Les crises de Jean Charest

Chronique de Patrice Boileau


Elles surviennent toujours en réponse à des situations bien précises. Elles sont donc archi prévisibles. Le ton employé, le choix des mots ainsi que le faciès grincheux reviennent inlassablement. Le spectacle relève dorénavant de la caricature. Bref, les montées de lait du premier ministre du Québec n’impressionnent plus personne.
Car on aimerait bien que le chef du Parti libéral du Québec s’énerve pour les vraies raisons. Il est plutôt suspect en effet de le voir crier d’effroi lorsqu’il est uniquement question d’améliorer le sort de la nation québécoise au sein de la fédération canadienne. Pourquoi effectivement hurler, alors que le Parti québécois veut rapatrier d’Ottawa des pouvoirs indispensables pour protéger sa différence, dans le Canada?
Jean Charest accuse sa rivale Pauline Marois de n’avoir aucune crédibilité pour négocier quelques réformes que ce soit, puisqu’ultimement, la formation politique qu’elle dirige a comme objectif final de réaliser l’indépendance du Québec. Fort bien. Le député libéral de Sherbrooke peut-il alors nous expliquer son incapacité de mener à bien une seule revendication traditionnelle du Québec, alors qu’il est un fédéraliste exemplaire? Même à genoux devant l’État canadian, le premier ministre du Québec fait face à une porte close à Ottawa. Voilà assurément pourquoi le chef du PLQ camoufle maladroitement son incurie en répétant stupidement que « le fruit n’est pas mûr. » La vérité est qu’il ne demandera rien au gouvernement fédéral parce que ses requêtes demeureront lettre morte.
L’impasse politique que le premier ministre du Québec redoute, si le Parti québécois devait s’emparer du pouvoir, est en réalité bien en place. Après le refus de Stephen Harper d’enrober le statut de nation de quelques pouvoirs nouveaux, ce fut en effet au tour de Michael Ignatieff d’annoncer qu’il n’accorderait rien de plus au Québec. Cosmétique est le récent statut octroyé aux Québécois, qu’on se le dise! La douche d’eau froide que le chef du PLC a déversée sur le Québec la semaine dernière devait indigner Jean Charest. Apprendre en effet de la bouche des chefs des principaux partis canadians qu’on a manqué de respect envers le Québec, commandait une vive riposte. Elle n’est jamais venue.
Robert Bourassa n’a pas manqué de le faire, lorsque le Canada anglais a torpillé l’accord du Lac Meech en 1990. Son discours solennel à la télévision, dès le lendemain de l’humiliante rebuffade, avait redonné une dignité perdue aux Québécois. Certes, l’homme a fait dans son froc par la suite. Mais ils ont été peu nombreux au Québec à vouloir l’imiter et s’effondrer. Encore aujourd’hui, à la lumière des derniers sondages, une majorité de Québécois s’opposent fermement au statut quo constitutionnel.
L’actuel chef de l’État québécois est lui aussi un bon fédéraliste. Mais il est de plus docile. En fait, il est totalement soumis aux diktats d’Ottawa. L’homme accepte son rôle de petit vassal de province qui partage avec sa clique les miettes qu’on lui consent. Pas de projets d’envergure à l’horizon. Le gouvernement libéral dérive ainsi paisiblement, au gré des décisions des autres. Assurément, les Québécois sont vernis d’être sous la direction d’un « Grand Bâtisseur. »
Jean Charest est comblé d’être à la tête d’une province comme les autres. C’est pourquoi ses colères sont si intenses lorsqu’on tente de troubler sa quiétude. Il est plutôt humiliant en effet de se faire rappeler ses responsabilités historiques. Assumer pareilles obligations exige effectivement du courage : celui de se tenir debout devant ceux qui agissent de manière à banaliser l’existence de tout un peuple. Une hardiesse donc qui est susceptible à l’occasion de faire des vagues. Ainsi, dès qu’il est question d’agir pour améliorer la protection légale de langue française ou encore d’intervenir de manière à propager la culture qu’elle alimente, le chef du PLQ se crispe. Idem lorsqu’il est projeté de doter le Québec d’une meilleure représentation dans les instances étrangères.
Manifestement, le courroux du député de Sherbrooke la semaine dernière, en réaction à l’annonce du plan de Pauline Marois, montre à quel point l’homme est petit. Traiter de pyromanes les collaborateurs politiques de la chef du Parti québécois n’était pas la trouvaille du siècle. Le premier ministre du Québec est-il éteint au point de redouter qu’on l’allume? Est-il sinon le seul à être autorisé de s’enflammer, lorsqu’il faut cependant sauvegarder l’unité canadian?
Le feu sacré qui guide Jean Charest est uniquement celui qui sert ses intérêts partisans. Ainsi, l’homme n’a pas hésité à humilier tous les Québécois lorsqu’il a décidé d’imposer de folles baisses d’impôt à même un transfert du gouvernement fédéral en 2007. Au diable la réputation du Québec aux yeux du Canada! Seuls les calculs électoraux importent pour le chef du PLQ. Tout comme celui qui a conduit à sa réélection en décembre dernier. Peu importe la santé démocratique du Québec ainsi que le lien de confiance entre la société civile et ses institutions politiques! Quel comportement disgracieux!
C’est à croire que les incendiaires logent plutôt du côté du PLQ. Car à force de se rire de la population, le gouvernement libéral risque de l’embraser. La démission politique de Jean Charest finira en effet par enflammer les gens. Si le fruit n’est jamais mûr, aux yeux du premier ministre, c’est qu’il n’a toujours pas osé semer. Peut-être est-ce parce qu’il craint trop de voir pousser des racines qui en évoqueront d’autres : celles qu’il tente de faire oublier aux Québécois.
Patrice Boileau




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2 commentaires

  • Archives de Vigile Répondre

    29 juin 2009

    Il est certain que toutes les attitudes de notre premier ministre sont tracées à l'avance par son équipe de marketing.
    Les réactions de la population vieillissantes qui s'approvisionnent à la sauce RDI et LCN, parce que ces canaux d'informations assurent une présence qui donnent à ces gens une impression d'être à l'affût et au courant, ont été analysées et tous les faciès de notre frisoté défrisant sont calculées en fonction d'agir sur ces gens qui sont et deviennent la majorité silencieuse qui conforte sa présence au gouvernement.
    Mario Dumont avait évoqué lors d'un tout le monde en parle, les budgets énormes dirigées vers ces maisons de marketing. Rappelez-vous le " look at my lips" de Bush, père. Les gens réagissaient fortement à cette phrase.
    Tous les gestes, postures, attitudes, réactions, voix calme, colère, sont mesurés et provoquent les réactions calculées.

  • Archives de Vigile Répondre

    23 juin 2009

    Monsieur Boileau,
    vous décrivez bien ce qu'est Jean Charest, ce petit minus de premier ministre. Jamais le Québec n'a connu un premier ministre si nul, incompétent, traitre, destructeur, hypocrite, menteur, de bas étage, irrespectueux, manipulateur, baveux, démagogue, vomitif, tapis, lèche-cul, sans-coeur, sans jugement...et j'en oublie sûrement. Ce que je n'arrive pas à m'expliquer, est comment se fait-il que le peuple du Québec se fait diriger par ce triste individu? Le peuple québécois est-il suicidaire à ce point? Bush ou Charest= la même catastrophe!