Les Québécois méritent mieux que ça

Les électeurs québécois ont prouvé qu’ils supportent mal les politiciens corrompus. Cela permet d’espérer.

Maclean's - corruption Québec



La semaine dernière, Maclean’s consacrait sa une à un article sur la politique au Québec intitulé “La province la plus corrompue du Canada.” Dans une chronique qui accompagnait l’article, Andrew Coyne prédisait que notre travail, tout comme la majorité des critiques de la société québécoise issues de l’extérieur de celle-ci, serait dénoncé par la classe politique de la province comme du “Québec bashing” (dénigrement systématique du Québec).
Il avait vu juste. L’article a été attaqué avec virulence par tous les politiciens qui se sont trouvés à proximité d’un microphone. Le chef du Bloc Québécois, Gilles Duceppe, a traité l’article de “xénophobe.” Le président de la Société Saint-Jean-Baptiste de Montréal, un organisme souverainiste, l’a décrit comme “haineux et diffamatoire.”
Le premier ministre du Québec, Jean Charest, qui venait tout juste de témoigner devant une commission d’enquête sur la corruption, nous a envoyé une lettre pour exiger que nous présentions nos excuses aux Québécois. Le chef libéral Michael Ignatieff a fait chorus, selon toute apparence sans avoir lu l’article.
En toute justice, reconnaissons que certains de nos critiques ont prêté une oreille attentive à nos propos sur la corruption politique au Québec. Certains ont nié l’existence de toute base objective permettant de décerner à la province le titre de pire délinquante au Canada. Il y a aussi de la corruption dans les autres provinces, ont-ils fait valoir; peut-être le Québec réussit-il simplement mieux qu’elles à mettre à jour les méfaits commis en son sein.
Il est vrai que nous ne disposons pas de données statistiques démontrant sans l’ombre d’un doute que le Québec constitue un cas isolé au Canada. Mais cela ne veut pas dire que nous devons suspendre tout jugement. Les preuves sont abondantes: les scandales succèdent aux scandales à tous les paliers de gouvernement dans la province. Chaque fois, ce n’est pas seulement à un ou deux mauvais éléments que l’on a affaire, mais bien à une corruption systémique. Au cours des cinq dernières années, nous avons connu le scandale des commandites, avec accusations de fraude, peines de prison et naufrage du Parti libéral du Canada. Des rumeurs ont couru sur la fixation des prix dans les grands chantiers de travaux publics à Montréal, tandis que des éléments mafieux donnaient au maire Gérald Tremblay des raisons de craindre pour sa sécurité. Enfin, tout récemment, d’innombrables allégations crédibles dirigées contre le gouvernement du premier ministre Jean Charest ont fait état de tours de passe-passe dans le financement des campagnes électorales ainsi que de trafic d’influence.
Oui, il y a de la corruption politique dans chaque province et dans chaque parti. Il y en a chez les anglos, chez les fédéralistes, et même chez les néo-démocrates. La question n’est pas là. Seul le Québec s’est trouvé aux prises pendant cette période avec une aussi riche collection de situations embarrassantes. Il importe de souligner qu’aucun de nos critiques n’a présenté de raisons valables pour attribuer à une autre province le titre de dernière de classe.
Une fois que se sont tues les bruyantes protestations des politiciens offensés ou simplement opportunistes, des voix plus réfléchies ont reconnu la validité de nos arguments. La Presse, principal quotidien grand format de la province, a jugé “indéniable” notre affirmation selon laquelle le Québec a connu un nombre de scandales plus élevé que le reste du Canada. Pourquoi en est-il ainsi? Cette question, concluait La Presse, [“il y a longtemps que nous aurions dû nous la poser.”->30920]
Le chroniqueur politique Vincent Marissal, quant à lui, écrivait : “Je ne vois rien d’inexact ni même d’exagéré. Tous les médias québécois ont tiré de telles conclusions ces derniers mois.” Lorsque la télé de la CBC s’est mise en quête de réactions du public, elle a trouvé essentiellement des gens qui admettaient l’exactitude de nos propos. “C’est triste, mais ça pourrait bien être vrai,” a déclaré d’un air sombre un passant qui commentait le classement attribué à sa province.
Le Québec a bel et bien un problème. Son système politique ne répond plus aux attentes de sa population.
Mais soyons clair: il s’agit là d’un problème politique, qui met en cause les politiciens et la culture politique de la province, mais non son caractère ou sa population. Dans sa lettre, le premier ministre Charest prétend que nous avons décrit les Québécois comme “génétiquement incapables d’agir avec intégrité.” Comme toutes les accusations de “Québec bashing,” celle-ci n’est pas seulement fausse, elle est aussi mesquine, dans la mesure où l’ensemble des citoyens se trouve ainsi mêlé aux agissements des politiciens et de leurs petits copains. La population du Québec a déjà bien assez de devoir tolérer la corruption au sein des charges publiques—elle n’a pas à en être éclaboussée par la même occasion.
Les électeurs québécois ont prouvé à maintes et maintes reprises qu’ils supportent mal les politiciens corrompus. Ils ont souvent montré la porte à des gouvernements entachés par le scandale. C’est là une source d’optimisme quant à l’avenir de la culture politique au Québec. Autre source d’espoir: la vigueur du journalisme d’enquête dans la province. Une bonne partie des irrégularités que nous décrivions dans notre article a aussitôt fait l’objet d’enquêtes et d’exposés dans les quotidiens et les journaux télévisés.
Si la population et la presse du Québec continuent d’exiger de la part des élus les plus hauts standards de déontologie et de probité, les choses changeront. Nous croyons sincèrement que les Québécois méritent mieux que la situation actuelle.
Une remarque pour finir. L’utilisation que nous avons faite de Bonhomme Carnaval sur notre couverture a également soulevé beaucoup d’indignation. Henry Aubin, chroniqueur au quotidien montréalais The Gazette, nous a par exemple accusés d’avoir transformé la populaire mascotte en un “symbole de corruption.” Nous la trouvons plutôt forte, sachant à quel point les artistes francophones, au cours des années, ont utilisé Bonhomme à des fins satiriques ou l’ont fait figurer dans des caricatures politiques. Comme tous les Canadiens, Maclean’s reste un fervent défenseur du Carnaval de Québec et de la grande tradition québécoise d’hospitalité qu’il représente.
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We believe Quebecers deserve better, and they seem to agree
Quebec voters have proven they have little patience for corrupt politicians. That is cause for hope.
by the editors on Wednesday, September 29, 2010 3:30pm - 8 Comments

Last week, Maclean’s ran a cover story about politics in Quebec entitled, “The most corrupt province in Canada.” In an accompanying column, Andrew Coyne predicted that our work, like most criticisms of Quebec society coming from outside the province, would be attacked by its political class as “Quebec bashing.”
Quite so. The story was loudly and stridently denounced by every politician within reach of a microphone.
Bloc Québécois Leader Gilles Duceppe claimed the story was “xenophobic.” The head of the sovereignist organization Société Saint-Jean-Baptiste de Montréal called it “hateful and defamatory.”
Quebec Premier Jean Charest, fresh from his appearances before a corruption inquiry, sent us a letter demanding that we “apologize to Quebecers.” Liberal Leader Michael Ignatieff joined the chorus apparently without having read the article.
In fairness, some of our critics did give serious attention to our argument about political corruption in Quebec. Some denied any empirical basis for proclaiming Quebec the worst offender in Canada. Other provinces, they noted, have corruption—maybe Quebec is simply better than other provinces at exposing its own malfeasance.
It’s true that we lack a statistical database to prove beyond a shadow of a doubt that Quebec is an outlier among the provinces. But that does not mean we are required to suspend all judgment in the face of a preponderance of evidence—scandal after scandal at every level of government in the province, all of them involving not just one or two bad actors but systemic corruption. In the last five years we’ve seen the sponsorship calamity, with all its fraud charges and jail sentences and sinking of the Liberal Party of Canada; reports of price-fixing in Montreal public works projects, not to mention Mob influences that had Mayor Gérald Tremblay fearing for his safety; and most recently the myriad credible allegations of campaign finance chicanery and influence peddling aimed at the government of Premier Charest.
Yes, there is political sleaze in every province and party. Anglos do it, federalists do it, even NDPers do it. That’s not the point. No province but Quebec has managed such a comprehensive litany of embarrassments over the same period of time. It’s worth noting that none of our critics has mounted a credible case that any other province better deserves the title of worst in class.
Once the initial din of wounded and opportunistic politicians subsided, more thoughtful voices acknowledged the substance of our arguments. La Presse, the province’s leading broadsheet, wrote that our claim that Quebec has a higher number of scandals is “undeniable.” As to why: “We should have been asking ourselves this question a long time ago.”
Political columnist Vincent Marissal said: “I don’t see anything that’s inaccurate or exaggerated. Every Quebec media outlet has drawn similar conclusions in recent months.” When CBC TV went looking for public reaction to the Maclean’s cover in Montreal, it mostly found people who admitted that what we said is correct. “It’s sad. But it could be true,” noted one glum-looking man on the street, about his province’s standing.
Quebec does have a problem. Quebec’s political system is failing its people. But let’s be clear about this: it is a political problem, and a reflection on the province’s politicians and its political culture, not a condemnation of the character of the province or its people. Premier Charest’s letter to this magazine claims that we said “Quebecers are genetically incapable of acting with integrity.” Like all of the “Quebec-bashing” allegations, that is not only false but cheap in that it implicates the citizenry in the misdeeds of the politicians and their cronies. It is bad enough that the people of Quebec have to put up with corruption in public office—they shouldn’t be smeared by it as well.
Quebec voters have proven time and again they have little patience for corrupt politicians—frequently tossing out governments tainted by scandal. That is cause for optimism for the future of the province’s political culture. Another ray of hope is the robust state of investigative journalism in the province. Much of the iniquity we described in our article was diligently probed and exposed in newspaper and broadcast reports.
If Quebec’s people and its press continue to expect the highest standards of ethics and probity from public officials, change will come. We sincerely believe Quebecers deserve better.
One final note. Additional outrage has followed our use of the Quebec Winter Carnival’s Bonhomme on our cover. For instance, Henry Aubin, columnist for the Montreal Gazette, said we had turned the popular mascot into a “symbol of sleaze.” This strikes us as a bit rich, given that francophone artists over the years have used and abused Bonhomme in an array of satires and political cartoons. Like all Canadians, Maclean’s remains a strong supporter of the Carnival and the great tradition of Quebec hospitality it represents.


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