Standard and Poor's a placé la Caisse de dépôt et placement sous surveillance. Comme cette firme, tous les Québécois sont inquiets. Très inquiets. La perte de 40 milliards de dollars enregistrée en 2008 est énorme et déjà l'exercice 2009 est mal engagé. Pour rassurer, il faut expliquer, puis exposer les conséquences de ces pertes en toute transparence. Sans noircir le tableau. Sans le rosir non plus.
Le lieu pour faire cet exercice est d'abord l'Assemblée nationale. La Caisse appartient aux Québécois et il revient aux députés de l'opposition de poser des questions en leur nom, et au gouvernement et aux gestionnaires de la Caisse de donner des réponses. Péquistes et libéraux souhaitent tenir une commission parlementaire, mais divergent sur le mandat à lui confier.
Après un tel gâchis, la tentation de trouver des coupables est forte. Le Parti québécois aimerait bien rendre la monnaie de sa pièce à Jean Charest, lui qui en 2002 s'était servi des déboires de la Caisse pour miner la crédibilité du gouvernement Landry. Le premier ministre cherche pour sa part à éviter tout blâme. Si leur attitude peut se comprendre, le bien commun exige de la retenue.
Avant d'accuser qui que ce soit, il faut d'abord établir les faits. Cela se fera en invitant à témoigner devant la commission les dirigeants du «bas de laine des Québécois». Eux seuls peuvent nous dire pourquoi celui-ci s'est transformé en passoire. Ils ont fait des choix de placement dont ils sont les seuls responsables. À eux de nous expliquer comment ils ont interprété le mandat de «rendement optimal» que l'on retrouve dans la loi constitutive de l'institution telle qu'amendée par le gouvernement Charest en 2004.
Cette commission parlementaire se doit aussi d'entendre la ministre de tutelle de la Caisse, Monique Jérôme-Forget. L'a-t-on informée des pertes qui s'accéléraient au moment où le Québec entrait en campagne électorale? A-t-elle pris des mesures? Difficile de croire que le gouvernement était dans le noir total. Le président du conseil, Pierre Brunet, a déjà dit qu'il parlait régulièrement avec la ministre des Finances. Étant responsable du Fonds des générations et du Fonds d'amortissement des régimes de retraite dont la gestion est confiée à la Caisse, elle devait, elle ou ses fonctionnaires, recevoir des états de compte.
En troisième lieu, il faut entendre les représentants des déposants comme la Régie des rentes et la Société d'assurance automobile pour établir l'impact des pertes. Pour l'année 2009-10, il n'y aura pas de hausse des cotisations. Qu'en sera-t-il pour les années suivantes? Il faut dire les choses telles qu'elles seront. Trop de gens peuvent être affectés pour qu'on leur dissimule la vérité.
Cela fait, la commission parlementaire pourra regarder l'avenir. Se posent bien des questions, comme la composition et le rôle du conseil d'administration et l'indépendance de la Caisse par rapport au gouvernement. Faut-il, comme le souhaite Mme Jérôme-Forget, installer au conseil le sous-ministre des Finances? Pour être les yeux et les oreilles de la ministre ou pour être le messager apportant des ordres de mission? Attention! Il y a lieu aussi de réfléchir à la taille de la Caisse ainsi qu'aux mécanismes de reddition de comptes. Davantage de transparence s'impose par la publication de rapports financiers trimestriels et leur vérification par le vérificateur général du Québec, ce qui aurait dû être fait depuis longtemps.
Pour réussir cet exercice, les députés doivent mettre de côté leurs intérêts partisans immédiats. Ne pas chercher chez les péquistes à coller des blâmes au gouvernement et celui-ci à y échapper. L'enjeu est tout autre. La commission doit servir à refaire les consensus autour du rôle de la Caisse. À donner à ses dirigeants la garantie qu'ils ne seront pas les otages des politiciens. À redonner aux Québécois la confiance en cette grande institution.
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