Plus de sept mois après la décision du gouvernement du Québec de réaliser la reconstruction du complexe Turcot en partenariat public-privé et près de deux ans après celle de réaliser le CHUM et le CUSM dans ce mode, l'Ordre des ingénieurs du Québec (OIQ) a cette semaine dénoncé publiquement le recours au PPP pour la réalisation de ces projets.
La mission de l'OIQ étant d'assurer la protection du public et de mettre leur profession au service de l'intérêt du public, on s'imagine que cette opposition doit découler du fait que le recours au PPP aurait pour effet de mettre le public québécois en danger ou encore de ne pas servir les intérêts de ce dernier. À lire les arguments de l'OIQ, publiés dans la page Idées du Devoir du 8 juin dernier, il ne semble toutefois pas que ce soit le cas.
Avec cette position, l'OIQ se trouve à contredire un de ses plus éminents membres,
M. Jacques Lamarre, ex-chef de la direction de SNC-Lavalin et membre du conseil d'administration de PPP Canada, qui déclarait à La Presse en 2004 que les PPP étaient certainement mieux pour les gouvernements. M. Lamarre, il est vrai, s'était permis d'ajouter qu'en tant qu'ingénieur, il préférait les mandats traditionnels où il n'y avait pas de risques.
Or, c'est précisément sur la notion du partage des risques -- entre le gouvernement qui commande une infrastructure et l'ingénieur qui contribue à sa réalisation -- que le public québécois trouve son intérêt.
Assumer le risque
Depuis, des décennies, les firmes de construction et de génie, au Québec comme ailleurs, réalisent des travaux d'infrastructure publique sans assumer les principaux risques de dépassement de coûts ou d'échéanciers. En mode PPP, la donne change. En tant que membres des consortiums appelés à soumissionner sur les projets en PPP et à les réaliser, les firmes participantes doivent désormais prendre le risque de s'engager à réaliser un ouvrage à un prix et selon un échéancier fixes, sans quoi elles s'exposent à des pénalités financières.
On comprend donc rapidement pourquoi de nombreux gouvernements, dont celui du Québec, voient un intérêt dans la formule des PPP, même si des intervenants du secteur privé peuvent y perdre certains avantages.
Aujourd'hui, l'OIQ nous affirme que les projets du complexe Turcot et des CHU sont trop complexes et trop risqués pour être réalisés en PPP. Or, si ces projets sont si risqués et complexes, n'est-ce pas là, justement, un argument de taille pour que les risques de ces projets ne soient pas assumés uniquement par le gouvernement et les contribuables québécois?
Imputabilité
Ceux qui concevront et qui construiront ces ouvrages ne devraient-ils pas être financièrement imputables s'il y a dépassement de coûts ou d'échéanciers? Ces mêmes firmes ne devraient-elles pas avoir à garantir l'état à long terme de ces infrastructures? La protection de l'intérêt du public québécois semblerait nous dicter que oui. [...]
Il n'y a aucun doute sur le fait que les centaines d'ingénieurs québécois qui travaillent sur les projets en PPP actuellement en développement au Québec et ailleurs ont les compétences et le savoir-faire pour réaliser ces projets dans le meilleur intérêt de la population qu'ils servent. Le gouvernement en est persuadé. Il est dommage que le président de l'Ordre des ingénieurs semble en douter.
***
Pierre Lefebvre, Président-directeur général de l'Agence des partenariats public-privé du Québec
PPP: où se situe l'intérêt du public québécois?
CHUM
Pierre Lefebvre2 articles
Président-directeur général de l'Agence des partenariats public-privé du Québec
Laissez un commentaire Votre adresse courriel ne sera pas publiée.
Veuillez vous connecter afin de laisser un commentaire.
Aucun commentaire trouvé