Selon Gregory Baum et Ramsey Clark

Loi 101 - conforme à l'éthique et au droit international

Québec français


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L'ACTION NATIONALE
NUMÉRO SPÉCIAL 9.99
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Gregory Baum et Ramsey Clark, tous deux de renommée internationale, ont vigoureusement défendu la Charte de la langue française (loi 101), promulguée par le Québec en 1977. En 1993, À la demande de Guy Bouthillier, alors porte-parole du Mouvement Québec français, Gregory Baum l'a étudiée sous l'angle de l'éthique, tandis que Ramsey Clark l'a abordée sous celui du droit international. On retrouve ci-dessous des extraits des Réflexions éthiques sur la loi 101 de Gregory Baum, et la lettre d'envoi de l'Avis juridique sur le droit international, la question linguistique et l'avenir du Canada francophone de Ramsey Clark. Le texte intégral des deux avis, toujours d'actualité, se trouve sur le site de la Société Saint-Jean-Baptiste de Montréal ( www.ssjb.com).
Gregory Baum
Théologien de renommée internationale, professeur émérite, département d'Études religieuses, l'Université McGill.
«Les arguments éthiques invoqués à l'appui de la législation en matière de langue reposent tous sur le même fondement. Les lois qui renforcent les droits collectifs aux dépens des droits individuels ne sont acceptables, du point de vue éthique, que si A) elles se fondent sur des raisons valables et urgentes, et B) qu'elles n'imposent que des restrictions minimales, c'est-à-dire sans conséquences graves. (...)
Des raisons valables et urgentes
La loi 101 est le fruit d'une longue lutte historique contre une domination coloniale et vise à remédier à une vieille injustice. (...) La langue française reste menacée au Québec pour diverses raisons : a) à cause de la présence envahissante de la culture et de la technologie américaines ; b) du fait que l'anglais est devenu la lingua franca à travers le monde par suite notamment de l'influence des États-Unis sur le plan international ainsi que de l'héritage que l 'empire britannique a laissé aux peuples d'Asie et d'Afrique, et c ) par suite de la condition minoritaire des Québécois au sein d'un Canada qui, grâce à une immigration massive et récente, n'est plus considéré comme le résultat d'une union entre deux peuples. (...)
La langue d'un petit peuple qui vit à l'ombre d'une grande civilisation risque toujours de devenir folklorique et ne plus être apte à refléter tous les aspects de la vie sociale et intellectuelle. Les Québécois se souviennent du temps, qui n'est pas si lointain, où ils étaient contraints d'utiliser, dans le domaine des sciences, une langue qui n'était pas la leur. Pour des Nord-Américains anglophones, il n'est pas facile de comprendre la nécessité d'institutions visant à défendre et à promouvoir la langue d'un petit peuple, eux qui n'ont jamais vu la leur menacée ni eu l'occasion de constater avec quelle facilité une langue peut perdre son utilité culturelle pour n'être plus qu'un moyen de communication au sein de la famille et avec les voisins.
La communauté anglophone n'est aucunement menacée
Les restrictions prévues par la loi dans le domaine de l'affichage ne portent pas foncièrement atteinte à la liberté d'expression qui a pour but de protéger le pluralisme politique, idéologique et artistique et ne concerne que de façon très indirecte l'affichage commercial . (...)
La loi 101 ne menace pas la survivance des institutions historiques de la collectivité anglophone, telle que les écoles, les universités, les hôpitaux, les services de bien-être social et les autres organismes communautaires. Étant donné son passé, la communauté anglophone du Québec a bénéficié de ressources financières et d'influences qui lui ont permis de se doter d'institutions qui par leur solidité ne peuvent se comparer à celles des minorités francophones du Canada dont le sort dépend de la générosité de leurs gouvernements provinciaux. Au Québec, l'intégrité de la communauté anglophone n'est guère menacée. (...)
À mon avis, les Québécois d'origine française sont bien trop sensibles à l'attitude négative de la presse et de l'opinion publique du Canada anglais relativement à la question linguistique. À cause du caractère asymétrique de la Confédération canadienne, d'un mépris et d'une hostilité héréditaires et du fait qu'ils n'ont jamais eu besoin d'institutions pour protéger leur langue, les anglophones du Canada, même les mieux intentionnés, sont généralement incapables de comprendre la situation du Québec et l'importance de la Charte de la langue française. Si les Québécois devaient se laisser culpabiliser par cette attitude négative, ils feraient preuve d'une irrationalité qui pourrait même compromettre l'avenir de leur culture. (...)
Ces réflexions éthiques démontrent bien que la loi 101 est tout à fait acceptable moralement même si des tribunaux canadiens ou un comité de l'ONU jugent qu'elle contredit les chartes protégeant les droits individuels. »
le 29 avril 1993
Ramsey Clark
Nommé à la Justice en 1961 par le président Kennedy, Me Clark en est devenu ministre (Attorney General) sous le président Johnson, poste qu'il a occupé jusqu'en 1969. À ce titre, il a dirigé la rédaction et en a assuré l'adoption des deux principales lois sur les droits civiques aux États-Unis, le «Voting Rights Act» de 1965 et le «Civil Rights Act» de 1968.
Au Mouvement Québec français
Veuillez trouver ci-joint l'avis que vous m'avez demandé au sujet de la légalité de certaines dispositions de la Charte de la langue française. À mesure que j'ai approfondi la recherche, j'ai été frappé d ' apprendre à quel point le droit international relatif aux droits linguistiques est jeune et peu développé. Par conséquent, j'ai tenté de mieux comprendre le rôle et l'importance de la langue pour la culture et la vie et, partant, comme Droit de l'homme. Voilà le sujet de la première partie de l'avis.
Aussi, je suis convaincu que les droits linguistiques revêtent une importance profonde et sont à la base même de la dignité humaine. J 'espère que le droit international de même que le droit régional et national commenceront à mieux tenir compte du rôle fondamental de la langue dans la culture et à en garantir sa pérennité. Un grand nombre des conflits critiques, voire les plus difficiles auxquels nous sommes confrontés, proviennent de tensions culturelles et linguistiques.
Personne ne doit avoir honte des efforts déployés pour protéger la culture et la langue. Il s'agit du combat contre l'oubli, du combat de savoir qui nous sommes et de comprendre ce que nous voulons être. La diversité culturelle, sa préservation et sa revitalisation, offrent la meilleure chance à l'humanité de réaliser son potentiel et d'étendre son imagination. Mais, nous devons aussi créer les moyens de communiquer pleinement et ouvertement parmi les diverses langues et cultures, dans le respect, la tolérance et l'amour de nos différences .
Je crois que la Charte de la langue française constitue une mesure courageuse, positive et sensible, mais aussi respectueuse des droits de tous, de préserver une culture d'une grande valeur. Je crois que le droit international doit, et devrait, protéger une telle législation parce qu'elle est essentielle pour assurer le respect des Droits de l'homme. Comme pour toute législation, son efficacité dépendra de son administration équitable.
le 15 juin 1993

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Théologien de renommée internationale, professeur émérite, département d'Études religieuses, l'Université McGill.





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