L'acte de contrition qu’a fait hier Gilles Duceppe, à la sortie de son caucus, a montré un politicien démoralisé. Peu importe les marques de confiance et d’amitié que lui ont témoignées ses collègues, M. Duceppe n’est pas sans savoir que dans son dos, tout le monde dit qu’il s’est tourné en ridicule. Lui qui avait eu tellement de difficultés à se défaire de l’image du bonnet qui lui était restée collée après sa visite dans une fromagerie aux élections de 1997, pourra difficilement s’en remettre. Il a beau demeurer un leader de grande expérience, c’est son jugement politique qui a fait défaut. Une erreur de parcours qui suit de près la stratégie malhabile du Bloc dans le débat sur la reconnaissance du Québec comme nation.
Le contexte politique actuel est beaucoup plus incertain qu’en 2004 quand les bloquistes collectaient les dividendes du scandale des commandites. M. Duceppe avait obtenu un vote de confiance de 96,8 % au congrès d’octobre 2005. Les députés et militants du parti seront plus nerveux à l’approche de leur congrès, l’automne prochain.
Gilles Duceppe n’a jamais été plus populaire que son parti dans les sondages. Les bloquistes surveilleront attentivement ces chiffres d’ici l’automne. S’il devient un boulet après cette histoire, M. Duceppe n’attendra pas qu’on lui montre la porte et prendra sans aucun doute le chemin de la retraite.
« Comment, moi qui suis si méthodique, ai-je pu faire une erreur de même, je ne sais pas », se demandait hier le chef bloquiste, en faisant son mea-culpa devant la presse. La réponse est pourtant évidente : il a cru Pauline Marois. Depuis son départ de la politique, l’ancienne ministre n’avait cesse de répéter que plus jamais elle ne serait candidate à une course à la direction du PQ. Elle répétait encore la même chose la semaine dernière et elle le pensait vraiment. Lorsqu’elle a vu une nouvelle fenêtre politique s’ouvrir pour elle, elle a fait de l’absence de Gilles Duceppe de la course, une condition de son retour en politique. Elle a d’abord convaincu Pierre Curzi de ne pas tenter sa chance, et elle entendait persuader M. Duceppe lors de leur rencontre prévue pour samedi. Mais ce dernier était tellement convaincu que Mme Marois ne l’affronterait pas, qu’il a bluffé, avant même de connaître ses appuis. Le problème, c’est qu’il n’avait pas les atouts nécessaires dans son jeu pour appuyer son bluff. Il a dû abandonner la partie lorsque Mme Marois lui a demandé de voir ses cartes.
M. Duceppe n’est pas le seul perdant de cet événement. Les quelques députés du PQ, comme Sylvain Simard et Maxime Arseneault, qui se sont empressés de l’appuyer, n’ont pas gagné en crédibilité auprès de leurs collègues et militants. Même Louise Harel, qui était à la fois dans les confidences de Gilles Duceppe et de Pauline Marois, n’a pas su user de son influence pour convaincre le chef du Bloc de ne pas se lancer dans cette aventure. Pourtant, Mme Harel connaissait bien l’hostilité du caucus péquiste à la mainmise du Bloc sur le PQ. Et elle connaissait bien l’intérêt de Pauline Marois à la direction du Parti.
Il y a tout de même eu des gagnants dans cette histoire. Le plus évident est le moins expérimenté, Bernard Drainville, qui a manifesté sa préférence pour Mme Marois dès le départ, sans même savoir si elle allait être candidate. « Manque d’expérience », disaient la semaine dernière des vieux routiers du PQ. Peut-être. À moins qu’il ne s’agisse d’un flair politique exceptionnel. On verra bien. En attendant, Bernard Drainville est assuré d’un poste au cabinet si jamais le PQ l’emporte sous Pauline Marois.
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