FÉDÉRALES 2021

«Le Canada à la recherche d’une identité internationale»: un Canada isolé du monde?

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Le multiculturalisme nuit à la politique étrangère canadienne


Ces jours-ci, le prompt rétablissement du régime des talibans en Afghanistan, après le retrait des troupes américaines, qui avaient, entre autres avec celles du Canada, combattu ce régime autocratique musulman, défendu avec violence de 1996 à 2001, interpelle la communauté internationale. Jocelyn Coulon, chercheur québécois en politique étrangère, estime que la reconfiguration du monde redéfinit notre rôle dans le maintien de la paix.


Mais est-ce une raison pour mettre au rancart la tradition onusienne du maintien de la paix depuis l’intervention armée de Casques bleus proposée en 1956 par Lester B. Pearson, futur premier ministre du Canada de 1963 à 1968, après la nationalisation par l’Égypte du canal de Suez contre la volonté du Royaume-Uni, de la France et d’Israël ? Certainement pas, selon Coulon (né en 1957).



Un puits de sagesse


Dans Le Canada à la recherche d’une identité internationale, préfacé par son confrère Stéphane Roussel, le chercheur reproche aux gouvernements libéraux de Paul Martin et de Justin Trudeau ainsi qu’au gouvernement conservateur de Stephen Harper d’avoir délaissé, entre 2004 et 2020, la tradition typiquement canadienne instaurée par Pearson. Grâce à celle-ci, le pays était, sur la scène planétaire, perçu, dit Coulon avec acuité, comme « un puits de sagesse dans un monde chaotique et cruel ».


Mais nos libéraux aussi bien que nos conservateurs ont préféré à l’internationalisme, cher à Pearson, le continentalisme par l’attachement au voisin états-unien.


Le chercheur y voit « la construction d’une forteresse nord-américaine » trop exclusive. Le mal de notre classe politique, ajoute-t-il, se résume « à plaire à différentes communautés culturelles ou groupes de pression afin d’engranger des succès électoraux au lieu de garder le cap sur le seul intérêt national ».


Coulon donne l’exemple du lien de l’actuel premier ministre libéral avec la population d’origine sud-asiatique, importante dans 25 circonscriptions électorales.


Il écrit : « Pas étonnant que Trudeau se soit fait photographier pendant huit jours avec tout ce que l’Inde compte de religieux, d’acteurs et de danseurs », lors de son fameux voyage costumé !


La libérale Chrystia Freeland, d’ascendance ukrainienne par sa mère et aujourd’hui ministre des Finances, reflète l’hostilité des Canadiens de souche ukrainienne envers Moscou. Ce sentiment, explique le chercheur très doué, « va à l’encontre de la défense de nos intérêts nationaux » liés à la proximité canado-russe dans l’Arctique, « enjeu militaire, économique et environnemental de premier ordre ».


L’électoralisme est, pour le sage Coulon, « le plus grand problème de notre politique étrangère ».


Le Canada devient incapable de se faire élire au Conseil de sécurité de l’ONU. L’époque où Pearson, pour son attitude constructive lors de la crise de Suez, recevait en 1957 le prix Nobel de la paix, apparaît bien révolue.



Le Canada à la recherche d’une identité internationale


★★★ 1/2

Jocelyn Coulon, PUM, Montréal, 2021, 216 pages




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