Arabie saoudite / Qatar

‘’… Une seule nation islamique de l’Atlantique au Golfe… ’’

Tribune libre

L’auto neutralisation des frères ennemis
À qui profite la rupture entre d’un côté l’Arabie Saoudite et ses alliés et l’autre le Qatar et ses soutiens affichés et indirects ? Émettons l’hypothèse selon laquelle il s’agit plus d’un non-évènement, un leurre qui cache mal la frustration que vivent les USA et leurs alliés européens suite aux turbulences provoquées par l’intervention des Russes. À cela s’ajoute la présence des Iraniens qui aide à la préservation et à la sauvegarde de la Syrie de l’agression combinée qu’elle subit de la part des ‘’rebelles et de Daech’’ et par les ‘’facilités et les blocages’’ opérés par la Turquie pour pousser au départ d’El Assad et ainsi contrer la présence Iranienne.
En fait, selon des observateurs du terrain, la face visible de l’iceberg serait la lutte antiterroriste déclenchée contre les mercenaires internationaux qualifiés de Daech, ÉI, Isis … et leurs exactions au Moyen Orient, ainsi que leurs loups solitaires qui opèrent, de temps à autres, pour pousser à la stigmatisation des musulmans par les groupes d’extrême droite.
Les médias occidentaux ont en fait des exposés en boucles, souvent tronqués, alors que la face cachée de ce même iceberg est en réalité l’acheminement du pétrole de l’Irak, sous le contrôle des mercenaires et sa vente à très bas prix à des ‘’revendeurs internationaux ’’ mais dont ces mêmes médias n’en soufflent mot.
Reprenant la réflexion en mettant de l’avant le Qatar. Après quelques semaines d’indexation notamment par les USA et leurs alliés régionaux, ce Tom Pousse du Golfe, reprend de sa vigueur et lance une contre-offensive diplomatique qui fait appel à la médiation d’ambassadeurs pour expliquer qu’ils ne peuvent expulser Al Qaradaoui, parce qu’il est l’un de ses citoyens depuis plus d’un demi-siècle et que le soutien au Hamas est dicté par ses engagements auprès des peuples opprimés. Il arrive ainsi à desserrer l’étau tressé autour de lui, même si au même moment, Israël prend part au jeu des sanctions en prévoyant d’expulser la chaine El Jazira.
Pour mémoire, la présence du prédicateur Égypto-Qatari et ses frères musulmans au Qatar, a déjà fait l’objet de grincements entre l’Arabie Saoudite et son vis-à-vis. Cela date depuis l’époque du Roi Fayçal qui les avait chassés de son ‘’Royaume’’ et personne n’ignore que les évènements qu’ils fomentent étaient en veilleuse même s’ils contrarient, chacun en ce qui le concerne, les pays du Golfe.
Cependant, l’idéologie Wahhabite ne s’est jamais accommodée de la présence d’une autre idéologie qui prône, si ce n’est un retour au salafisme du moins, par des actes terroristes d’une extrême violence, une islamisation transnationale du monde et à-contrario, pousse plus à la régression socio-identitaire qu’a une moralisation de la vie politique, socioculturelle et économique.
Bien des pays arabo musulmans, qui ont compris les enjeux et les dessous de cette expansion par l’essaimage de lieux d’endoctrinement et par des actes terroristes, ont réduit leurs relations et quelques-uns - dont l’Algérie - critiquent ouvertement ces politiques de promotion du Wahhabisme. Ils en font de même avec le Qatar concernant la confrérie et ses agissements. Aujourd’hui les deux idéologies, plagient l’énoncé du Baath de Michel Aflak qui disait : ‘’ … Notre objectif est clair et il ne souffre aucune ambiguïté : une seule nation arabe, de l'Atlantique au Golfe ... ‘’ Elles, disent : ‘’… Une seule nation islamique de l’Atlantique au Golfe… ’’. L’Arabie Saoudite et le Qatar n’ont rien appris de l’échec de l’implantation de l’idéologie Baathiste.
Les véritables causes et leurs conséquences
Trois remarques me viennent à l’esprit. D’abord, il semble qu’une répartition des territoires a été convenue - Le Qatar en aidant la confrérie islamiste à s’implanter partout dans le monde et l’Arabie Saoudite en infiltrant les États arabo-musulmans - mais depuis que le petit Émirat, utilisant sa chaîne TV El Jazira et soutenant les réseaux sociaux de groupuscules prônant l’endoctrinement de jeunes des pays occidentaux, tout en investissant dans le soutien des associations supervisées par la fraternité a commencé à faire de l’ombre au Wahhabisme, rien ne va plus entre les deux pays.
Ensuite, la brèche ouverte par les menaces qui pèsent sur l’hégémonie de l’Arabie Saoudite dans le Golfe arabe ou Persique, c’est selon, l’Iran, le frère-ennemi n’a pas hésité à l’exploiter pour causer quelques soucis au Yémen et bien entendu en Syrie. L’échiquier se trouve ainsi bouleversé par des problèmes de sécurité et de subversion à l’intérieur du Royaume.
Enfin, en Syrie et en Irak, les chemins habituellement empruntés par les mercenaires internationaux et les soi-disant rebelles anti Assad ayant été perturbé par les interventions des Russes qui ont, il faut le reconnaître, réussi des frappes chirurgicales, ont amené les USA à évaluer les actions de ‘’leurs pions et des intervenants à leur solde’’.
C’est dire que cette crise idéologique qui nous est présentée comme un prélude à une lutte décisive contre les organisations terroristes islamiste n’est en fait qu’un paravent.
Certes, elle oblige, les pays du Conseil de Coopération du Golfe (CCG) composé de l’Arabie saoudite, des Emirats arabes unis (EAU) et du Bahreïn, auxquels viennent s’ajouter l’Egypte et quelques pays Africains, à faire croire qu’ils œuvrent pour stopper l’escalade du terrorisme islamiste et à limiter ou arrêter le financement de ce même terrorisme islamiste dans le monde, pendant que les USA et leurs alliés réorganisent et orientent les mercenaires vers d’autres sites de guerre.
Le pétrole Irakien dans la géostratégie US !?
Quelques experts ont mis de l’avant le fait qu’une partie du financement provient des ventes sous la table du pétrole Irakien. Donc, Il profite aux groupes terroristes qui se sont déplacés d’Irak vers le Sahel ou encore vers l’Afghanistan. Le dernier attentat contre une mosquée chiite à Kaboul en est la preuve.
Il faut aussi noter, un fait incompréhensible et il réside dans le silence soudain et assourdissant des médias occidentaux, habituellement, si prompt à déclencher leurs rotatives pour expliquer, selon leurs règles, les causes et les effets des turbulences du Moyen Orient. Ce conflit arabo-arabe, après avoir fait les manchettes des quotidiens et les ‘’primes times’’ des télévisions, a totalement disparu des dépêches d’information laissant place aux essais de tirs nucléaires de la Corée du Nord, à la confrontation entre le gouvernement Vénézuélien (encore un pays de pétrole) et son opposition et aux fanfaronnades sportives de Poutine, sans omettre les lectures souvent biaisées de ce qu’a twitter ou non Donald Trump.
Donc, en procédant à une lecture, même en diagonale, de la confrontation entre le Qatar et l’Arabie Saoudite, plusieurs angles mettent en évidence, non seulement, les limites des deux idéologies, d’une part celle de la confrérie islamiste avec les soutiens connus et avérés de la Turquie et conjoncturel mais à peine voilé de l’Iran et de l’autre celle des Wahhabites et son apport dans les déplacements des populations Syriennes, Irakiennes, Libyennes et même Sahéliennes, au grand bénéfice stratégique de l’Europe.
L’exigence des USA et de ses alliés est de voir l’Arabie Saoudite et ses alliés ‘’gérer’’ la déstabilisation qu’ils ont laissé gagner la région en perdant le contrôle sur le Yémen et ont en ayant laissé l’Iran y prendre plus de place pendant qu’ils créaient des associations et des organisations islamistes par un financement direct d’activité d’endoctrinement au bénéfice du Wahhabosalafisme. Bien entendu, les Saoudiens s’en défendent et jurent par Allah qu’ils n’offrent aucun soutien ni aucun financement aux autres organisations caritatives et ne participe en rien à l’endoctrinement par leur idéologie. Pourtant, celle-ci sévit particulièrement dans les pays musulmans et dans une autre mesure dans les pays occidentaux.
Les gouvernements de ces derniers ont maintenu le silence radio tant que les USA se gardaient d’inviter leur allié stratégique à se faire un peu plus discret mais l’arrivée de Trump à la tête de leur administration a changé la donne. Son voyage à Riad a bousculé l’agenda Saoudien et Qatari. Mais comme mis en évidence plus haut, les risques encourus pour ‘’l’écoulement clandestin du pétrole vendu par les mercenaires internationaux’’ incite à poser trois questions fondamentales pour comprendre le reste de la stratégie US et de ses alliés : Qui gère le pétrole Irakien ? Qui l’achète ? À quel prix ? Au fait, n’oublions pas que les installations pétrolières de l’Irak ont été protégées et n’ont subi que quelques dégâts superficiels.
Ferid Chikhi

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Algéro-Canadien, Ferid Chikhi vit au Québec depuis 2001. Conférencier et formateur, il est membre de plusieurs groupes et collectifs d’études. Contributeur de presse il est auteur d'articles, de réflexions et d'analyses tant politiques qu’économiques. Il a publié divers textes sur les problématiques d’accueil et d’intégration des immigrants au Québec. Ferid est membre du Conseil d'administration des IPSOs ; membre fondateur de l'Association des Nord-Africains pour la Laicité (AQNAL) ; membre du Groupe d'Études et de Réflexions Méditerranée Amérique du Nord (GERMAN) et l'animateur du site www.convergencesplurielles.com





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1 commentaire

  • Ivan Parent Répondre

    15 août 2017

    Quelles précisions, bravo.