aussi bien des États-Unis que d’ailleurs. Cette erreur a compromis toute reprise économique, et c’est uniquement les commandes du matériel de guerre de 1939 qui ont finalement amorcé la relance. C’est bien là, la plus tragique manière de relancer une économie!
Évidemment l’Union Européenne qui a établi entre ses vingt-sept membres une totale liberté de circulation des produits (comme des personnes) s’est immédiatement indignée. À juste titre, elle s’offusquait de voir la première puissance du monde, sensée justement être exemplaire, envisager l’application de politiques aussi rétrogrades.
Le Canada et le Québec, au premier rang des victimes potentielles, se sont vivement inquiétés. Et leurs gouvernements respectifs se sont joints au concert de protestation.
Le président Obama a donc sagement reculé et modifié son plan de relance en disant qu’il respecterait les engagements des Etats-Unis. Cela englobe l’ALENA et les règles du commerce international qui sont beaucoup plus vastes. Le résultat reste à voir, mais il y a bon espoir de ne pas voir la renaissance du protectionnisme.
C’est donc une très bonne nouvelle qui signifie que le monde a évolué depuis 1930. Dans les difficultés, il a pris des leçons qui désormais favorisent non seulement l’économie, mais aussi et surtout, la paix et la coopération entre les nations.


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