Ed Burkhardt, le président de la Montreal, Maine and Atlantic (MMA), a tenu un point de presse improvisé mercredi à Lac-Mégantic. L’impression qu’on en retire est que monsieur Burkhardt fait les choses à la « va comme je te pousse ».
Alors qu’il était au milieu des journalistes qui voulaient lui poser des questions, le président de la MMA, avec un ton plutôt arrogant, a dit des choses comme « Vous, j’ai répondu à vos questions, vous avez assez parlé, je vais demander à un autre journaliste de poser sa question », « Vous n’avez pas entendu ce que je dis depuis tantôt ? », etc.
Monsieur Burkhardt, si vous devez répondre 52 fois à la même question, faites-le, et cessez de dire aux journalistes et autres personnes qui posent des questions légitimes de se taire. Vos pertes de patience devant ceux et celles qui veulent des réponses indiquent votre attitude d’homme d’affaires insensible.
Quand on a un bilan négatif (un seul exemple : 33 déraillements de 2003 à 2012, aux États-Unis, alors que la MMA est une moyenne entreprise régionale), bilan qui vient d’être publié par les autorités canadiennes et américaines, on se garde, comme on dit chez nous, une petite gêne…
Mais est-ce que l’attitude cowboy de monsieur Burkhardt est surprenante ? Sans tomber dans les préjugés ou dans les stéréotypes, une tendance s’est dessinée au fil des années. Aux États-Unis, pays de la richesse extrême de certains individus et pays où 40 millions de personnes sont sans assurance maladie, l’argent, c’est comme une religion. Aux États-Unis, le dollar règne et l’humain passe en second lieu. Notez que c’est vrai ailleurs, mais chez nos voisins du Sud, cela est intensément vrai.
Dans le pays de la conquête de l’Ouest, du « american dream », où la réglementation par l’État est très souvent perçue comme une nuisance plutôt qu’un garde-fou (garde-fou contre les trains fous ?…), doit-on se surprendre du discours du président de la MMA ?
Quand vous avez un parti politique (le Parti républicain) qui récolte rien de moins que 50 % des votes en faisant la promotion de ce discours d’extrême droite économique, quand ce parti va jusqu’à traiter Barack Obama de communiste, je ne tombe pas en bas de ma chaise devant le comportement d’Ed Burkhardt.
Burkhardt est venu à Lac-Mégantic cinq jours après la tragédie. On ne peut pas dire qu’il s’est énormément forcé. Il est venu quand « ça lui a adonné » pour reprendre le mot de ce monsieur Lafontaine, homme d’affaires de Lac-Mégantic, qui a perdu un fils et deux belles-filles dans la tragédie. Comme l’a dit la première ministre Pauline Marois, c’est une attitude inacceptable.
J’ai l’impression que Burkhardt est venu nous jouer un numéro de violon et je n’ai pas senti de compassion réelle. Vous ?
On se souvient que la journée même de la terrible fusillade dans une école du Connecticut en 2012, où 20 enfants ont été tués, les promoteurs de la déréglementation des armes à feu et d’une « liberté » antigouvernementale (surtout membres du Parti républicain) étaient sur le pied de guerre pour empêcher une réglementation plus sévère contre les armes à feu.
Au Québec, les promoteurs de cette doctrine (j’utilise le mot doctrine parce que j’ai l’impression que c’est plus un dogme qu’un argumentaire rationnel) ne représentent pas 50 % de la population. Au Québec, ils sont marginaux, heureusement.
Dans cette perspective, il ne faut pas s’étonner que cet Américain arrogant débarque avec une attitude désinvolte. Il a été éduqué à l’américaine et même si tous les gens d’affaires des États-Unis ne sont pas des « machines à cash », il serait naïf d’ignorer cette culture de l’argent qui passe avant tout, incluant les humains. Trop souvent, pour eux, c’est « business as usual ». Et les « dommages collatéraux » (expression plus que condescendante) font partie du quotidien et, semble-t-il, il ne faut pas trop s’en faire avec ça…
Libre opinion - Le cowboy du train
David Doyon
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