Gaz de schiste

Réparer le gâ(z)chis

Dans l'état actuel du débat, personne ne voudra croire Jean Charest ou Lucien Bouchard sur parole. Les Québécois sont plus lucides que certains le pensent. Ils voudront des faits.

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La nomination de Lucien Bouchard à la présidence de l'Association pétrolière et gazière du Québec est indicatrice d'un changement d'attitude des promoteurs de l'exploitation des gaz de schiste. Il y a là, en soi, la reconnaissance implicite de l'échec de la stratégie déployée la dernière année pour convaincre les Québécois de l'intérêt économique d'exploiter cette source d'énergie.
Le recours à celui qui fut le politicien le plus populaire au Québec après René Lévesque et qui est aujourd'hui l'avocat aux honoraires les plus élevés à Montréal est aussi indicateur de la précarité dans laquelle se retrouve aujourd'hui cette association. La communication menée par les entreprises gazières cette dernière année a provoqué une polarisation du débat aussi vive que lors des référendums de 1980 et 1995, ce qui est peu dire.
Le mandat confié à l'ancien premier ministre péquiste est de l'ordre du sauvetage. Il lui faudra rétablir la crédibilité de l'association. Pour d'autres que lui, ce serait mission impossible tant le gâchis est énorme. Un gâchis qui rejoint le gouvernement Charest pour avoir renchéri avec une naïveté incommensurable sur le discours des gazières.
Son arrivée dans ce dossier coïncide avec le changement de discours adopté par le gouvernement Charest qui, désireux de s'en distancer, pressait vendredi dernier l'industrie d'adopter des pratiques responsables en matière d'exploration et d'exploitation des gaz de schiste. Cette coïncidence ne relève pas du hasard. Si l'industrie ne l'avait pas compris par elle-même, on lui a certainement expliqué que le gouvernement cherchera à sauver sa peau avant de sauver celle d'une industrie irresponsable.
L'Association pétrolière et gazière se trompera si, suivant l'aphorisme de McLuhan «the medium is the message», elle croit que par sa seule présence Lucien Bouchard rétablira sa crédibilité. À cet égard, il faut relever dans le communiqué annonçant sa nomination cette phrase où on lui fait dire son accord à développer l'exploitation des gaz de schiste dans le «plein respect d'exigences exemplaires au point de vue de l'environnement, de la transparence, de la sécurité publique et de l'acceptabilité sociale». Ce discours, André Caillé le tenait aussi lorsqu'il était le porte-parole de l'industrie. Si personne ne l'a cru, pourquoi devrait-on croire que cette industrie est maintenant prête à se comporter en citoyen corporatif responsable parce que Lucien Bouchard le dit?
L'industrie et le gouvernement ont soutenu ces derniers mois que l'exploitation des gaz de schiste constituait une occasion que ne pouvait manquer le Québec, ce que croit aussi Lucien Bouchard. Il affirme dans le communiqué publié mardi que la «découverte de volumes importants de gaz» est «un atout très important pour notre développement économique et le financement des missions de notre État». Les Québécois seront majoritairement d'accord pour ne pas rater cette occasion, à la condition qu'on leur démontre que cela n'est pas un mirage. Dans l'état actuel du débat, personne ne voudra croire Jean Charest ou Lucien Bouchard sur parole. Les Québécois sont plus lucides que certains le pensent. Ils voudront des faits.


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