L’été, le quotidien québécois Le Devoir fait tout au plus 16 pages, dont environ deux consacrées à l’information internationale. Ce mardi 30 juillet 2019, la Russie a eu le privilège de se voir attribuer beaucoup de couverture: deux gros articles qui, ensemble, font une page complète et, en prime, un long éditorial signé Guy Taillefer intitulé: «Russie. Trouver un antidote à Poutine».
On constate immédiatement à la lecture de l’éditorial que M. Taillefer n’aime pas Poutine. Il lui trouve plein de défauts majeurs et aucune qualité. Oui, Poutine et la Russie sont un danger pour la sécurité internationale, la paix, la démocratie (avec ses fréquent espionnages des élections et des fleurons industriels de nos pays démocratiques), la liberté, et j’en passe. Tout ce que les Russes et les Chinois ont réalisé (comme chez Huawei), c’est parce qu’ils ont volé les technologies de nos entreprises comme Bombardier et SNC-Lavalin.
De la propagande
Vous le savez sûrement, mes amis, qu’il n’y a que les pays socialistes qui font de la propagande et qui ont dans leurs prisons que des prisonniers politiques qui parlent en mal du système politique et des dirigeants. Mais non, en Russie, comme à Cuba d’ailleurs, il n’y a pas de criminels (voleurs, assassins, violeurs, etc.), seulement des prisonniers politiques.
Donc, toujours ce mardi 30 juillet et dans le même journal Le Devoir, un premier article très négatif sur la Russie intitulé: «Navalny, nouvelle victime du venin russe?».
Juste le titre laisse voir que le jupon idéologique de ce respecté quotidien dépasse. Premièrement, le titre de l’article se termine par un point d’interrogation. On n’est sûr de rien, mais on pense, sans aucune preuve valable, que les dirigeants russes ont essayé d’empoisonner le dissident Alexi Navalny, comme ils l’ont fait supposément pour d’autres. Les communistes cubains utilisent la puissante arme acoustique qui a affecté uniquement, et seulement eux, les diplomates canadiens et américains. Tout de même bizarre. Là encore, pas de véritables preuves, seulement du mémérage.
Dans cet article de «conscientisation» des lecteurs, Le Devoir fait l’énumération de cinq autres personnes prétendument empoisonnées par ces dirigeants machiavéliques, pas seulement en Russie mais aussi à l’étranger, comme à Londres. Les preuves tenues et discutables sont avancées par des gens et des organismes biaisés, fendus aux pays occidentaux. On mentionne que dans certains cas, il s’agit d’empoisonnements «possibles». Quand la fin justifie les moyens...
Dans la liste des cinq martyrs supposément empoisonnés, dont un remonte à 2003, Le Devoir en a oublié un, soit Piotr Verzilov, tel que rapporté dans Le Journal de Montréal du 19 septembre 2018: «Le kremlin a voulu l’assassiner. Selon les médecins allemands, le Pussy Riot canado-russe aurait été empoisonné par une substance inconnue».
Une substance inconnue, mais on connaît le coupable.
Deuxièmement, dans le titre de l’article du Devoir consacré à Navalny, on prend la peine d’ajouter «nouvelle victime», ce qui signifie qu’il y en a eu plusieurs autres.
Et le deuxième article consacré à la Russie s’intitulait: «Russie. Plus de 650 000 signatures pour une loi contre les violences domestiques».
Dans ce texte hautement instructif, on en apprend encore une autre sur ce qui se passe dans ce méchant pays: battre les femmes est un sport national pire qu’en Arabie saoudite et aux Émirats arabes. Dans ce texte, on n'interview que quelques femmes choisies au «hasard», dans un pays de 145 millions d’habitants, et on se réfère à une douzaine de blogueuses et de militantes russes. Avec l’aide de statistiques recueillies à la volée, on conclut que: «Une femme sur trois en Russie est battue par son mari ou son partenaire», tel que mentionné par la militante démocratique russe Aliona Popova.
Encore et toujours la même cassette
Ça fait plus de soixante ans que j’entends des énormités gratuites comme ça sur la Russie et ses communistes. Et ça continue de plus belle, comme s’il y avait absolument rien de bon en Russie. Ses 145 millions d’habitants vivent un calvaire quotidien. Ils sont brimés de tout.
Écrire sur d’autres pays «exemplaires»: pourquoi pas?
On ne pourrait pas avoir à l’occasion des textes sur ce qui se passe au Brésil, au Yémen, en Lybie, au Honduras, au Guatemala et au Salvador, dont des centaines de milliers d’habitants fuient ces pays, au risque de leur vie, pour essayer d’entrer aux États-Unis. Tiens, pourquoi pas un bon article pour savoir ce qui arrive avec les 800 000 Rohingyas musulmans violés, affamés, torturés, assassinés et chassés de leur pays (la Birmanie) et qui sont «partis» dans des camps de fortune au Bengladesh depuis deux ans? Et pourquoi pas un article sur les Philippines et la Thaïlande et leur prostitution juvénile internationale ou les incarcérations et les mises à mort arbitraires en Égypte? Il me semble qu’il y a plein d’autres pays au sujet desquels le lecteur aimerait être informé.
Et ça continue
Pas plus tard que le 20 juillet dernier, un texte d’une page complète paru dans Le Devoir et intitulé: «Réseaux sociaux. Faut-il s’inquiéter de Face App? (avec toujours un point d’interrogation à la fin). L’application d’origine... russe».
Sûr et certain, si c’est d’origine russe, il faut plus que s’en inquiéter.
Ma meilleure pour la fin
Un autre article consacré à la Russie par Le Devoir et publié le 27 juillet 2019: «Royaume-Uni. La chaîne russe RT écope d’une amende pour partialité. Son traitement de l’affaire des espions empoisonnés est en cause».
Il aurait fallu accuser et condamner la Russie pour éviter l’amende. Soyons sérieux: si la chaîne d’information russe RT fait preuve de partialité, alors que fait l’Agence France-Presse à l’année longue?
J’oubliais: le 30 juillet 2019, en plus d’un éditorial et de deux articles consacrés à la Russie, il y avait aussi cette brève intitulée: «Capital One a été victime d’une fuite massive de données».
Ça affecte seulement 100 millions d’Américains et 6 millions de Canadiens. Une brève suffit. L’important est de couvrir la Russie, et quand c’est pas la Russie, on prend la direction du Venezuela de Maduro.