Ici même au Québec, nous avons entrepris un débat de longue haleine concernant les accommodements raisonnables. A priori, nous avons mis l’accent sur les prépositions déraisonnables de quelques accommodements accordés à des minorités sur la base de valeurs religieuses. À l’origine, l’ADQ en a fait une profession de foi citoyenne : aujourd’hui, nous sommes prêts à soumettre la population à un genre d’auto-da-fé public pour défendre ce qui est, à la rigueur, indéfendable du point de vue de la citoyenneté québécoise.
Avant de s’étendre sur le vif du sujet, en se référant à ce qui ressort clairement des débats publics, la laïcité de l’État québécois est une donnée fondamentale qui régit le contrat social en vigueur. Par opposition à un modèle de multiculturalisme « nation building canadiAn », l’inter - culturalisme québécois définit la particularité propre à notre contrée. Dès lors, la clause nonobstant devient une alternative légitime, pour autant qu’on s’en soucie, afin de contrebalancer les aléas de la Charte canadienne des droits et libertés et les avis émis par la Cour suprême.
L’administration actuelle aura beau prétexter que le sexisme et l’âgisme n’ont de raison d’être, les raccourcis historiques empruntés touchent le nœud gordien des aspirations québécoises quant à la constitution de l’identité nationale. En se montrant tout aussi louvoyant du sens de la citoyenneté québécoise à adopter sur les terres mêmes de nos lieux d’habitation, le Parti libéral du Québec (PLQ) déclenche la bourrasque de la dépossession nationale qui afflige le Canada français depuis la Conquête. Cela pourrait même être le sujet de quelque révolution prochaine.
De la manière que Christine Saint-Pierre a incarné à sa manière « La […] fille qui aimait trop les allumettes » parmi certaines cibles de prédilection du PLQ, nous attendons toujours de voir la matérialisation du débat et le début d’un leadership collectif. Depuis la Commission Bouchard-Taylor sur la question des accommodements raisonnables, rien n’a transpiré : pire encore, nous tentons d’enterrer et de momifier l’identité québécoise par le processus même.
Le cas de la communauté sourde
Passer 24 heures dans la peau d’une personne sourde est un exercice parfois instructif. L’envisager d’une manière positive, propre à une personne sourde revendiquant son appartenance à la communauté sourde québécoise pour citer un exemple, est une perspective plutôt inédite pour le commun des mortels. La chose est pourtant possible, pour autant que nous nous en donnons la peine.
Aborder l’existence et les réalités de la communauté sourde québécoise, c’est faire siennes les contradictions de notre appartenance citoyenne depuis la Conquête. Plutôt que de faire diversion, la bifurcation du dossier des accommodements raisonnables vers les revendications de notre communauté nous fera aborder la problématique sous un œil nouveau. Ce qui est certain, c’est que, dans les termes de notre contrat social, tout Québécois-e doit se sentir chez soi. Quand notre premier ministre se permet certaines allusions en public à l’effet d’un certain sentiment d’être immigrant en son propre pays, c’est signe que quelque chose ne va pas.
Être Sourd Québécois, c’est d’un certain sens signer la plupart du temps en Langue des Signes Québécoise (LSQ) et requérir des services d’interprétation professionnelle afin de participer pleinement aux activités d’une certaine dynamique associative et communautaire. D’ailleurs, dans une publication récente de notre communauté, il était fait état d’une étude de l’Association des Sourds du Canada à l’effet que la participation des Sourds aux processus politiques était plutôt faible, que ces derniers étaient plus ou moins informés concernant les enjeux.
La contradiction majeure qu’un Sourd doit confronter dans sa vie en ce moment, c’est de devoir faire face à un monde entendant. Cette contradiction se confirme dans le choix même d’une éducation. Tout d’abord, signer paraît dérisoire dans les conditions du milieu d’éducation et d’une certaine opinion historique en vogue. Signer plutôt que de parler, voire d’écrire, apparaît comme la manifestation d’une résistance communautaire qui perdure depuis 1760.
Jusqu’à temps que le Québec négligera sciemment de reconnaître la LSQ comme langue d’éducation des personnes sourdes, les échecs perdureront. Il n’est pas dit de ne pas apprendre le français, langue seconde des personnes sourdes, mais comme c’est une langue auditive, cette langue n’a pas la même importance pour nous. Sommes-nous en droit de revendiquer un accommodement raisonnable collectif? Si les autochtones du Grand Nord peuvent apprendre en inuktitut et que les Anglo-Québécois peuvent évoluer dans leur langue, pourquoi pas nous?
L’option du peuple québécois
Pour faire écho à la communauté québécoise dans son ensemble, nous devons bien sûr démontrer certaines règles de bienséance à l’égard de nos nouveaux arrivants au pays… mais quand nous permettons des comportements et des revendications qui menacent l’intégrité même des valeurs qui constituent le tissu social québécois, nous avons le devoir moral de résister à ces intrusions indues. Quand allons-nous enfin respecter notre propre citoyenneté?
Le projet de loi 16
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1 commentaire
Ouhgo (Hugues) St-Pierre Répondre
13 octobre 2009Et le fourbe canadianisateur en chef se glisse sous une burka pour n'être pas vu comme le chevalier du multiculturalisme misogyne. Rusé, il confie cette mascarade à deux femmes junior de son cabinet, prêtes à "servir" pour gravir, mais contre qui il saura sévir si le vent vire.