L'opinion de Bernard Landry #79

Une nation, pas une race!

Comme pour la plupart des nations modernes, les contours de la nation québécoise ne sont pas ethniques. Ils ne l'ont d'ailleurs pratiquement jamais été.

Indépendance - le peuple québécois s'approche toujours davantage du but!


Comme pour la plupart des nations modernes, les contours de la nation québécoise ne sont pas ethniques. Ils ne l'ont d'ailleurs pratiquement jamais été.
Environ dix mille personnes sont venues d'Europe pour fonder ici la Nouvelle-France. Leurs descendants sont environ quinze millions aujourd'hui. Il y en a d'ailleurs presque autant aux États-Unis qu'au Québec, dont Madona, Hilary Clinton, et David Plouffe, organisateur politique d'Obama!
Les premiers habitants de la Nouvelle-France se sont rapidement métissés avec les populations aborigènes. Les coureurs des bois l'étaient dans tous les sens du terme. Quand Louis Riel, chef des métis, fut exécuté ignominieusement par les autorités fédérales, Honoré Mercier, premier ministre du Québec, a dit: "Ils ont pendu notre frère Riel". Les anthropologues disent que la majorité des Québécois d'aujourd'hui ont des racines amérindiennes.
Puis sont venus des Anglais, des Irlandais, des Écossais. Dans le cas de ces derniers, majoritairement catholique, le métissage fut intense et facile, au point que l'on dit qu'un quart des Québécois ont des ascendances irlandaises. Une demi-douzaine de nos premiers ministres sont dans ce cas. C'est à se demander pourquoi, avec autant de dirigeants aux telles racines, le Québec n'est pas encore indépendant, alors que l'Irlande l'est depuis le début du vingtième siècle!
Un jour, au début des années soixante-dix, un journaliste de Toronto a téléphoné à la permanence montréalaise du parti québécois pour avoir quelques informations. C'est Mme O'Leary qui lui a répondu qu'il valait mieux parler à Mr Mackay au bureau de Québec. Ce qu'il fit, pour être ensuite référé à un autre employé du P.Q., Mr McAndrew. Ce dernier lui dit qu'il ne pouvait pas lui parler sans l'autorisation de son leader parlementaire, Mr Robert Burns!!! Le scribe torontois a d'abord pensé que l'on se moquait de lui. Mais en tous cas, il n'a plus jamais dit que le parti québécois et son projet étaient "ethniques". Hélas, ses confrères du Canada, en général, n'en ont pas fait autant, par ignorance, mauvaise foi, ou les deux.
Dans ma propre famille rapprochée, pas moins de cinq racines ethniques différentes se retrouvent et le phénomène est courant au Québec. Jacques Parizeau a des ancêtres écossais, et sa première épouse était polonaise. Jean Garon a des origines irlandaises, tout comme évidemment Louis O'Neil, ministre de René Lévesque.
Le parti québécois, principal porteur de notre projet d'indépendance, a fait élire le premier noir à l'Assemblée nationale dès 1976: Jean Alfred. Le Bloc québécois a fait élire le premier latino au Parlement du Canada: Oswaldo Nunez. Y a-t-il plus Québécois que Maka Koto? Maria Mourani? Joseph Facal?
Et j'en passe. Tout cela pour dire que ceux qui donnent à notre nation un contour racial, ou prétendent que notre projet d'indépendance est raciste, ne devraient se faire répondre que par des injures grossières, si nous étions aussi méchants qu'eux. Or il y en a toujours qui commettent cette infâme dérive, surtout au Canada, mais même au Québec. Il faut avoir pitié de leur bêtise plus qu'autre chose.
La cause est entendue et depuis longtemps, notre groupe humain forme une vraie nation. Diversifiée comme les États-Unis d'Amérique ou la France qui, tout comme nous, ont une langue nationale unique, une culture spécifique, des bonheurs et des malheurs communs, et des rêves partagés. Ce qui définit, en fait, une nation.
Nos frères et soeurs des Premières nations ne sont pas des Québécois et ne veulent pas l'être. Notre Assemblée nationale a reconnu leurs nations dès 1985 sous René Lévesque. Ils ont des droits particuliers comme l'illustre si bien la Paix des Braves, l'accord analogue avec les Inuits et diverses autres ententes et régimes d'exception justifiés.
Les anglophones du Québec, une minorité d'environ 8%, aujourd'hui très majoritairement bilingue, font évidemment partie de la nation québécoise. Mais avec des droits linguistiques particuliers inviolables.
Tous les autres citoyens du Québec ont les mêmes droits. Personne ne peut prétendre être exempté de la langue, de la culture et des valeurs communes. Un immigrant n'a aucun droit particulier autre que ceux de la majorité francophone. Aux États-Unis aussi bien qu'en France, on ne peut pas être citoyen et voter sans parler la langue nationale et partager les valeurs communes. Ces règles de bon sens doivent être épousées par la nation québécoise, et elle ne pourra le faire totalement que lorsqu'elle sera libre.
Bernard Landry


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