CHEFFERIE DU PQ

Course au PQ: viser la victoire dès 2022

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Affronter le régime canadien comme stratégie électorale


L’époque où le Parti québécois était une force politique importante au Québec semble loin aujourd’hui. À lire certains commentateurs, le PQ ne pourrait que vivoter dans les prochaines années avant de disparaître complètement. Plusieurs militants que je rencontre sont inquiets et croient difficilement en nos chances de rebondir. On peut le comprendre. J’ai toutefois la conviction profonde que si nous jouons bien nos cartes d’ici à la prochaine élection, nous pourrons former un gouvernement majoritaire.  


Clientélisme


Les raisons de notre déclin sont simples. À l’époque de MM. Lévesque, Parizeau et Bouchard, le Parti québécois était le parti de la nation. Il livrait bataille sur la question nationale et attirait des nationalistes de différents horizons. Nous avons malheureusement délaissé ce créneau, au fil des années, en commettant plusieurs erreurs. D’abord, nous nous sommes positionnés résolument à gauche, abandonnant ainsi complètement les nationalistes du centre et de la droite qui, naturellement, sont allés à la CAQ, tandis que les électeurs vraiment à gauche ont voté pour QS. Pour renverser cette tendance, nous nous sommes livrés à du clientélisme électoral. Au lieu de nous adresser à toute la nation, nous avons découpé l’électorat en petites cases. On a visé les gens de tel groupe d’âge, de telle classe sociale et ainsi de suite. À tout un chacun, nous avons promis un petit quelque chose qui pourrait le rallier, par exemple des lunchs gratuits dans les écoles lors de la dernière élection. Sans surprise, les résultats ont été catastrophiques. 


Malheureusement, voilà exactement la stratégie que nous propose Sylvain Gaudreault. Comme Jean-François Lisée, il souhaite positionner notre parti résolument à gauche. Il répète que le PQ doit être le premier parti chez les jeunes à la prochaine élection, envoyant ainsi le message aux autres électeurs qu’ils sont moins importants. À chaque groupe qu’il rencontre, il sort une promesse censée gagner l’appui de celui-ci. Comme notre ancien chef, il refuse de prendre position sur les seuils d’immigration et s’en remet aux experts sur une question vitale pour l’avenir de la nation. Son approche clientéliste nous mène assurément dans un cul-de-sac. Elle constitue le contraire du nationalisme assumé qu’incarnait jadis le PQ.


Opposition égale impuissance


Dans un autre registre, mes trois adversaires dans cette course promettent tous un référendum dans un premier mandat. Suivant ce raisonnement, il faut mobiliser la base indépendantiste et augmenter nos résultats à la prochaine élection. Il s’agit, certes, d’une approche volontariste et j’en reconnais la valeur. Cependant, le fait est que nous ne sommes plus au lendemain de l’échec du lac Meech. La ferveur référendaire est complètement absente chez nos concitoyens. La crise de la COVID-19, avec toutes ses conséquences dramatiques qui s’étirent dans le temps, rend la question d’un référendum rapide encore plus irréelle qu’elle ne l’était déjà. Tout le monde peut le constater en abordant le sujet lors d’une simple réunion de famille ou d’une fête entre amis. 


La constitution, c’est la force


Évidemment, si le but est de coiffer QS à la prochaine élection et de passer de la 4e à la 3e place, cette stratégie se défend. Je suis convaincu, cependant, que nous serons incapables de prendre le pouvoir en agissant de la sorte. Or, pour faire un jour l’indépendance, il faut commencer par former le gouvernement. Dans cette perspective, la question à mille dollars est: comment y arriver? Réponse: en contestant le régime fédéral. C’est ce que je m’emploie à faire dans le dossier de la loi 21 en posant des gestes ciblés. J’ai notamment porté plainte contre la juge en chef de la Cour d’appel du Québec et mis ainsi les fédéraux sur la défensive. La même approche doit être employée par notre prochain chef, en utilisant cette fois la constitution. Au lieu de promettre un référendum dans un premier mandat – ce qui ferait précisément en sorte que nous n’aurions pas de premier mandat –, nous devons d’abord forcer une négociation constitutionnelle, puis tenir un référendum dans un deuxième mandat. Pour utiliser une analogie avec Star Wars, la constitution, c’est la force, l’arme plus puissante que toutes les autres. Nous avons justement le pouvoir de forcer le Canada anglais à venir négocier avec nous, à la condition d’obtenir une majorité à l’Assemblée nationale. Cela nous permettrait d’agir plutôt que de simplement parler, de bouger plutôt que d’être immobiles, d’écrire l’histoire au lieu de la subir.


À l’heure actuelle, la loi 21 est menacée par les fédéraux et le français recule. Le régime du bilinguisme et du multiculturalisme canadien sape notre identité nationale. Ces questions sont urgentes et la grande majorité au Québec s’oppose au statu quo. Il faut partir de ça. 


Les palabres ne servent à rien. C’est en faisant des gains ou en essayant d’en faire que nous convaincrons nos concitoyens de tenir un référendum. Et pour être en mesure d’agir au lieu de parler, il faut prendre le pouvoir à la prochaine élection.



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Frédéric Bastien167 articles

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Titulaire d'un doctorat en relations internationales de l'Institut universitaire des hautes études internationales de Genève, Frédéric Bastien se spécialise dans l'histoire et la politique internationale. Chargé de cours au département d'histoire de l'Université du Québec à Montréal, il est l'auteur de Relations particulières, la France face au Québec après de Gaulle et collabore avec plusieurs médias tels que l'Agence France Presse, L'actualité, Le Devoir et La Presse à titre de journaliste. Depuis 2004, il poursuit aussi des recherches sur le développement des relations internationales de la Ville de Montréal en plus d'être chercheur affilié à la Chaire Hector-Fabre en histoire du Québec.