En 2005, 61 % des maires et conseillers ont été élus sans opposition. Aux dernières élections, on comptait moins de 13 000 candidats pour un total de 8078 postes à pourvoir dans 1104 municipalités
Si la course à la mairie de Montréal suscite un large engouement en dépit - ou en raison - de la commission Charbonneau, il n’en est pas de même dans les autres municipalités du Québec, où les candidats se font rares.
« Il faut valoriser cette fonction-là avant les prochaines élections, sinon les gens de qualité ne viendront pas », exprime un candidat cité sur une base anonyme dans un rapport commandé par le ministère des Affaires municipales, des Régions et de l’Occupation du territoire. Ce rapport, dont Le Devoir a pris connaissance, visait à « orienter la campagne de communication » du MAMROT, et ce, « dans un contexte où certaines municipalités manquent de candidats aux élections municipales ».
La firme de recherches et de sondages SOM, qui a réalisé des entrevues avec une trentaine d’élus et de candidats potentiels, constate que la « perception négative de la politique municipale, particulièrement dans le contexte de la commission Charbonneau » constitue un « frein » à l’engagement des candidats à la mairie.
« Le contexte actuel de la commission Charbonneau teinte fortement la politique municipale d’une mauvaise réputation. Cela dit, plusieurs affirment que, même avant ces événements, la politique municipale était soit négligée, soit mal vue. »
La commission Charbonneau peut également agir, jusqu’à un certain point, comme un levier pour attirer des candidats qui « se voient comme des personnes intègres », notamment des femmes.
« Alors que les citoyens ont l’impression que tous les élus manquent de scrupules, les candidates potentielles trouvent que cette réputation négative est une motivation supplémentaire à se présenter aux prochaines élections ; voilà une occasion de faire sa marque en politique municipale. »
6 maires en accusation sur 1113
À l’Union des municipalités du Québec, on s’inquiète également du faible engouement pour les postes de maires et de conseillers, des fonctions qui sont « dévalorisées » selon son président, Éric Forest. « Il y a 6 maires en accusation sur 1113, [soit 0,5 %], mais ça occupe tellement l’espace que, dans la perception populaire, ça a un impact », explique-t-il en entrevue.
Bien qu’il reste encore cinq mois pour l’annonce des candidatures, il perçoit déjà une tendance qui est plutôt de mauvais augure pour plusieurs municipalités. « Ce qui est clair cette année, ce que je sens, c’est qu’il y a un nombre impressionnant de collègues qui ne se représentent pas […] J’ai hâte de voir les statistiques d’une année par rapport à l’autre, mais il y en a plusieurs qui ne se représentent pas. »
Il ne veut pas lier directement cette désaffection à la seule commission Charbonneau, mais estime que c’est « un ensemble », parlant d’un environnement fiscal et financier particulièrement difficile, de tâches et de responsabilités accrues et scrutées à la loupe.
50 % des maires élus sans opposition
La situation n’était déjà guère réjouissante ces dernières années. En 2005, 61 % des maires et conseillers ont été élus sans opposition. Aux dernières élections, on comptait moins de 13 000 candidats pour un total de 8078 postes à pourvoir dans 1104 municipalités. La moitié des maires ont été élus sans opposition. Il arrive même, bien que ce ne soit « pas la majorité » des cas, qu’on ait de la difficulté à trouver un seul candidat, note Éric Forest.
« Ça arrive plus souvent dans les plus petites municipalités », observe-t-il, précisant que, dans 65 % des municipalités, ce sont des candidats indépendants qui se présentent. Non seulement la relève est mieux assurée et il y a de l’opposition dans les villes qui disposent de partis politiques, mais les candidatures se font également plus rapidement, comme en témoigne présentement l’exemple de Montréal où les annonces se multiplient depuis quelques semaines.
« On ne sent pas ça actuellement dans les autres villes, affirme Éric Forest. Je ne sens pas cette fermentation-là, et ce, pour deux raisons. La première, c’est que les autres villes n’ont pas été dans l’espace médiatique comme Montréal et Laval. Et de deux, les gens qui vont présenter des candidatures indépendantes, on va les voir poindre davantage au mois d’août qu’au mois de juin. En ce moment, à Montréal, il y a comme un vacuum qui fait que tout le monde essaie de placer ses billes. »
Éric Forest estime qu’il est nécessaire de passer à travers cette étape de la commission Charbonneau qui ternit encore un peu plus la réputation des politiciens municipaux. Il espère que la population va décider de s’impliquer pour faire le ménage plutôt que d’abdiquer. « On est dans une période charnière. On n’a pas le choix, il faut qu’on prenne en main notre gouvernance. »
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