Les culottes à Mario

Hérouxville - l'étincelle


Aux élections de 2003, quand il s’est cru pour un instant proche d’occuper le siège du Premier ministre, Mario Dumont s’est donné un programme aussi précis que controversé, qu’il a passé la campagne électorale à devoir le défendre et qui est vite devenu un boulet. Cette fois, il semble vouloir tomber dans l’excès inverse.
L’ADQ est, disent certains sondages, en nette remontée ces jours-ci, essentiellement à cause de la position de son chef sur les accommodements raisonnables. Sauf que vous aurez le plus grand mal à trouver une véritable position de l’ADQ sur la question, à part quelques formules choc et un grand cri du cœur.
Le tout a commencé le mois dernier par la publication d’une lettre ouverte aux Québécois sur la question des accommodements raisonnables, où M. Dumont multipliait les gros mots : dans ce dossier, les Québécois «courbaient l’échine quand ils devraient avoir le menton bien droit» et leurs leaders politiques – à part lui, bien évidemment – faisant preuve d’«aplaventrisme».
Évidemment, quand un problème est aussi grave, il est évident que les dirigeants politiques doivent offrir des solutions. Celle de M. Dumont était de préparer une constitution québécoise, l’exercice le plus long, le plus compliqué et le plus détaillé auquel peut se livrer une société. Il n’y a rien de concret ou de précis pour un avenir prévisible dans une telle suggestion. Une constitution, ça ne règle rien si on ne sait pas ce qu’on va mettre dedans.
Quand on va plus loin avec M. Dumont, on a, encore le même refus de s’engager. Ainsi, je l’ai interrogé à Télé-Québec, trois jours après avoir publié sa lettre ouverte. J’ai voulu savoir ce qu’il proposait concrètement.
Changerait-il la Charte québécoise des droits et libertés, pour y ajouter ou soustraire des éléments? Non.
Aurait-il utilisé la clause «nonobstant» de la Constitution pour se soustraire à la décision de la Cour suprême autorisant le kirpan à l’école? Non, même si la décision a été «le début d’une dérive», estime-t-il.
Interdirait-il le foulard islamique dans les écoles? Encore non. «Si on interdit le foulard, il faudra interdire d’autres symboles», disait-il.
Serait-il pour une loi sur la laïcité de l’espace public, comme le proposent certains? Non, dans sa lettre ouverte, il affirmait que les valeurs des Québécois «s’inspirent en premier lieu de notre tradition religieuse».
Même confusion quand est arrivé le code de vie d’Hérouxville. M. Dumont comprend le cri du cœur des élus de cette petite ville, il n’est pas choqué par le code de vie proposé, mais pense que ce n’est pas dans cette voie qu’il faut aller.
Bref, à part d’inviter les autres dirigeants politiques à «mettre leurs culottes», on se rend compte que l’ADQ et son chef n’ont rien de précis à proposer sur les accommodements raisonnables. En fait, M. Dumont fait du surf sur une grosse vague d’émotions et de mécontentement, mais il n’a pratiquement rien de très précis à proposer.
Le débat est sans doute très rentable pour l’ADQ et M. Dumont à l’approche d’une campagne électorale, mais il s’agit de la forme la plus détestable de populisme : parler d’un sujet qui suscite les passions, accuser les autres de mollesse, mais sans proposer quoi que ce soit de concret.
On pourrait penser que l’affaire des accommodements raisonnables n’est qu’une sorte de dérapage, mais M. Dumont a aussi montré le même genre d’opportunisme dans un autre dossier, celui des conseils d’agglomération qui ont suivi les défusions municipales.
M. Dumont a un parcours bigarré sur la question des fusions municipales : il était contre les fusions sur l’ensemble du territoire, mais pour à Montréal. Il a eu Pierre Bourque, le père du concept, comme candidat-vedette lors de la dernière campagne et, aujourd’hui, il se range du côté des villes défusionnées pour abolir les Conseils d’agglomération.
Or, ces conseils d’agglomération sont un élément essentiel des lois qui ont permis les défusions : ils constituent le mécanisme par lequel il est possible de maintenir une certaine équité fiscale entre les villes-centre et les villes défusionnées. À moins de renoncer complètement à l’objectif d’équité fiscale, on ne peut pas les abolir sans les remplacer par un autre mécanisme visant à maintenir un minimum de redistribution des revenus. Mais à l’ADQ on va abolir d’abord et posera des questions ensuite.
Encore une fois, l’ADQ dénonce ce qui est vu comme un irritant pour bien des citoyens, mais n’a aucune solution à apporter au problème. «L’ADQ entend abolir les conseils d’agglomération et redonner l’autonomie aux villes à travers des solutions politiques et fiscales qui permettront à toutes les villes de se développer de manière harmonieuse», disait le communiqué de l’ADQ publié le mois dernier.
Et dire que M. Dumont aime à dénoncer la langue de bois de ses adversaires!


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