Québec a versé 22 millions de dollars de l’argent des contribuables à une entreprise dont le codirigeant a été arrêté trois fois par l’UPAC. Ce qui fait le plus mal, c’est que la somme a été payée pour les tableaux blancs interactifs (TBI), devenue une méchante débarque gouvernementale québécoise.
Rappelons que ces TBI ont été annoncés par le premier ministre Jean Charest en 2011. Le plan : doter toutes les classes primaires et secondaires de ces tableaux. L’investissement prévu : 240 M$ (soit l’équivalent de 30 écoles primaires), une somme qui aiderait surement Québec à remettre quelques écoles en état.
L’objectif était plus que louable : marier technologie et éducation. Malheureusement, l’aventure s’est plutôt s’est transformée en catastrophe financière et en autre dérape qui discrédite la vertu des réformes numériques pourtant nécessaires dans les institutions publiques.
La saga des TBI a vite dérapé :
- En 2012, La Presse expose que la majorité des TBI commandés par Québec sont fabriqués par l’entreprise Smart Technologies, dont le lobbyiste est un ancien membre du cabinet de Jean Charest. Le quotidien révèle que le prix moyen d’un tableau Smart est de 3458 $ alors que les produits concurrents se détaillent entre 1300$ et 3000$. Critiqués par les partis d’opposition, les Libéraux ont nié tout favoritisme et souligné que les commissions scolaires étaient autonomes de choisir le fournisseur à partir d’un appel de qualification reconnaissant plusieurs fournisseurs.
- En 2013, Le Devoir expose une étude de l’Université de Montréal qui souligne que 86 % de 800 enseignants sondés ont trouvé des désavantages au TBI. Il sert surtout à écran de télévision ou de projection, est trop petit, brise souvent et est considéré comme désuet par certains étudiants, selon l’étude.
- En 2014, Le Devoir met la main sur des extraits d’un rapport interne du ministère de l’Éducation sur la mise en place des TBI. Réalisé par la firme Raymond Chabot Grant Thornton, le rapport révèle que les TBI ont été payés plus cher que prévu et que la concurrence était faible. Il y a eu absence de reddition de compte sur l’efficacité des tableaux.
- En 2015, Patrice Bergeron de La Presse canadienne expose les conclusions d’une nouvelle étude de l’Université de Montréal sur les fameux tableaux. Québec aurait pu trouver des solutions dix fois moins chères et le plan du gouvernement de Jean Charest n’était aucunement une décision réfléchie, lisait-on. L’achat de projecteurs à un coût bien moindre aurait fait le travail selon la grande majorité des enseignants consultés dans l’étude.
Ce n’est malheureusement pas tout.
Durant la dernière année, un autre scandale a jeté de l’ombre sur le dossier.
L’UPAC a arrêté trois fois plutôt qu’une le codirigeant de la firme informatique EBR, Mohamed El Khayat. Il a été accusé de fraude et de complot à deux reprises. Puis, il a été accusé d’avoir fabriqué des documents pour sa défense devant les tribunaux. Son dossier est devant la justice.
Informatique EBR fait partie des entreprises qui ont remporté, conjointement avec d’autres firmes, un contrat de près de 100 M$ pour l’implantation des tableaux blancs interactifs. 15 entreprises étaient qualifiées pour ce contrat. Ce qu’on constate, c’est qu’EBR a récolté une grande partie de l’argent prévu.
Informatique EBR est le principal partenaire et revendeur au Québec du fabricant de tableaux blancs interactifs (TBI) Smart Technologies, «avec 84 % des parts de marché de vente», pouvait-on lire sur le site internet d’EBR.
Entre 2012 et décembre 2015, le contrat du gouvernement du Québec avec les 15 entreprises a coûté 56 M$ des 100 M$ prévu. Sur les 56 M$, Informatique EBR a touché 22 M$, peut-on lire dans une réponse gouvernementale à la suite d’un demande d’accès à l’information adressée au Centre des services partagés du Québec.
Ce 22 M$ est le plus important contrat accordé à EBR par Québec, puisqu'entre 2009 et 2014, l'entreprise a obtenu 130 autres contrats totalisant près de 17 M$.
Après Mohamed El Khayat, le vice-président d’Informatique d’EBR Jean-François Robidas a aussi été arrêté par l’UPAC. En mai dernier, Informatique EBR a fermé ses portes. L’entreprise ne valait plus un sou.
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