Nous avons fait le choix de la division. Nous avons fait le choix de vivre
selon des bases individuelles et régionales. Nous avons fait le choix de
l’égoïsme. Nous avons fait le choix de rejeter l’autre. Nous avons fait le
choix de brûler les ponts. Nous avons fait le choix de briser les liens.
Nous avons fait le choix des ghettos politiques. Nous avons fait le choix
de l’esprit de clochers. Nous avons fait le choix de la suspicion. Nous
avons fait le choix de vivre chacun dans sa bulle. Nous avons fait le choix
de la survivance. Nous avons fait le choix de l’aliénation. Nous avons fait
le choix de l’enfermement. Nous avons fait le choix du cynisme. Tristes
choix.
Il apparaît plus que jamais que nous sommes incapables d’exprimer une
volonté de vivre ensemble. Il apparaît plus que jamais qu’il nous est
difficile de définir un projet de société rassembleur. Il apparaît plus que
jamais que nous acceptons notre sort d’éternels quêteux, de mendiants et de
colonisés. Il apparaît plus que jamais que nous nous contentons de notre
dépendance envers Ottawa. Il apparaît plus que jamais que notre nation
accepte sa soumission à la nation étrangère canadienne. Il apparaît plus
que jamais que nous acceptons que notre Assemblée Nationale soit
subordonnée au Parlement canadien. Il apparaît plus que jamais que nous
acceptons que notre destin collectif soit déterminé par le gouvernement
centralisateur du Canada. Il apparaît plus que jamais que nous avons peur
de nous prendre en mains. Il apparaît plus que jamais que nous avons peur
de la liberté. Douloureux constats.
Pourtant... au-delà du racisme, de la xénophobie, de l’intolérance, nous
formons toujours la seule nation française de l’Amérique du Nord capable de
se donner un pays. Le projet d’indépendance du Québec se porte toujours
bien. Les réelles raisons de vouloir construire le pays du Québec sont
toujours présentes; raisons identitaires, culturelles et linguistiques. La
nécessité de nous affranchir d’un état d’annexion qui nous condamne à la
minorisation grandissante, à l’acculturation et à l’assimilation lente et
progressive demeure bien réelle. La liberté politique, culturelle et
économique demeure toujours aussi urgente. Dans un monde mondialisé,
l’indépendance du Québec s’avère toujours essentielle afin que nous
puissions participer pleinement au concert des nations libres. Sans voix
propre à l’international, nous ne pouvons contribuer efficacement aux
importantes luttes contre les changements climatiques, le capitalisme
sauvage, la pauvreté, les inégalités sociales, l’uniformisation culturelle
et la guerre. Observations porteuses d’espoir.
Ainsi, il nous appartient collectivement de construire de nouvelles
solidarités. Nous devons redéfinir nos rapports, canaliser nos énergies et
nous efforcer à la construction d’une volonté réelle de vivre ensemble,
d’un véritable projet de société.
Quant à nous, indépendantistes, nous devons continuer le combat en faisant
preuve d’une nouvelle unité bâtie autour du nécessaire renforcement de
notre discours. Nous devons recentrer ce dernier sur son essence
fondamentale. La pertinence de notre projet réside sur le fait que nous
formons une nation dont l’identité est plus que jamais menacée par notre
statut de minorité enfermée dans l’ensemble canadien anglo-saxon, que notre
peuple conquis en 1760 ne possède toujours pas les pouvoirs nécessaires à
son plein épanouissement et qu’Ottawa pratique toujours une politique
impérialiste étouffante à l’endroit du Québec. Nous devons reprendre le
bâton du pèlerin afin de propager notre idéal de libération nationale. Nous
devons nous mobiliser afin de persuader nos concitoyens de l’urgence, pour
notre nation, d’exercer sa pleine liberté. Que cette liberté collective
s’avère aussi importante que la liberté individuelle. Nous devons les
convaincre que l’indépendance du Québec constitue le seul projet de société
pouvant assurer la pérennité de notre nation française en Amérique du Nord.
Il nous appartient de tout faire pour créer le pays du Québec, même si cela
implique un changement de stratégie. La concrétisation de notre idéal
dépend de nous tous. Il n’y a pas plus beau combat que celui mené pour la
liberté.
Éric Tremblay, avocat
-- Envoi via le site Vigile.net (http://www.vigile.net/spip/) --
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1 commentaire
Jean Pierre Bouchard Répondre
27 mars 2007Bon texte qui fait ressortir un angle négatif dominant qu'on ne peut esquiver. Notre rapport identitaire à nous mêmes en 2007 est encore malsain. C'est un sujet délicat qu'un auteur comme Gérard Bouchard connaît bien. Une première idée classique me vient en tête, entre 1960 et 1970 notre rupture à la pratique de la religion catholique à t'elle été trop forte et rapide?
Dans les régions, l'image mentale entre le Canada français et la foi catholique est comme resté incrusté dans l'inconscient collectif particulièrement le long de la vallée du St Laurent autour du centre du Québec? La pratique catholique aurait suscité dans notre moi collectif une mentalité à la fois homogène et tranquille trouvant dans le mode de l'humilité une forme d'être?
Si nous sommes seulement encore trop captifs de l'effet colonial et d'anciennes valeurs religieuses persistantes inadaptés à une action individuelle plus intense comme à la construction d'un État nation. C'est un vrai problème structurel. Ce conservatisme qui s'exprime de nouveau comme avant l'élection de repositionnement en 1970 ne peut être sans source.